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    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. SYNTHÈSE, LES PERSONNES

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l’Esprit-Saint : Amour et Don. L’Esprit-Saint est dit « Amour » (q. xxxvii, a. 1-2) par application du texte de saint Paul : « L’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit-Saint qui nous a été donné. » Rom., v, 5. L’amour est une impulsion de celui qui aime vers l’être aimé. Or, le Père et le Fils ne peuvent s’aimer sans produire le Saint-Esprit qui est l’expression personnelle de leur amour, comme le Verbe est l’expression personnelle de la pensée du Père. — Enfin il est dit « Don » (q. xxxviii, a. 1, 2) et ce nom est emprunté à plusieurs textes de l’Écriture, Act., ii, 38 ; vin, 20 ; II Cor., i, 22 ; v, 5 ; Eph., i, 14 ; Rom., viii, 15-16. Ce nom est personnel au Saint-Esprit, comme l’Image l’est au Verbe, en tant qu’il marque dans le Saint-Esprit l’origine première de toutes les communications surnaturelles faites aux créatures. Cf. Petau, t. VIII, c. m.

Sur les autres appellations métaphoriques du Saint-Esprit : le « nœud » du Père et du Fils (S. Augustin, De Trinitate, t. VI, n. 5, P. L., t. sur, col. 928) ; le « baiser » du Père et du Fils (S. Bernard, In Canlica, serm. viii, n. 2, P. L., t. clxxxiii, col. 811) ; la « source vive », Joa., iv, 13, 14 ; vii, 38, 39 (cf. S. Cyrille de Jérusalem, Cat., xvi, n. 12, P. G., t. xxxiii, col. 934) ; la « force de Dieu », Luc, xxiv, 49 (cf. S. Cyrille d’Alexandrie, Thésaurus, assert. 34, P. G., t. lxxv, col. 603) ; le « doigt de Dieu », Matth., xii, 28, Luc, xi, 20 (cf. Cyrille d’Alexandrie, loc. cit., col. 575) ; le « sceau » et « l’onction de Dieu » (S. Athanase, Ad Serapionem, i, n. 22, 23, P. G., t. xxvi, col. 582, 583), voir Pesch, n. 572-577 et Ruiz, disp. LXXVI. D’ordinaire, les théologiens se contentent d’énumérer ces dénominations sans les commenter longuement.

b) Le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. —

Sur ce point, abondants sont les commentaires : la controverse dogmatique avec l’Orient donne ici aux théologiens un aliment substantiel. Consacrée par le concile de Florence (décret d’union), cette doctrine est accueillie comme un dogme de foi et exposée comme telle par tous. Voir ici Esprit-Saint, t. v, col. 762 sq., et Filioque, t. v, col. 2309 sq.

Nos théologiens latins rejettent comme téméraire la restriction jadis formulée par Durand de Saint-Pourçain, In J um Sent., dist. XXIX, q. ii, et Grégoire de Rimini, ibid., dist. XII, q. i, sur la propriété et l’exactitude du terme tanquam ab uno principio. Cf. Banez, In 7 am part., q. xxxvi, a. 4 ; Ruiz, disp. LXX, sect. i, n. 14, et tous les modernes. Mais, sous cette unité de doctrine ferme, le vieil antagonisme des opinions persiste. Si le Saint-Esprit ne procédait pas du Fils, s’en distinguerait-il réellement ? La réponse communément reçue le nie : n’est-ce pas l’opposition des relations qui fait en Dieu la distinction des personnes ? C’est là, on l’a vii, le sentiment de saint Thomas, qu’appuie l’immense majorité des théologiens de toute école, même Suarez, à qui cependant une conception particulière du principe « spirateur » suggère quelques hésitations. Cf. Salmanticenses, disp. XV, dub. m et iv. D’ailleurs l’hypothèse contraire, envisagée par Scot et quelques nominalistes, n’est qu’une hypothèse et ne mérite pas qu’on s’y arrête. Salmanticenses, loc. cit., dub. iii, n. 71-150 ; Jean de Saint-Thomas, disp. XV, a. 3, n. 21 sq. C’est au point de vue nettement dogmatique que Gonet a repris le problème, en fonction de la position des Grecs qui affirment énergiquement que le Saint-Esprit procède du seul Père et que néanmoins il se distingue du Fils. L’art. 1 de la disp. X, consacré à ce sujet, est à lire attentivement ; il constitue un heureux mélange de la théologie spéculative et de la théologie positive, si complètement développée par Petau, 1. Vil, c. ix.

c) Le Saint-Esprit, amour commun du Père et du Fils (q. xxxvii, a. 2). —

La procession du Saint-Esprit ab ulroque, selon la volonté, est une procession d’amour. Les théologiens se posent une question : comment envisager, au point de vue personnel, ce mutuel amour du Père et du Fils ? Le meilleur commentaire qui ait été fait de cette q. xxxvii, a. 2, est peut-être celui de Jean de Saint-Thomas, disp. XV, a. 5.

Des cinq manières dont saint Thomas déclare qu’on peut entendre cette affirmation, on doit en retenir surtout deux : l’amour en Dieu peut être ou essentiel ou notionnel. Pris essentiellement, l’amour en Dieu est absolu et commun aux trois personnes. Et, en ce cas, le Saint-Esprit ne peut être l’amour mutuel du Père et du Fils, puisque c’est par leur essence que s’aiment le Père et le Fils. C’est donc notionnellement que doit être entendu l’amour mutuel producteur du Saint-Esprit. S’aimer, en ce sens, n’est donc pas autre chose, pour le Père et le Fils, que « spirer », c’est-à-dire être le principe unique dont procède l’Amour-personne, comme « dire » n’est pas autre chose que produire le Verbe. Voir Suarez, t. XI, c. m ; Salmanticenses, disp. XVI, dub. i ; Jean de Saint-Thomas, loc. cit., n. 3-4 ; Franzelin, th. xxix, § 3 ; cf. J. Slipyj, Z)e amore mutuo et reflexo in processione Spiritus sancti explicando, dans Bohoslavia, Lwov, 1923, p. 97 sq.

Puisque la procession du Saint-Esprit est dans l’ordre de l’amour, les théologiens se sont demandé quels sont les objets de cet amour. Mêmes hésitations et divergences se retrouvent ici, que nous avons trouvées à propos de l’objet de la connaissance dont procède le Verbe. Voir ci-dessus, col. 1817. Cf. Ruiz, disp. CXI, sect. n-vi ; Suarez, t. XI, c. ii-m ; Salmanticenses, disp. XV, dub. vi ; Billot, th. xxviii et corollaire ; Pesch, n. 570-571.

d) La procession du Saint-Esprit par le Fils. —

Les théologiens se sont demandé si la formule grecque « procéder du Père par le Fils » était admissible. Saint Thomas l’avait interprétée bénignement. I », q. xxxvi, a. 3. Suarez montre en quel sens elle peut être retenue. L. X, c. iii, n. 4 sq. Franzelin apporte encore plus de précisions, th. xxxvi. Voir Salmanticenses, disp. XV, dub. i, § 1 ; Kleutgen, n. 1000-1010 ; Pesch, n. 541543 ; Diekamp-Hoffmann, § 19, p. 369 ; Billot, th. xxvi, ad 2um ; L. Janssens, p. 595-601.

Nous laissons délibérément de côté certaines questions plus subtiles agitées à propos de la procession du Saint-Esprit, nous contentant de renvoyer aux Salmanticenses, disp. XV, dub. m-v ; à Jean de Saint-Thomas, disp. XV, a. 4 ; à Suarez, t. X, c. m-vi ; à Ruiz, disp. LXXI.

Rapports des personnes à l’essence (q. xxxix). —

Cette question de la Somme est assez brièvement commentée par les théologiens. En réalité elle constitue soit une simple conclusion de ce qui a été dit touchant la relation subsistante en Dieu, soit des applications pratiques concernant la terminologie à retenir.

1. Conclusions des principes touchant la relation subsistante en Dieu. —

Puisqu’en Dieu personne et essence s’identifient dans la réalité, il faut se garder d’envisager l’essence divine par rapport à la personne, comme nous le faisons quand il s’agit des objets de notre connaissance sensible. En ceux-ci, nous considérons l’essence concrète et réalisée non comme un individu subsistant, mais comme un principe de subsistence, laquelle se réalise par l’existence propre, distincte des autres existences. Si nous voulons concevoir l’essence divine telle qu’elle est concrètement, nous ne pouvons la concevoir, au contraire, que comme une essence subsistante en soi. C’est la seule manière de conserver intacte la doctrine scolastique de la relation subsistante, réelle grâce à son identité avec l’essence. Si donc nous comparons en Dieu personne