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    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. SEMIRATIONALISME CATHOLIQUE

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à la vérité propter audoritatem Dei loquentis ; mais la vérité est acceptée et crue solummodo propter perspectum intrinsecum nexum idearum. Schéma sur la doctrine catholique, note 14, dans Coll. Lacensis, t. vii, col. 527 d ; cf. Vacant, Études théologiques sur les constitutions du concile du Vatican, t. i, p. 591. Pour Hermès, « la foi est en nous un état de certitude ou de persuasion de la vérité de la chose connue ; et nous sommes amenés à cet état par un assentiment nécessaire de la raison théorique eu par un consentement nécessaire de la raison pratique ». Introduction philosophique à la théologie, 2e éd., Munster, 1831, p. 259. Si l’autorité seule était le motif de l’assentiment de foi, il n’y aurait plus, ajoute Hermès, aucune certitude danslafoi. Ibid., p. 265. C’est doncàjuste titre que déjà Grégoire XVI reprochait à Hermès de considérer « la raison comme la règle première et le moyen unique qui puissent permettre à l’homme de parvenir à la connaissance des vérités surnaturelles ». Bref Dum acerbissimas, 26 sept. 1835, Denz.-Bannw., n. 1619.

2. Günther considère que la question mère de la philosophie est la théorie de la connaissance ; cette théorie doit chercher ses bases dans la conscience du moi. S’inspirant de la méthode de Descartes, Gùnther s’applique à déterminer comment, des phénomènes de la conscience, nous passons à la connaissance de nous-mêmes, du monde extérieur et de Dieu. Nous avons entendu Schelling et Hegel affirmer l’identité de l’être et de l’idée : pour eux, tous les phénomènes de l’univers sont le résultat de l’évolution d’une seule et même substance infinie. Sans doute, Gùnther ne se rallie pas complètement à cette métaphysique : il rejette le panthéisme et maintient une distinction entre la substance divine et la substance du monde ; il admet néanmoins que tous les êtres créés sont des manifestations diverses d’une seule et même substance, la nature. Inconsciente dans les êtres inférieurs, la nature devient consciente dans l’homme. Cette conscience du moi est pour l’homme le principe même de sa personnalité. Cette définition de la personnalité dérive en ligne directe de Descartes ; mais on la trouve déjà appliquée à la Trinité chez un théologien anglican du xviie siècle, Sherlock. Voir Leibniz, / » epist., Defmitiones. .. etc., dans le Cursus theologicus de Migne, t. viii, col. 759. Sur la portée de cette notion dans la théologie catholique, voir Hypostatique (Union), t. vu. col. 554. C’est en partant de cette notion de la conscience du moi, que GOnther prétend apporter une démonstration véritable du mystère de la Trinité. Voir plus loin. La possibilité de cette démonstration repose sur un autre principe, connexe au principe de l’évolution de Hegel. Il y a aussi une évolution dans la connaissance : la raison doit connaître de mieux en mieux toutes les vérités, y compris celles qu’on appelle mystères. Il y a plusieurs étapes dans la connaissance de ces mystères. La foi aveugle qui adhère à une vérité sur le seul témoignage de Dieu est une première étape ; la dernière étape sera la parfaite intelligence de cette vérité. L’intelligence des vérités divines devient, au cours des âges, de plus en plus parfaite, par suite du progrès des sciences et de la philosophie. Ainsi les jugements doctrinaux de l’Église n’ont rien de définitif ; formules provisoires, opportunes pour certaines époques, elles feront un jour place à d’autres formules et à d’autres définitions dans lesquelles apparaîtra une meilleure intelligence des dogmes. C’est à cause de ces prétentions que Pie IX reproche a GOnther d’introduire dans la théologie le système déjà réprouvé du rritionalisme et de donner à la raison une place prépondérante, qu’elle ne devrait pas avoir en regard de la foi. Bref Fximiam tuam, 15 juin 1857, Denz, Baumv., n. 1055, 1656. Sur la théorie générale de GOnther relativement au progrès rationnel de la vérité chrétienne. voir Franzelin, De Traditione, 2e éd., p. 309 ; Kirchenlexicon, art. Gùnther, t. v, p. 1324 ; Vacant, op. cit., t. ii, n. 839 sq. ; et ici art. Gùnther, t. vi, col. 1992.

3. Frohschammer céda à la même tendance qu’Hermès et que Gùnther. Toutefois, il admet que, si la révélation est nécessaire pour nous manifester les mystères, nous pouvons néanmoins par les principes de la raison, en avoir, après leur révélation, une certitude naturelle et scientifique. Frohschammer appliquait cette doctrine à tous les mystères sans exception, même à ceux qui, comme l’incarnation, sont fondés sur la libre volonté de Dieu. Pie IX, Lettre Gravissimas inter, Il décembre 1862, Denz.-Bannw., n. 1668. Il rejoignait ici Gùnther qui, tenant toutes les œuvres de Dieu ad extra pour des effets nécessaires de la bonté divine, se voyait obligé de confondre les mystères que la théologie considère comme des effets libres de la volonté de Dieu et ceux qui, en Dieu, ont une existence nécessaire, tel le mystère de la Trinité.

D’autres semirationalistes cependant maintenaient cette distinction et, tout en reconnaissant l’impuissance de la raison à connaître les mystères libres, refusaient de ranger la Trinité et les dogmes relatifs à l’essence nécessaire des choses, parmi les objets excédant la connaissance naturelle de la raison. Nous n’avons sur ce point aucun nom propre cité dans les Acta du concile du Vatican ; mais la distinction entre ces deux sortes de semirationalistes est expressément proposée à la note 12 du schéma de la constitution De doctrina catholica. Coll. Lac, t. vii, col. 525 be ; cf. Vacant, op. cit., p. 589.

4. L’ontologisme, qui affirme pour l’homme la nécessité de connaître toutes choses en Dieu devait, chez quelques-uns de ses partisans, aboutir à des théories analogues. Ce fut le cas de Rosmini. Comme Gùnther, Rosmini se ressent d’une influence profonde de Hegel. Voir ici t. xiii, col. 2926. La théorie de la connaissance d’après Rosmini semble confondre connaissance de l’ordre naturel et connaissance de l’ordre surnaturel. Voir prop. 36 et 37, art. cit., col. 2947-2948. De sorte que, comme Frohschammer, le philosophe italien admet, pour la raison humaine, la possibilité de démontrer l’existence de la Trinité, prop. 25, 26, art. cit., col. 2941.

Explications positives du mystère de la Trinité.

1. Au début du xixe siècle, un auteur, aujourd’hui bien oublié, a présenté trois démonstrations de la Trinité : c’est Mastroflni (1845), Metaphysica sublimior, t. III, IV, V. La première part de l’idée de raison suffisante de l’existence propre, qui suppose, d’un côté, un principe d’existence, le Père, de l’autre, une hypostase procédant de ce principe, le Fils. La commune action de ces deux hypostases crée entre elles un troisième principe, le Saint Esprit. La deuxième démonstration s’appuie sur « la quantité de la force créatrice que Dieu contient en lui » (sic) : puissance créatrice des substances, des espèces et des individus, ce qui, d’après l’auteur, poserait en Dieu trois puissances créatrices infinies, trois personnes. Enfin, la manifestation de la gloire divine exige une deuxième personne, distincte de la première, et qui en soit l’Image manifestant la splendeur de la gloire du Père. Une troisième personne est nécessaire, distincte de la première et de la seconde, pour connaître la manifestation de la gloire divine. Sur ces singulières « démonstrations », voir Franzelin. De Dro trino. th. xviii, p. 281-285. Il semble que Mastroflni ait emprunté certaines idées de son système a Peutinger, lirliqiôse Ofjenbarung und Kirche, Salzbourg, 1785, p. : <78. Cf. Schwetz, Theologta dogmatica, t. i, p. 502.

Encore en Italie, il faut signaler la démonstration * présentée par liosmini. Se reporter à Rosmini. t. m. col. 2941, prop. 25, 26.