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ZWINGLI. ŒUVRES

Mais la confession de foi la plus importante, de la part de Zwingli, fut celle qu’il présenta, le 30 juillet 1530, à l’empereur Charles-Quint, lors de la Diète d’Augsbourg, sous le titre : Ad Carolum Romanorum Imperatorem fidei Uldrici Zwinglii ratio. Niemeyer, Collectio confessionum in ecclesiis reformatis publicatarum, 1840, p. 16-35. C’est là sans nul doute qu’il convient de chercher le dernier état de la pensée de Zwingli ; en voici les passages essentiels :

1. « Je crois et je sais qu’il existe un Dieu unique et seul et qu’il est par nature, bon, vrai, puissant, juste, sage, créateur et curateur de toutes les choses visibles et Invisibles ; qu’il est Père, Fils et Saint-Esprit, trois personnes certes, mais ayant une essence une et simple ; et je professe complètement, selon l’exposition tant du symbole de Nicée que de celui d’Athanase, par le détail, tout ce qui est dit tant de la divinité même que des trois noms ou personnes. Je crois que le Fils a pris chair et je comprends qu’il a reçu la nature humaine, c’est-à-dire tout l’homme, composé de corps et d’âme, véritablement de l’immaculée et perpétuellement Vierge Marie. »

2. « Je sais que cette Divinité (Numen) souveraine, qui est mon Dieu, dispose librement de toutes choses, en sorte que son dessein ne dépende aucunement du concours d’aucune créature… Il découle de là que, bien que sachant et prévoyant la chute future de l’homme, il l’a toutefois créé, mais en même temps il a décrété que son Fils revêtirait la nature humaine pour réparer la chute… »

3. « Je sais qu’il n’existe pas d’autre victime pour expier les péchés que le Christ… On laisse donc ici de côté la justification et la satisfaction par nos œuvres d’une part, et l’expiation et intercession de tous les saints, soit demeurant sur la terre, soit déjà au ciel, par la bonté et miséricorde de Dieu, d’autre part. Il n’existe en effet qu’un seul médiateur de Dieu et des hommes, le Christ Jésus Dieu et homme. »

4. « Le péché originel, tel qu’il est dans les fils d’Adam, n’est pas proprement un péché, … car il n’est pas un délit contre la loi. C’est donc proprement une maladie et une condition : une maladie, car de même qu’Adam est tombé par l’amour de soi, de même nous tombons, nous aussi ; une condition, car, de même qu’il est devenu esclave et sujet de la mort, de même nous naissons esclaves et enfants de la colère et sujets à la mort… Je reconnais que ce péché originel est transmis de naissance par condition et contagion à tous ceux qui sont engendrés par la liaison de l’homme et de la femme et je sais que nous sommes par nature fils de la colère mais je ne doute pas que nous soyons reçus comme enfants de Dieu par la grâce qui, dans le Christ, le second Adam, a restauré la chute… »

5. « Il découle de là, si nous sommes rétablis dans la vie par le second Adam, le Christ, que c’est à tort (temere) que nous damnons les enfants nés de parents chrétiens et même (imo) les enfants des païens. »

6. « Au sujet de l’Église nous pensons ce qui suit : dans les Écritures, le mot Église est pris en divers sens, d’abord, pour ces élus qui ont été par la volonté de Dieu prédestinés à la vie éternelle… Cette Église-là n’est connue que de Dieu… Mais ceux qui en sont les membres savent fort bien, parce qu’ils ont la foi, qu’ils sont élus et membres de cette première Église, mais ils ignorent les autres membres qu’eux-mêmes… Le mot Église est encore pris universellement pour l’ensemble de ceux qui se rattachent au nom du Christ… Nous croyons donc que tous ceux qui professent le nom du Christ appartiennent à cette Église-là… En dernier lieu, le mot Église est pris pour tout groupement particulier au sein de l’Église universelle et visible, par exemple l’Église romaine, l’Église d’Augsbourg, l’Église de Lyon… Je crois donc, dans ce troisième sens, qu’il existe une seule Église de ceux qui ont le même Esprit qui les rend certains qu’ils sont les vrais fils de la famille de Dieu et c’est là les prémices des Églises. Je crois que cette Église ne peut errer dans la vérité, c’est-à-dire dans les premiers fondements de la foi, qui servent de base (cardo, littéralement de gond) aux autres vérités. Je crois que l’Église universelle visible (sensibilem) est une dans la mesure où elle tient la confession véritable dont il a été déjà parlé… »

7. « Je crois, bien plus, je sais qu’il s’en faut tant que les sacrements confèrent la grâce qu’ils ne servent pas même à la transmettre ni à la dispenser… L’Esprit-Saint n’a pas besoin de véhicule. Il est lui-même la vertu et la force qui porte toutes choses, il n’a donc pas besoin d’être porté ; et nous n’avons jamais lu dans les Écritures que des éléments sensibles, comme les sacrements, portent sûrement avec eux-mêmes l’Esprit-Saint… On en conclut… que les sacrements sont conférés en témoignage public de cette grâce que, par avance, chacun a reçue… Je crois donc que le sacrement est le signe d’une chose sainte, c’est-à-dire de la grâce déjà accordée… Pour cette raison, les sacrements, qui sont des cérémonies sacrées, …doivent être religieusement administrés… S’ils ne peuvent donner la grâce, ils nous associent toutefois visiblement à l’Église, quand invisiblement nous avons déjà été agrégés à elle… »

8. « Je crois que dans la sainte eucharistie, c’est-à-dire dans la cène d’action de grâces, le vrai corps du Christ est présent par la contemplation de la foi ; c’est-à-dire que ceux qui rendent grâces à Dieu pour le bienfait qui nous a été conféré dans son Fils, reconnaissent qu’il a pris une vrais chair, qu’il a vraiment souffert dans cette chair, qu’il a vraiment purifié nos péchés par son sang et que tout cela que le Christ a accompli leur est comme rendu présent par la contemplation de la foi. Mais que le corps du Christ, par son essence et réellement, c’est-à-dire son corps naturel, soit présent dans la cène ou qu’il soit donné à notre bouche et à nos dents, comme les papistes et ceux qui regardent encore aux marmites d’Égypte (les luthériens) le prétendent, non seulement nous le nions mais nous affirmons avec assurance que c’est une erreur opposée à la parole de Dieu… »

9. « Je crois que les cérémonies qui ne sont pas contraires, par leur caractère superstitieux, à la foi ou à la parole de Dieu — bien que j’ignore s’il en existe — peuvent être tolérées jusqu’à ce que la lumière brille de plus en plus… Mais je ne range pas parmi ces cérémonies les images prostituées au culte, mais crois qu’elles sont du nombre des choses qui répugnent entièrement à la parole de Dieu. Quant à ce qui n’est pas proposé en culte et qui n’offre aucun péril de culte, je suis si loin de le condamner que je regarde au contraire la peinture et la sculpture comme des dons de Dieu… »

10. « Je crois que le ministère de la prédication ou prophétie est sacrosalnt, en sorte qu’il est, avant tout autre office, souverainement nécessaire… Nous admettons donc cette sorte de ministres qui enseignent au peuple du Christ, et aussi cette sorte qui baptise, administre dans la cène le corps et le sang du Seigneur, qui visite les malades, qui nourrit les mendiants au nom et avec les biens de l’Église… Mais cette classe mitrée et luxueuse, qui n’est faite que pour consumer les fruits de l’Église, …nous la regardons comme une calamité et non plus nécessaire dans le corps de l’Église que les plaies ou les bosses dans le corps humain. »

11. « Je sais que le pouvoir civil (magistratum) légalement organisé ne tient pas moins la place de Dieu que le ministère de prophétie (prédication)… »

12. « Je crois que la fiction du feu du purgatoire est une chose aussi injurieuse contre la rédemption gratuite accordée par le Christ qu’elle est fructueuse pour ses auteurs… »

I. Sources. — Corpus reformatorum, t. lxxxviii sq., Opera Zwinglii, édition Egli, Finsler, Köhler ; il existait antérieurement une édition des œuvres par Schiller et Schulthess, Ulrichi Zwinglii opera, 1828-1842, 8 vol. ; Arbenz und Wartmann, Vadianische Briefsammlung, 1890-1913, 7 vol. et 6 suppléments ; Schiess, Der Briefwechsel der Brüder Ambrosius und Thomas Blaurer, 1908-1912, 3 vol. ; Œchsli, Quellenbuch zur Schweizergeschichte, 1891 sq. ; Stricker, Aktensammlung zur schweizer Reformationsgeschichte, 1879 ; Egli, Analecta reformatoria, 1899-1901, 2 vol. ; Kidd, Documents illustrative of the continental Reformation, 1911 ; Niemeyer, Collectio confessionum in ecclesiis reformatis publicatarum, 1840.

II. Ouvrages a consulter. — Wegweiser, Zwingli-Bibliographie, Zurich, 1897 ; Oswald Mykonius, De H. Zwinglii fortissimi herois ac theologi doctissimi vita et obitu, Zurich, 1532 ; Melchior Schiller, H. Zwingli, Geschichte seiner Bildung zum Reformator des Vaterlandes, Zurich, 1818 ; R. Cristoffel, H. Zwingli, Leben und ausgewählte Schriften, Elberfeld, 1857 ; J.-C. Mörikofer, U. Zwingli, nach den urkundlichen Quellen, Leipzig, 2 vol., 1867 et 1869 ; R. Stähelin, H. Zwingli, sein Leben und Wirken, nach den Quellen dargeslellt, 2 vol., Bâle, 1895 et 1897 ; P. Wernle, Der evangelische Glaube, nach den Hauptschriften der Reformatoren, t. ii, Zwingli, Tubingue, 1919 ; August Lang, Zwingli und Calvin, Bielefeld et Leipzig, 1913 ; Ch. L’Ebraly, La doctrine sacramentaire de Ulrich Zwingli, Clermont-Ferrand, 1939 (à ajouter à la bibliographie du mot Sacramentaire (Querelle).

L. Cristiani.