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ZWINGLI. ŒUVRES

envers l’homme pieux. — 31. L’excommunication ne peut être portée contre personne par un particulier, mais seulement par l’Église, c’est-à-dire par la communauté au sein de laquelle vit le coupable, en union avec son guide, c’est-à-dire le curé. — 33. Les biens donnés indûment aux temples, couvents, moines et nonnes, doivent être distribués aux nécessiteux, à moins qu’ils ne soient rendus au possesseur légal. — 50. Dieu seul remet les péchés par Jésus-Christ, son Fils, Notre-Seigneur (donc pas de pouvoir des clés au pape). C’était ici que Zwingli soutenait que la pierre sur laquelle le Christ devait bâtir son Église n’était pas Pierre, mais lui-même, et d’autre part que le pouvoir de lier et de délier n’était autre que le pouvoir de prêcher. — 52. On ne doit donc faire la confession à un prêtre ou à son prochain que pour obtenir un conseil utile, non pour avoir l’absolution des péchés. — 54. Le Christ a porté toutes nos peines et souffrances, quiconque impose des pénitences qui n’appartiennent qu’au Christ se trompe et offense Dieu. — 55. Quiconque prétend réserver l’absolution de n’importe quel péché à un pénitent contrit ne serait plus le représentant de Dieu, ni de Pierre, mais du diable (contre les absolutions réservées au pape ou à l’évêque). — 56. Quiconque remet des péchés pour de l’argent est l’apôtre du diable, le collègue de Simon le Magicien et de Balaam (contre les indulgences). — 57. La véritable Écriture sainte ne connaît aucun purgatoire après la mort ; Zwingli relègue le passage du IIe livre des Machabées, xii, 43-46, sur la prière pour les morts, au rang des apocryphes. — 58. Dieu seul connaît la sentence portée sur les défunts. — 60. Que l’on prie, dans son souci pour les défunts, afin que Dieu leur accorde sa grâce, je ne le repousse point ; mais attacher cette prière à des temps fixes (trentaine, anniversaire, etc.) et dire des mensonges à ce propos pour un gain d’argent, cela n’est pas humain, mais diabolique. — 61. L’Écriture ne sait rien d’un « caractère » imprimé par le sacerdoce. — 62. Elle ne connaît d’autre prêtre que ceux qui prêchent la parole de Dieu.

Si maintenant l’on revient aux thèses 34-43, sur l’autorité on rencontre les propositions suivantes : L’autorité dite ecclésiastique n’a aucun fondement pour sa magnificence dans l’enseignement du Christ (34) ; — mais l’autorité civile a force et droit selon cet enseignement (35) ; — tout ce que l’autorité ecclésiastique s’attribue, en fait de droit, appartient à l’autorité civile (36) ; — aux pouvoirs civils, les chrétiens doivent tous obéissance, sans exception (37) ; — à la condition toutefois que ces pouvoirs n’ordonnent rien qui soit contre Dieu (38) ; — toutes les lois doivent donc être conformes à la volonté divine (connue par la Bible) (39) ; — les pouvoirs civils ont seuls le droit de mettre à mort, mais seulement ceux qui donnent un scandale public (40) ; que s’ils dirigent avec rectitude ceux dont ils ont devant Dieu la responsabilité, ces derniers sont tenus de les assister corporellement (au moyen des impôts) (41) ; — mais s’ils voulaient se conduire déloyalement et contre la règle chrétienne, ils devraient être déposés avec l’aide de Dieu (42) ; — en somme, le meilleur et le plus solide des régimes est celui qui gouverne selon Dieu, et au contraire le pire et le plus instable de tous est celui où les gouvernants imposent leurs caprices (43). Pour l’explication de tous ces principes zwingliens, voir Opera Zwinglii, t. ii, p. 14-457. Tout se ramène en somme à deux axiomes : la Bible est l’unique fondement de la foi chrétienne ; la Bible est le seul fondement des États.

2o  Ouvrages moins importants. — Von göttlicher und menschlicher Gerechtigkeit (De la justice divine et humaine), 1523, Opera, t. ii, p. 471-525. — Der Hirt (Le pasteur), 1524, ibid., t. iii, p. 5-68 ; petit ouvrage où Zwingli prétend dessiner l’idéal du prédicateur évangélique, chargé de prêcher la justice divine (c’est-à-dire la volonté de Dieu connue par la Bible, volonté qui seule a le privilège de conférer, au moyen de la foi, la justice à l’homme). — Eine kurze und christliche Anleitung (Courte initiation chrétienne), 17 nov. 1523, Opera, t. ii, p. 628-663. Cet opuscule fut publié officiellement par le Conseil de ville, en sorte qu’il prenait l’aspect et la valeur d’une première confession de foi, imposée à tous les prédicateurs du canton. On y trouve les idées familières à Zwingli. En voici les propositions essentielles : « Nous sommes tous pécheurs de naissance, car nous sommes enfants d’Adam » et « nous sentons en nous-mêmes la présence du péché » par les tentations auxquelles nous sommes tous soumis. La loi divine a été révélée précisément pour nous faire connaître notre impuissance en face du bien à accomplir et du péché à surmonter. Au surplus, même si nous accomplissions parfaitement la loi, nous n’aurions droit qu’à une récompense temporelle, nullement à une récompense éternelle, qui est sans commune mesure avec nos actions. Adam pécha par orgueil, le Christ nous a sauvés par son humilité. Adam avait violé la loi divine, le Christ a payé par sa parfaite innocence et apaisé la justice divine. L’homme ne pouvait avoir aucun droit à la vie éternelle, c’est Jésus-Christ créateur et rédempteur qui nous a acquis ce droit. La joie céleste est si merveilleusement grande que nulle vie terrestre ne pouvait la mériter. Au moyen de ses souffrances, le Christ l’a méritée pour nous. C’est par la foi en Jésus que ce mérite du Christ nous est appliqué, en ce sens que la loi est détruite, non pas en elle-même et dans sa force obligatoire, mais bien dans sa valeur de condamnation contre nous qui ne pouvions l’accomplir.

3o  De vera et falsa religione commentarius, Opera, t. iii, p. 628-911. — Voici l’ouvrage le plus important, le plus soigné, le plus « scientifique », s’il est permis d’employer un tel mot ici, de Zwingli. Il est de 1525. Si l’auteur y a employé la langue latine, alors que ses précédents ouvrages étaient en langue vulgaire, c’est dans le désir d’atteindre des cercles plus étendus, et parce que, malgré ses sentiments antifrançais bien connus, il a voulu dédier le livre à François Ier que certains rapports avaient pu lui faire croire disposé à favoriser la Réforme. Dans cet ouvrage, il a voulu donner un exposé systématique de la doctrine réformée. Luther n’avait jamais réussi à faire rien de semblable. Seuls son petit et son grand Catéchisme devaient, en 1528, présenter un résumé, mais un résumé seulement, de sa théologie. Les Loci communes de Mélanchthon n’avaient été, dans leur première forme, qu’une introduction à l’étude de la Bible, dont Luther avait eu la prétention de donner l’unique fil directeur dans son principe de la justification par la foi seule sans les œuvres, extrait, selon lui, de l’épître aux Romains. Zwingli est ici beaucoup plus complet. Son ouvrage est la première Somme théologique des novateurs, en attendant l’Institution chrétienne de Calvin, en 1536. À vrai dire, il n’a pas très parfaitement rempli l’intention et le dessein qu’il s’était manifestement proposés. Il entame l’étude de la religion, comme s’il allait en raisonner en philosophe, qui va établir le lien nécessaire entre Dieu et l’homme, sa créature raisonnable. Mais il n’a pas l’air de supposer qu’il puisse y avoir une religion fondée sur le raisonnement. S’il parle des païens les plus illustres et des parcelles de vérité qu’ils ont exprimées, ce qu’en vrai humaniste il aime à faire çà et là, c’est cependant toujours en expliquant les lumières qu’ils ont eues par une révélation particu-