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ZACHARIK. LE LIVRE, ANALYSE


pable, porte l’opprobre, Zach., iii, 1-10 ; par son péché la nation a été réduite en servitude. Zach., v, 5-11. Non content de cette condamnation d’ensemble, le prophète stigmatise en particulier les fautes plus graves tels que blasphèmes, parjures, vols, Zach., v, 3-4, la haine du prochain, viii, 16-17. A l’exemple de ses devanciers, il s’en prend au formalisme religieux à l’occasion de la démarche de quelques Juifs venant s’informer de la nécessité de continuer la pratique des jeûnes commémoratifs des jours sombres qui avaient marqué la fin d’Israël ; il rappelle, à ce propos, le principe qui doit dominer et inspirer toutes ces pratiques du culte extérieur, à savoir la fidélité des esprits et des cœurs à Jahvé, faute de quoi toutes ces manifestations de piété et de pénitence ne sont qu’illusion et mensonge, viii, 3, 5-7. Par là il rejoignait les anciens prophètes, « comme eux, quoique sur un terrain différent, il dénonçait les illusions d’un culte tout extérieur, ne traduisant en rien ou ne rendant que fort imparfaitement les sentiments réels des cœurs. Comme eux, il prêchait cette vérité fondamentale que la religion consiste avant tout à rendre la justice selon la vérité, à pratiquer la miséricorde et la compassion, chacun envers son frère, à n’opprimer pas la veuve et l’orphelin, l’étranger et le pauvre, à ne pas méditer le mal l’un contre l’autre. Il annonçait à ceux qui persévéreraient dans leurs illusions le renouvellement des châtiments que les auditeurs indociles des voyants de jadis avaient fini par subir ». Zach., vii, 8-14. Touzard, loc. cit., p. 70.

Plus lamentable encore est l’impression qui se dégage des derniers chapitres ix-xiv du livre de Zacharie. Le peuple semble revenu aux pratiques idolâtriques que les prophètes des vin" et vue siècles avaient si violemment reprochées aux habitants d’Israël et de Juda. Zach., x, 2 ; xiii, 2. Une telle situation paraît mieux correspondre à une époque plus récente, celle du temps de Xerxès par exemple, et constitue l’une des difficultés à l’authenticité des derniers chapitres du livre de Zacharie. Cf. infra.

Les efforts du prophète cependant, joints à ceux d’Aggée, ne demeurèrent pas vains, et sous leur impulsion les travaux furent repris et la maison de Dieu achevée la sixième année de Darius, I Esdr., vi, 15. Dans cette période décisive pour l’avenir de la religion d’Israël, pas plus que ses devanciers, Zacharie ne faillit à sa mission ; par ses oracles, il maintint et ranima la foi des rapatriés dans les destinées du peuple élu et assura ainsi l’avenir du judaïsme.


II. Le livre.

Analyse. —

Le livre se divise en deux parties nettement distinctes, une première qui comprend les huit premiers chapitres et une seconde les neuf derniers.

1. Première partie, i-viii.

L’ouvrage débute par une courte introduction, composée d’une donnée chronologique, du nom du prophète et d’une exhortation aux rapatriés à revenir à Dieu qui a châtié leurs pères, mais leur promet le pardon.

Viennent ensuite huit visions, des visions nocturnes, qui constituent la partie essentielle du livre, Dans l’ensemble, elles concernent l’avenir d’Israël : tandis que les nations païennes subiront la peine de leurs forfaits contre le peuple de Dieu, Jérusalem et le temple seront relevés dans leur antique splendeur. En conclusion de ces visions, une action symbolique représente le couronnement du grand-prêtre Josué, en tant que figure du grand-prêtre éternel et du roi de la race davidique.

Première vision, i, 7-17 : Les cavaliers.

Le prophète aperçoit des cavaliers, trois d’après l’hébreu, quatre d’après la leçon préférable des Septante. « L’homme dans la vallée » lui explique qu’ils ont été envoyés par le Seigneur pour parcourir la terre qu’ils ont trouvée habitée et tranquille. Un ange interprète la vision, demandant d’abord à Jahvé combien de temps encore il ne prendra pas en pitié Jérusalem et les villes de Juda, éprouvées depuis soixante-dix ans déjà. Par la voix de l’ange, le Seigneur fait connaître que Jérusalem a de nouveau trouvé grâce à ses yeux, que sa demeure y sera rebâtie et que les villes de Juda retrouveront l’abondance.

Malgré l’explication de l’ange la vision ne laisse pas que d’être obscure, sinon dans le sens général suffisamment clair du point de vue de la restauration d’Israël, du moins dans l’interprétation de tel ou tel trait en particulier ; c’est ainsi que les opinions varient sur le symbole des cavaliers montés sur des chevaux aux couleurs différentes. Sans y chercher comme jadis les anges des nations, soit ceux des grands empires, soit ceux des peuples voisins d’Israël, on y voit plus volontiers des messagers anonymes, sans doute des messagers célestes, subordonnés à l’ange de Jahvé et qui, leur mission terminée, viennent lui en rendre compte. Buzy, Rev. bibliq., 1918, p. 145. Non moins discutée est la situation historique à laquelle fait allusion « la terre habitée et tranquille ». S’agit-il de l’Asie avant la conquête de Babylone par Cyrus, vers 540 par conséquent (Van Hoonacker, Les douze petits prophètes, p. 594), ou n’est-ce pas plutôt le début du règne de Darius où quelques révoltes apaisées et d’ailleurs hors de l’horizon d’Israël n’empêchaient pas la paix, c’est-à-dire la tranquillité d’une terre habitée et non ravagée et dépeuplée comme l’avait été Juda ? Par contre, à cette même époque, si le courroux de Jahvé avait déjà frappé Babylone, il ne lui avait pas encore porté les coups sous lesquels Nabuchodonosor avait anéanti Juda.

Les deux visions suivantes développent l’idée du châtiment des nations et de sa contre-partie le relèvement de Juda.

Deuxième vision : Les quatre cornes, ii, 1-4 (Vulg., i, 18-21). —

Les quatre cornes que voit ensuite le prophète représentent, lui dit l’ange, les ennemis qui ont dispersé Israël. Mais qui sont-ils ? Les quatre grandes nations que Daniel avait en vue dans ses visions : les Chaldéens, les Médo-Perses, les Macédoniens, les Syriens, ou bien les Babyloniens, les Médo-Perses, les Grecs et les Romains, ou mieux, selon la plupart des commentateurs modernes, les ennemis d’Israël en général qui ont pris part à la dispersion de Juda et de Jérusalem (le mot Israël tenu pour interpolé). Quatre artisans surviennent pour abattre les cornes. Dans ces instruments de la vengeance divine on voit généralement des anges, les agents naturels ou surnaturels qui châtièrent les ennemis du peuple de Dieu.

Troisième vision : L’arpenteur, ii, 5-17 (Vulg., ii, 1-13). —

La première partie, 5-9, met en scène un jeune homme qui, une corde d’arpenteur à la main, déclare au prophète qu’il va mesurer la largeur et la longueur de Jérusalem. Survient un ange qui lui ordonne de laisser son travail devenu inutile car la ville renfermera tellement d’habitants, hommes et bêtes, que des murs ne sauraient les contenir. C’est d’ailleurs Jahvé lui-même qui sera pour Jérusalem un rempart protecteur. Le sens général de la vision est très clair : c’est l’annonce de la splendeur de la cité sainte qui dépassera toutes les prévisions des rebâtisseurs. Il n’y a donc pas lieu de voir dans l’arpenteur prenant les dimensions de la ville le symbole de ces Juifs craintifs, impatients ou mesquins, qui s’inquiétaient des proportions de la cité à rebâtir.

Ce qui suit la vision proprement dite de l’arpenteur, les ꝟ. 10-17, est assez souvent regardé comme étran-