Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.1.djvu/777

Cette page n’a pas encore été corrigée

droits individuels et familiaux, d’adaptation au bien commun, une question partiellement morale.

En traitant du devoir fiscal, l’ancienne théologie morale n’était pas sans examiner certaines de ces conditions morales ; dans notre exposé nous avons reproduit quelques-unes de ces vues, en particulier celles qui concernaient la justice requise dans les impôts.

D’autres points auraient pu être signalés, comme celui des personnes qui pouvaient être soumises aux lois fiscales ; bien des auteurs nocent que, si en principe les impôts sont personnels, ils peuvent aussi atteindre les personnes par le moyen des choses ou des biens ; et c’est ainsi que, si la loi fiscale s’applique directement et normalement sur les sujets d’un État, elle peut aussi indirectement saisir des étrangers séjournant plus ou moins longtemps dans un pays.

2º Une question casuistique d’une importance considérable est aussi abordée, surtout par les auteurs modernes : celle de la déclaration que le fisc demande souvent aux intéressés pour établir le taux des impôts qui leur seront réclamés. En principe il serait à souhaiter qu’une suffisante loyauté règne dans ces déclarations. Il en serait ainsi s’il existait dans le milieu social un véritable dévouement à la chose publique. Malheureusement on est loin, en beaucoup de nos nations modernes, de cet idéal. Le fisc lui-même admet le plus souvent que les contribuables se contentent de déclarations relativement incomplètes ou déficientes. Les moralistes permettent avec ensemble, dans de tels cas, aux consciences les plus délicates de suivre sur ce point ce qui est d’usage autour d’elles ; il ne faut pas que les honnêtes gens se trouvent par leur honnêteté même mis en situation trop désavantageuse.

Cette question de la déclaration se trouve parfois compliquée par le serment qu’en certains pays on prétend imposer aux contribuables. Procédé qu’on peut considérer comme regrettable parce que, sans troubler les fraudeurs bien déterminés, il risque de troubler les consciences loyales. La où l’impôt serait manifestement ou injuste ou excessif, le serment n’ajouterait rien à l’obligation non existante et pourrait, d’après les moralistes, être considéré comme de nul effet.

3º Quant à la question générale de la forme à donner aux impôts pour en assurer la plus juste et la plus équitable répartition et les adapter au mieux au bien question à la fois morale et technique qui dépasse le cadre de cet article nous nous contenterons de renvoyer pour son étude à des ouvrages plus complets sur la justice comme les Quæstiones de justitia du P. Vermeersch, ainsi qu’aux traités de Droit naturel ou à ceux d’Économie sociale, dont un des meilleurs reste celui du P. Antoine, Cours d’économie sociale, 6e éd., 1921, ou encore aux Semaines sociales dont plusieurs leçons ont examiné cette matière.

Un bon résumé des conclusions auxquelles sont arrivés théologiens sociaux et économistes catholiques a été présenté dans le Code social de Malines dont nous venons de parler. Nous citons ces trois articles qui manifestent bien doctrines et tendances en cette matière : « 123. Autant que le bien commun le permet, la justice distributive demande que l’impôt soit non pas proportionnel aux revenus, ni progressif suivant une raison constante, mais établi suivant une progression qui se ralentit pour se rapproche au sommet de l’impôt proportionnel. Nous appelons cet impôt « progressionnel ». — 124. Dans un ordre idéal, il faudrait préférer l’impôt unique et « progressionnel » sur le revenu. En fait une partie des ressources fiscales doit être demandée aux impôts indirects : ils se font accepter plus aisément et se prêtent à des exigences moins oppressives. — 125. L’impôt direct a pourtant l’avantage de solliciter des citoyens un sacrifice conscient, qui les intéresse à la chose publique. »

Suivent quelques règles sur le choix des impôts, qu’on trouvera sous le n. 126, p. 117 de la 1re édition.

1° Impôt religieux : Wernz-Vidal, Jus canon., t. iv, vol. II, p. 315 sq., n. 830-836 ; M. a Coronata, Inst. sur. can., t. I, n. 1041 ; Cocchi. sont. in Codicem, t. VI, n. 176, et Suarez, De virt. et stat. relig., tr. II, t. I, C. v. 2° Impôt civil : auteurs anciens : surtout Molina, Lessius, et Lugo dans leurs traités De justiera et jure, ainsi que Laymann et Sporer dans leurs Theologiæ morales ; parmi les moralistes contemporains : Prümmer, Manuale theol. mor., 4° éd., 1928, t. 1 ; Vermeersch, Quæst. de Justiera, 1901 ; Bouquillon, Theol. mor. fundam., 3° éd., 1903 ; Noldin, De præceptis, 7° éd., 1908 ; Tanquerey, Synopsis theol. mor., De virtute justiciæ, 4º éd., 1910 ; Merkelbach, Summa théol. mor., 2° éd., t. ii, 1935 ; Vittrant, Théologie morale, 1941.

R. BROUILLARD.


TRICALET Pierre-Joseph, ecclésiastique français (1696-1761). — Né à Dole en Franche-Comté, le 30 mars 1696, il fit ses premières études à Besançon et sa philosophie chez les cordeliers de Nozeroy ; pendant trois années, il s’abandonna à la dissipation, mais bientôt il se convertit et entra au séminaire de Besançon, où il fit de sérieuses études de théologie : bachelier le 19 août 1717, il fut docteur le 29 juillet 1719. Ordonné prêtre en 1720, il fut nommé curé de Lisle-sur-Doubs, mais presqu’aussitôt il vint à Paris, où il se retira dans la communauté de Saint-Nicolas du Chardonnet, dont il devint le supérieur de 1726 à 1744 ; en avril 1734, il fut élu supérieur des filles de Sainte-Geneviève, connues sous le nom de miramiones ; en 1737, le cardinal de Vintimille le choisit comme un de ses vicaires généraux. En 1746, ses nombreuses infirmités l’obligèrent à se retirer à la maison de retraite du séminaire Saint-Nicolas. Il mourut le 31 octobre 1761.

Les écrits de Tricalet se rapportent presque tous à la piété. Il faut citer, par ordre de date, l’Abrégé du Traité de l’amour de Dieu de saint François de Sales, in-12, Paris, 1756, réédité plusieurs fois, en particulier à Liége en 1802. Les Mémoires de Trévoux, novembre 1756, p. 2866-2869, souhaitent que l’auteur fasse le même travail pour les Pères de l’Église. En fait, Tricalet commença dès lors la Bibliothèque portative des Pères de l’Église, qui renferme l’histoire abrégée de leur vie, l’analyse de leurs principaux écrits, les endroits les plus remarquables de leur doctrine sur le dogme, la morale et la discipline, avec leurs plus belles sentences, 9 vol. in-8°, Paris, 1758-1763. C’est un recueil fait d’après les livres qu’il lisait ou dont on lui faisait la lecture ; le fond est emprunté aux bibliographes les plus célèbres, comme Fleury, Dupin, Ceillier, Tillemont. Le t. ier comprend saint Ignace, saint Justin, saint Irénée, saint Clément d’Alexandrie, Tertullien, Origène, saint Cyprien, Eusèbe, saint Athanase et saint Hilaire de Poitiers. Mém. de Trévoux de janvier 1759, p. 326-341. Le t. ii comprend saint Basile, saint Cyrille de Jérusalem, saint Grégoire de Nazianze, saint Éphrem et saint Grégoire de Nysse. Mém. de Trévoux d’août 1759, p. 1982-1994. Le t. iii comprend saint Ambroise, saint Épiphane, saint Jérôme et saint Paulin. Mém. de Trév. de mars 1760, p. 660-666. Le t. iv comprend saint Jean Chrysostome et saint Cyrille d’Alexandrie. Mém. de Trév. de décembre 1760, p. 2907-2921. Le t. v comprend saint Augustin et saint Prosper. Mém. de Trév. d’avril 1761, p. 1051-1061. Le t. vi comprend Théodoret, saint Léon pape, saint Césaire d’Arles et saint Grégoire pape. Le t. vii comprend saint Jean Damascène saint Anselme et saint Bernard. Mém. de Trév. de février 1762, p. 52$1-$228. Le t. viii comprend les sentences des Pères de l’Église, qui n’ont pas pu entrer dans les sept premiers volumes et le t. ix contient, avec l’abrégé de la vie de l’auteur, le texte latin des sentences des Pères contenues dans les sept premiers volumes, avec une table générale. Mém. de Trév. de juillet 1762,