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TRIBUNAUX ECCLÉSIASTIQUES


doyens ou archiprêtres ruraux ; elles constituaient autant de tribunaux inférieurs, de la sentence desquels on pouvait faire appel à l'évêque.

Celui-ci, en dehors des exemptions qui allèrent se multipliant, continuait à juger par lui-même les affaires les plus graves, soit entouré du chapitre de ses clercs, soit en synode. Mais, jusqu’au xie siècle, la cour de justice épiscopale n’eut qu’une organisation intermittente et variable suivant les affaires et les circonstances ; aucun texte législatif ne venait déterminer le nombre et la qualité des assesseurs. C’est à cette époque (d’autres disent vers la fin du xiie siècle) qu’il faut placer l'évolution notable qui se produisit dans la curie épiscipale, par suite de la complexité accrue de la tâche administrative et de la multiplication des causes déférées aux tribunaux d'Église. D’une part en effet, la difficulté de convoquer fréquemment le synode et la nécessité d’expédier rapidement des affaires plus nombreuses engagèrent l'évêque à restreindre son personnel judiciaire et à le spécialiser. D’autre part, le renouveau du droit romain qui se manifestait allait nécessiter la présence, dans la curie, d’un juriste et d’un technicien. L'évêque, se réservant seulement l’examen des causes majeures, délégua ses pouvoirs, selon l’esprit du droit romain, à un personnage unique ; celui-ci jugeait à la place de l'évêque ou du moins dirigeait les autres clercs chargés de l’administration de la justice. La fonction était née. Le titulaire a pu porter des noms variés : on l’appela officialis curiæ, parfois vicarius, plus généralement ojjîcialis, et c’est ce nom qui a prévalu. Au xiie siècle, son rôle dut prendre de l’importance, tant en raison du nombre croissant des causes portées devant la juridiction épiscopale, qu’en raison des absences plus fréquentes de beaucoup d'évêques (croisades, pèlerinages, conciles). Au xiii c siècle, l’existence de l’official est chose acquise et reconnue comme une institution, ainsi qu’en témoigne la bulle Romana Ecclesia d’Innocent IV, 21 avril 1246, dont quelques passages ont pris place dans les Décrétales. Cꝟ. t. I, tit. xiii, c. 1, in sexto ; t. II, tit. xv, c. 3, ibid. C’est en France que l’institution a connu son plein développement ; de là elle passa en Angleterre et en Allemagne. L’Italie ne l’a connue que très tardivement.

Au sujet de la controverse historique sur les origines de l’official (et aussi du vicaire général), voir Ed. Fournier, Les origines du vicaire général, Paris, 1922 ; et surtout L’origine de la curie diocésaine, par le même, Paris, 1940 ; cf. les réserves faites par M. Mollat dans Revue d’histoire eccl, avril 1923, p. 223-226, et A. Amanieu, article Archidiacre, dans Dictionn. de droit can., t. i, col. 987 sq., Paris, 1933. Sont assimilés aux tribunaux diocésains les tribunaux des vicariats et préfectures apostoliques.

2° Quant aux religieux exempts qui jouissent de la juridiction ecclésiastique, leur tribunal de première instance est, à moins de disposition contraire des constitutions, le tribunal du provincial s’il s’agit d’une religion cléricale ; pour un monastère sui juris, c’est l’abbé de ce monastère.

Sauf stipulation contraire des constitutions, c’est au supérieur général qu’il appartient de trancher, par lui-même ou par son délégué, les différends survenus entre deux provinces ; entre deux monastères, l’affaire ressortit au supérieur général de la congrégation monastique.

Lorsqu’un conflit surgit entre personnes religieuses (soit physiques, soit morales) appartenant à des instituts différents, ou encore entre religieux faisant partie d’un même institut laïque ou non exempt, ou enfin entre un religieux d’une part et un clerc séculier ou un laïc d’autre part, le juge de première instance est l’Ordinaire du lieu, can. 1579.

3° Pour juger les procès en nullité de mariage, Pie XI a créé en Italie des tribunaux régionaux, devant lesquels devront être portés en première instance les causes provenant de tous les diocèses de la province ou circonscription conciliaire. Le pontife, auteur de l’Encyclique Casti connubii et inspirateur de l’Instruction si précise de la S. Congrégation des Sacrements, 15 août 1936, concernant la conduite de ces sortes de procès, a voulu par là sauvegarder plus efficacement encore si possible la sainteté et l’inviolabilité du lien conjugal, en confiant les causes où il est en jeu à un personnel judiciaire spécialisé. Cf. Motu proprio « Qua cura », 8 décembre 1938, dans Acta apost. Sedis, t. xxx, p. 410.

4° Sur la composition des tribunaux ordinaires de première instance, voir Procès ecclésiastiques, t. xiii, col. 629-630.

III. DU TRIBUNAL ORDINAIRE DE DEUXIÈME INSTANCE.

1° C’est normalement celui du métropolitain, pour les causes débattues en première instance devant les évêques suffragants, ou devant les archevêques qui n’ont pas de suffragants, ou enfin devant les évêques directement soumis au Saint-Siège, mais qui ont choisi une fois pour toutes un métropolitain, en vue de l’assistance au concile provincial.

Bien que le Code ait ainsi prévu l’organisation des tribunaux d’appel pour la plupart des cas, des exceptions subsistent, auxquelles il est pourvu par des arrangements spéciaux pris en accord avec le SaintSiège. Ainsi les évêques de Metz et de Strasbourg, qui n’ont pas de métropolitain, se fournissent mutuellement leur tribunal d’appel. En Italie, où abondent les diocèses de peu d'étendue, outre les disposition ? particulières prises pour les appels contentieux, il a été prévu des tribunaux d’appel spéciaux pour juger en seconde instance les causes matrimoniales portées en première instance devant les tribunaux régionaux. Ainsi, Gênes en appelle à Turin ; Milan à Gênes ; Turin et Venise à Milan, etc. Cf. Acta apost. Sedis, t. xxx, 1938, p. 412.

2° Les métropolitains qui ont des suffragants, choisissent, avec l’approbation du Saint-Siège, le tribunal d’un de ces suffragants pour y porter en appel leurs causes contentieuses. Ainsi, Paris en appelle à Versailles, Lyon à Autun, etc.

3° Pour les religieux, les affaires traitées en première instance devant le provincial ou l’abbé du monastère, sont portées en seconde instance devant le supérieur général de l’institut exempt ou de la congrégation monastique. Quand, en vertu des constitutions ou dans un cas exceptionnel, le supérieur général a jugé en première instance, l’appel ne peut être porté que devant la Rote, selon les prescriptions du canon 1599.

4° La composition des tribunaux ordinaires d’appel est la même que celle des tribunaux de première instance, et les mêmes règles substantielles doivent être suivies dans la conduite du procès. En particulier, si le premier tribunal a procédé collegialiter, le tribunal d’appel devra procéder de même et avec un nombre de juges au moins égal. Can. 1596.

IV. Tribunaux du Saint-Siège.

On distingue les tribunaux ordinaires : Rote romaine et Signature apostolique, et les tribunaux extraordinaires, qui sont : le Saint-Office, voir ce mot, t. xi, col. 951-955 ; la S. Congrégation des Rites, voir t. xiii, col. 639 sq. et 2738 : enfin le tribunal suprême du Concile général, voir Conciles, t. iii, col. 640 sq.

Tous ces tribunaux jugent au for externe. Pour le for interne, il n’y a qu’un seul tribunal à la cour romaine, c’est la Sacrée Pénitencerie, voir t.xii, col. 1138-1160.

Nous ne parlerons ici que des tribunaux ordinaires