Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.1.djvu/764

Cette page n’a pas encore été corrigée
1513
1514
TRÉVOUX (MÉMOIRES DE)


Castilhon, anciens auteurs du Journal encyclopédique, en prirent la direction. En 1776, le format du journal passa du petit in-12 à l’in-12 ordinaire et il parut deux fois par mois, en cahiers de quatre feuilles. A partir de 1778, l’abbé Grosier, ex-jésuite, le continua sous le titre de Journal de Littérature, Sciences et Arts. Il cessa de paraître vers 1782. La collection totale des Mémoires, avec ces continuations, se compose d’environ 300 volumes.

Contrefaçons et traductions.

De 1701 à 1705, un

protestant hollandais, Jean-Louis de Lorme, publia à Amsterdam une « seconde édition augmentée de diverses remarques et de plusieurs articles nouveaux » des Mémoires de Trévoux. Le titre était le même que celui de la publication originale. De Lorme reproduisait mot à mot les articles des Mémoires, mais il ajouta, au bas des pages ou à la fin des volumes, des répliques protestantes pour les articles traitant des sujets religieux. « Tout compte fait pour tous les volumes, un article sur huit fut critiqué, en ce sens qu’il avait une réponse imprimée. » Dumas, p. 51.

De 1754 à 1758 parut, également à Amsterdam, une compilation intitulée : Journal des Sçavans combiné avec les Mémoires de Trévoux, suite des CLXX volumes du Journal des Sçavans. Une compilation analogue avait déjà été tentée par des libraires hollandais dès 1713.

Il y eut également deux essais de traduction en Italie. En 1743, Nicolas Gavelli, libraire et imprimeur à Pesaro, lança une traduction des Mémoires au fur et à mesure de leur publication ; elle se continuait encore en 1752. Un imprimeur de Venise, Antonio Groppo, commença à son tour, en 1748, une traduction, mais en y introduisant de nombreux changements qui nuisirent à son œuvre. Quel qu’ait été le succès de ces essais de contrefaçon et de traduction, ils témoignent de l’estime dont jouissaient les Mémoires de Trévoux jusqu’au-delà des frontières.

II. Intérêt théoloqique des mémoires.

Si l’histoire extérieure du célèbre journal a fait l’objet de recherches, d’ailleurs insuffisantes, son action théologique n’a pas encore été étudiée. Le P. Dumas nous promet un travail sur ce sujet (p. 5) ; pourra-t-il réaliser son projet ? En tout cas, une étude approfondie des Mémoires de Trévoux serait du plus haut intérêt pour l’histoire de la pensée religieuse en France au xviiie siècle. Outre leur valeur purement bibliographique pour qui veut connaître la littérature religieuse de l'époque, les compte rendus et les dissertations originales constituent une documentation unique sur l’attitude des jésuites français en face du protestantisme, du jansénisme, du mouvement philosophique, des diverses tendances de la spiritualité. Il faudrait suivre, dans le journal lui-même et dans d’autres pu blications, les réactions, discussions et controverses provoquées par les jugements des Mémoires : étude beaucoup trop complexe pour que nous puissions songer à l’entreprendre ici. Nous nous bornerons à quelques indications.

Les Mémoires de Trévoux ne sont nullement une publication religieuse ou théologique. Il suffit de parcourir les trois volumes de la Table méthodique publiée par le P. Sommervogel, pour se rendre compte de l’extrême variété des sujet* traités : théologie et philosophie, jurisprudence, sciences et arts, belli -s-leltres, histoire, etc. Dans cet ensemble, les sciences religieuses tiennent évidemment une bonne place, soit dans les dissertations originales, suit dans les comptes rendus. La Table permet de se faire une idée assez exacte de la proportion. La 1™ partie (dissertations, pièces originales ou rares, mémoires) compte en tout 1722 titres ; sur ce nombre, 239 se rapportent aux divers domaines des sciences religieuses et 43 à la philoso phie. La 2e partie dresse « le catalogue méthodique des ouvrages dont on a fait soit l’annonce, soit l’analyse ». Elle est de beaucoup la plus importante. Le but principal du journal était en effet de rendre compte des nouveautés : « Les dissertations, les mémoires, malgré leur importance, auraient pu passer pour un accessoire, pour une gracieuseté des journalistes envers leurs lecteurs » (Préface). Cette table constitue en quelque sorte une bibliographie française du xviii c siècle. Pour les ouvrages étrangers, Sommervogel omet ceux qui n’ont pas fait l’objet d’un compte rendu. Sur un ensemble de 9 497 ouvrages annoncés ou analysés, 1647 se rapportent à la théologie, 373 à l’histoire ecclésiastique (y compris l’hagiographie et la biographie), 413 à la philosophie.

Parmi les dissertations, beaucoup sont anonymes. De celles qui sont signées ou dont on connaît l’auteur, un tiers environ provient des rédacteurs ou collaborateurs jésuites. Les comptes rendus sont, en règle générale, anonymes. Avant 1712 et, beaucoup plus rarement après 1720, ils provenaient parfois des auteurs eux-mêmes. La plupart doivent être l'œuvre des collaborateurs jésuites. L’anonymat avait l’inconvénient de faire retomber la responsabilité des critiques et les désagréments des controverses soulevées par elles sur la direction du journal et même sur les jésuites en général. Les auteurs jésuites d’un certain nombre de comptes rendus et de dissertations anonymes ont pu être identifiés grâce aux notes marginales ajoutées par leurs confrères dans un exemplaire des Mémoires : voir la liste dans Dumas, p. 192-198.

III. Principaux collaborateurs de la compagnie de Jésus.

Nous les mentionnons par ordre alphabétique, en renvoyant, quand il y a lieu, aux articles que ce Dictionnaire leur consacre ailleurs. Dans V Essai de Sommervogel et la thèse de G. Dumas, on trouvera sur la plupart d’entre eux des indications complémentaires. Pour le détail de leurs articles, on pourra se reporter à la Bibliothèque de la Compagnie de Jésus de Sommervogel.

Berthif.r Guillaume-François, voir ici t. ii, col. 794795 et ci-dessus. Il fut le dernier directeur jésuite du journal (1715-1762). « Tous les volumes de 1745 à mai 1762 pourraient être regardés comme son ouvrage, parce que, outre qu’il avait la surveillance sur la rédaction, il n’y a pas un volume qui ne contienne plusieurs articles de sa main. » Sommervogel, Bibl. de la Comp. de Jésus, t. i, col. 1378. On n’en peut cependant identifier de façon certaine qu’un assez petit nombre ; mentionnons ses Observations sur les systèmes des PP. Hardouin et Berruyer (1761), dans lesquelles il combat certaines opinions excessives de ses deux savants confrères. — Brumoy Pierre, voir t. ii, col. 1147. Mathématicien, littérateur, historien, « un des plus beaux esprits de la Société et un des plus agréables écrivains » (Table du Journal des Savants, t. x, p. 671), il collabora activement aux Mémoires de 1722 à 1739. — Buffikr Claude, voir t. ii, col. 1167-1173. Il fut associé aux Mémoires depuis leurs débuts jusqu'à sa mort en 1739. Parmi ses articles connus, mentionnons : Addition au Traité sur les preuves les plus sensibles de la Religion (ouvrage publié par lui en 1732), juin 1732 ; les autres traitent de la musique, de la grammaire, etc. Il serait également l’auteur d’une critique assez mordante des œuvres de Boileau (septembre 1703), dont le mécontentement s’exhala dans plusieurs éplgnunmn contre les journalistes de Trévoux. Voir G. Dumas, p, 57-68. — Castf.L Louis-Bertrand. Né à Montpellier en 1688, il entra dans la Compagnie de Jésus en 1703. D vint de Toulouse à Parti v< rs 1720 et y mourut en 1757. Il s’adonna surtout a l'étude dl I mathématiques, de la physique et de la philosophie. D’une érudition prodigieuse, esprit original mais fan-