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TRENTE. LE CONCILE DE PIE IV, XXIV* SESSION


plaider l’invraisemblance qu’une telle inconvenance émanât vraiment du souverain. Voir les détails dans Susta, t. iv, p. 268-272. Mais Catherine de Médicis et Charles IX approuvèrent les agissements de du Ferrier. Cf. Constant, op. cit., p. 275.

2. Vers l’apaisement.

Pie IV, averti, prit le seul parti raisonnable : garder le silence, attendre ce que feraient les Français, continuer le concile, avec ou sans eux, de toute façon terminer le plus vite possible les débats en assurant aux décisions une majorité respectable. Le voyage à Rome du cardinal de Lorraine, décidé depuis longtemps en accord avec Pie IV, avait été retardé en vue de la xxive session. Cette session ayant dû elle-même être reportée, le cardinal, ainsi qu’on l’a dit, s'était mis en route vers le 19 septembre. Il n’arriva à Rome que le 29. Pie IV fut pour lui plein de prévenances ; ils entrèrent aussitôt en conférence sur les questions se rattachant au concile. Dans les trois semaines que Lorraine passa à Rome, l’accord fut à peu près réglé sur les quatorze demandes qu’il présenta au pape, en ce qui concernait la réforme surtout. Voir ces demandes et les réponses dans Constant, op. cit., appendice lix, p. 353-356. Pour terminer le concile au plus tôt et supprimer les difficultés, Pie IV se réservait celles que le concile ne parvenait pas à trancher, par exemple, les mariages clandestins. Il abandonnait aux Ordinaires les procès en première instance de moindre importance, la collation des bénéfices à charge d'âmes dans les six mois qui lui étaient réservés, les dispenses de mariage m foro conscientise ; il s’en remettait au concile pour les privilèges des chapitres, sous sauvegarde du droit commun ; il renonçait aux réserves, expectatives, mandats, etc., et promettait de faire des cardinaux une réforme édifiante et à la satisfaction générale. La concession neuvième statuait que le concile confirmerait, après sa dernière session, tous les décrets arrêtés depuis ses premiers travaux : le cardinal avait expressément demandé que cela se fît plus tard, hors session, et le pape accédait à sa demande, à condition que cette répétition parût annoncer la confirmation pontificale. Le cardinal voulait par là faire ratifier les décrets portés sous Jules III, que les Français (qui ne reconnaissaient pas la deuxième partie du concile) refusaient d’admettre. Il se montra généreux en faisant certifier aux évêques italiens et espagnols qu'énuméraient les art. 10 à 13 (ceux qui le soutenaient dans l’assemblée) qu’il avait rendu d’eux bon témoignage au pape, et le pape lui-même les félicitait et les engageait à venir à Rome après le concile ; d’autres prélats, au contraire, recevaient un avertissement de ne plus faire traîner en longueur le concile, comme ils en avaient pris l’habitude.

Le cardinal quitta Rome le 19 octobre, fit un crochet par Venise, d’où il espérait ramener à Trente l’ambassade française qui s’y était retirée. Cet espoir fut vain, comme le fut également celui de fléchir le gouvernement de Charles IX. Lorraine fut plus heureux près de la Seigneurie de Venise qu’il décida à accepter la conclusion du concile. Mais ces voyages et ces négociations prirent quelque temps et le cardinal français n'était de retour à Trente que le 5 novembre. Et la session xxive devait se tenir le 11 1

Un autre apaisement était venu du côté de l’empereur. Morone avait pu mener à bien la délicate négociation de la confirmation du fils de Ferdinand, l’archiduc Maximilien, jugé trop favorable aux hérétiques, dans sa qualité de roi des Romains. Du côté de l’Empire, on était donc assuré désormais d’une réelle bienveillance. Cette bienveillance se manifesta nettement, quand, au comte de Luna, qui sollicitait le concours de l’empereur pour appuyer une nouvelle campagne contre le proponentibus legatis, une longue lettre, datée du 12, signifia le refus de l’empereur et l’engagea à se

désister d’inutiles chicanes. Cf. Constant, op. cit., pièce 101, p. 304-307. Ferdinand énumérait en détail les raisons qui rendaient indispensables la fin du concile ; il ne cachait pas que son neveu, le roi Catholique, s'était fourvoyé dans les affaires présentes pour n’avoir pas été bien au courant des accords d’Inspruck. L’intervention de l’empereur ne modifia en rien l’attitude espagnole : de ténacité, elle devenait obstruction et entêtement. Le comte ne parlait de rien de moins que de faire suspendre le concile en écrivant à son souverain. Mais le pape ne s’arrêta pas à ces menaces : le 15 octobre, il faisait écrire à ses légats de tenir la session au jour fixé et d’en préparer dans le plus bref délai une autre, qui serait la conclusion du concile. Les évêques devraient ensuite rejoindre immédiatement leur diocèse et y résider.

Des discussions assez vives devaient encore cependant se produire sur les 21 chapitres de réforme depuis longtemps à l'étude. À la commission d’examen, deux articles surtout furent attaqués par les Espagnols : le c. v concernant les privilèges capitulaires que Philippe II voulait abroger complètement ; le c. xx sur les jugements en première instance que les légats ne voulaient laisser aux évêques que si l’objet n’en dépassait pas la valeur de vingt-quatre ducats d’or de la Chambre apostolique. Il fut également question des difficultés éprouvées par certains suffragants à faire leur visite canonique annuelle au métropolitain. Morone parvint cependant à mettre à peu près d’accord les commissaires.

Mais à la séance générale du 4 novembre, les Espagnols recommencèrent leur système d’obstruction. Une grande discussion s'éleva sur la manière de conduire les enquêtes requises pour les promotions aux bénéfices et sur les abus qui s’y glissaient jusque dans la curie romaine. Sur d’autres points les critiques s’ajoutaient aux critiques ; on dut attendre le retour de Lorraine pour mettre un peu d’ordre et de calme au milieu de ces orages. Le cardinal ne prit la parole que le 9 novembre. Il affirma que le pape saurait imposer la réforme au monde de la Curie et qu’il fallait travailler à assurer le succès de la réforme dans les trois grandes nations catholiques : l’Italie, la France et l’Espagne. Il demandait, avec les Espagnols, la suppression des privilèges capitulaires et le maintien de ceux des universités. Avec les Italiens, il réclamait que les causes majeures des évêques fussent portées devant les conciles provinciaux, avec faculté d’appel au pape, saluis juribus regnorum. Le devoir de la résidence serait assuré dans la visite annuelle des diocèses ; les conciles provinciaux régleraient l’une avec l’autre, et en confieraient le contrôle par délégation au métropolitain. Celui-ci pourrait lui-même suppléer à cette visite en cas de négligence de ses suffragants sans manquer toutefois de donner le bon exemple de la résidence. Ce discours n’eut pas l’approbation unanime. L’orateur avait fait ses réserves sur l’expression salva auctoritate sanctse Sedis, que les Italiens requéraient en tête du décret ; c'était suffisant pour rendre moins vives leurs sympathies. Néanmoins les légats précipitèrent les discussions, pour assurer la tenue de la session au jour fixé de la Saint-Martin, Il novembre.

3. La congrégation préparatoire (10 novembre). — Elle eut une importance exceptionnelle. De grand matin la commission présidée par les légats acheva la mise au point des chapitres à présenter au placet des Pères. On élimina tout d’abord trois points qui faisaient difficulté : d’abord, la réserve saloa auctoritate sanctæ Sedis qu’on estima faire double emploi avec la formule insérée aux articles de réforme de la vii 8 session : salva semper in omnibus Sedis apostoliese auctoritate ; ensuite, au c. v, on sacrifia l’adjonction, non obstantibus quibuscumque consuetudinibus, ce qui réser-