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TRENTE. LE CONCILE DE PIE IV, XXIII* SESSION


Navagero le soin de recevoir le cardinal de Lorraine qui tardait à revenir à Trente.

A Inspruck (21 avril-12 mai) Morone fit assez bonne besogne dans ses conférences avec Ferdinand et avec les conseillers et théologiens impériaux. Cf. Pli. Hellc, Die Konferenzen Morones mit Kaiser Ferdinand 1. (mai 1563) und ihre Einwirkung auf den Gang des Trienter Konzils, Bonn, 1911. Après dix jours, le légat obtint une satisfaction appréciable : l’empereur se bornait à désirer une réforme générale, entreprise en commun, dirigée par le pape autant que possible et selon les ordonnances des anciens conciles (ce qui laissait la latitude de faire concorder les derniers : Constance et Bâle aussi bien que Florence et le Ve du Latran). Le concile, pour aller plus vite, ne toucherait à aucune des vérités et doctrines que les hérétiques avaient laissées intactes ; les ambassadeurs auraient, comme les Pères, la liberté de présenter leurs opinions, en se tenant dans les limites de l’ordre du jour ; le pape garantissait ainsi l’indépendance du concile pour toute délibération et décision, et le concile joindrait aux réformes déjà, réalisées des règlements sur le choix des évêques, les privilèges des chapitres, la mise en pratique du devoir de la résidence. On s’efforcerait aussi de tomber d’accord sur le choix d’un secrétaire non italien. L’empereur, de plus, renonçait à ses réserves sur la formule proponentibus legalis et laissait à l’assemblée toute liberté de voter et décider à la majorité. Cf. Richard, p. 864-865. Morone était rentré à Trente le 17 mai, bien résolu à tirer de ces concessions tout le profit possible.

Pendant ce temps, Pie IV traitait avec Philippe II, afin de mettre en échec toute tentative de coalition franco-impériale. Le porte-parole du roi catholique n'était plus Vergas (encore présent à Rome cependant), mais le grand commandeur Louis d’Avila, arrivé à Rome le 14 mars. Mais, dès les premiers pourparlers, il fut évident que Louis d’Avila voulait remettre tout en question jusques et y compris le proponentibus legatis. Cf. Pallavicino, t. XX, c. x, n. 5 sq., col. 215 sq. Le 24 mars. Pie IV remit toutes choses au point : il est trop tard, dit-il en substance, pour rentrer dans le dédale des vieilles difficultés, il faut en finir avec les exigences compliquées, divergentes et même contraires, que les souverains catholiques ont apportées au concile. Une seule solution est pratique : l’arbitrage et la décision dernière du souverain pontife ; primat de toutes les Églises, dirigeant les débats de l’assemblée avec le concours des légats. Pie IV ajoutait qu’il avait commencé la réforme par lui-même, imposé la résidence à ses cardinaux, qu’il voulait continuer avec les évêques de la curie, autant que faire se pourrait. Il espérait étendre ce devoir à l'Église universelle, si le concile et les évêques s’y prêtaient et si les princes n’y mettaient pas obstacle. Il consentait à abandonner le proponentibus legatis, pourvu que ce ne fût pas au préjudice des privilèges de la monarchie espagnole, et aussi de ses prérogatives de chef de l'Église. C'était net ; il n’y avait guère moyen de contester l’excellente position prise par le pape. Le 6 mai Louis d’Avila et Vergas, qui avait été admis aux pourparlers, signèrent, au nom de leur maître, un engagement par lequel le roi catholique promettait au pape son appui et garantissait dans leur intégrité les privilèges du Saint-Siège, y compris le maintien de la formule proponentibus legatis. De son côté, le pape garantissait à l’ambassadeur espagnol au concile, comte de Luna, un siège à part, élevé, à côté du bureau. Ainsi l'épineuse question de préséance se résolvait, sans offenser les Français qui, le 20 mai, occupèrent leur place habituelle tandis que Luna siégea près du secrétaire en face des légats.

A Trente les absents ne rentraient que lentement. Le cardinal de Lorraine n’arriva que le 20 avril. Dès

le 22 les Pères s'étaient réunis pour fixer la date de la prochaine session. D’accord avec Morone absent, les légats avaient retenu la date du 3 juin ; le cardinal français proposa de renvoyer au 20 mai la fixation de la date. La proposition des légats fut repoussée par 83 voix contre 78 et 7 abstentions. Navagero arriva quelques jours plus tard (le 28), et les légats distribuaient le lendemain aux Pères et aux ambassadeurs dix-sept articles sur les abus du sacrement de l’ordre, élaborés depuis le 13 mars. On aurait pu croire que les succès diplomatiques de Pie IV et de Morone allaient éclaircir l’ambiance des discussions : il n’en fut rien. Il fallut tout d’abord déblayer trois obstacles : l’irritante question de préséance entre ambassadeurs français et espagnols, réglée saus doute en principe par Pie IV, comme on l’a vu plus haut, mais qui donna lieu à des indiscrétions regrettables touchant l’acte pontifical (Massarelli était devenu presque impotent et était secondé par Paleotto) et à de nouveaux incidents ; la concession du calice, que le duc de Bavière réclama derechef et avec insistance et dont on parvint à renvoyer la solution à un accord ultérieur du pape et de l’empereur ; enfin le transfert du concile, agité par Catherine d, Médicis loin de Trente et dont, heureusement, les échos seuls vinrent quelque peu troubler l’assemblée. Sur tous ces points, voir les détails dans Constant, La légation du cardinal Morone près l’empereur et le concile de Trente, Paris, 1922. À une communication de la même Catherine, faite au concile par René de Birague, pour justifier la paix d’Amboise, le concile répondit simplement par ses regrets pour les malheurs de la France, ses vœux pour la soumission des rebelles à leur roi et, de la part de la reine-mère, son souhait d’un zèle plus ardent pour la vraie foi.

Morone fit avertir les orateurs, au nom du pape, que la formule proponentibus legatis ne limitait en rien la liberté et l’indépendance du concile. Cette déclaration fut le point de départ de nouvelles digressions sur les points les plus divers. On évoqua l’abus des évêques titulaires, simples administrateurs ; les Espagnols revinrent à leur éternelle controverse sur le droit divin des évêques. Morone parvint néanmoins à trouver, pour les canons de l’ordre, certaines formules qui permettaient d’espérer qu’elles ne déplairaient pas aux Espagnols et que les Français s’en contenteraient (16-17 juin). La discussion sur les abus était terminée le 16 juin. On expédia à Rome les projets pour les soumettre au pape. La correspondance avec Rome redevint plus active que jamais et les manœuvres du cardinal de Lorraine s’y exercèrent par divers intermédiaires.

7° Autour de la xxme session. — 1. Les préparatifs immédiats. — Les légats prirent le meilleur parti possible : choisir, dans les matériaux amassés depuis tant de mois, les moins embarrassants. On écarta le chapitre sur les élections épiscopales, sur la suppression des évêques titulaires. La doctrine sur l’ordre fut ramenée à quatre chapitres, le c. v sur les rapports de la papauté et de l'épiscopat étant mis de côté. Les huit canons furent distribués le 3 juillet, puis, le 5, un chapitre sur le devoir de la résidence, sans toucher au principe, et quinze sur la réforme (ii-xvi). Le c. xvii prescrivait la fondation des séminaires. Enfin, un appendice sur les ordres inférieurs à la prêtrise et leur exercice. L’article concernant les séminaires était un de ceux qui ne rencontraient pas d’obstacle. La mesure était désirée unanimement. Comme son application dépendait beaucoup des circonstances, il suffisait d’une exhortation générale, en quelque sorte impérative, atteignant d’abord les Ordinaires plus riches, dont les diocèses avaient besoin de plus de prêtres. Ils entraîneraient les autres par l’exemple. Le concile s'était occupé de la question longuement et