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TRADITION. ENSEIGNEMENT DE L’ÉCRITURE


cf. Col., ii, 8. Justin reproche aux mystères de Mithra de procéder de traditions démoniaques, imitant les mystères chrétiens. Apol., i, 66, P. G., t. vi, col. 428. Hippolyte parle des hérésiarques qui ont transmis (roxpaSiSôvTeç) les enseignements des magiciens. Philosopha t. IV, c. xlii, n. 1, P. G., t. xvi c, col. 3104 C. Lucifer de Cagliari parle de la « tradition arienne ». De non conoeniendo cum hæreticis, c. v, P. L., t. xiii, col. 774 D. On trouvera quelques développements de ces considérations générales dans A. Deneffe, S. J., Der Traditionsbegriff, Munster-en-W., 1931, p. 3-17, et surtout dans J. Ranft, Der Ursprung des katholischen Tradilionsprinzips, Wurzbourg, 1931, p. 79112.

La tradition que nous avons à étudier ici est la tradition doctrinale : enseignement oralement transmis des vérités chrétiennes. On exposera successivement : I. L’enseignement de la Sainte Écriture. II. L’enseignement des Pères, col. 1256. III. L’enseignement des papes et des conciles, spécialement du concile de Trente, col. 1300. IV. L’enseignement des théologiens postérieurs au concile de Trente, col. 1320. V. Synthèse, col. 1347.

I. L’enseignement de la Sainte Écriture. — I. LE Mot.

Ancien Testament.

Chez les Septante,

on ne trouve pas les mots TcapâSoaiç ou irapa8186vai dans le sens précis de transmission d’un dogme de la foi. C’est toujours le sens de « livrer aux ennemis », Jer., xxxii (Vulg.), 4 ; xxxiv, 2 ; Jud., xi, 30 ; ou livrer au châtiment », II Esdr., vii, 26. Une fois cependant, dans Esther, xvi, 7, tradere a le sens de transmettre un document historique et, dans le livre non canonique d’Esdras, celui de donner (Septante, I Esdr., ix, 39 ; Vulg., III Esdr., ix, 39). Voir le texte parallèle dans II Esdr., viii, 1.

La Vulgate de l’Ancien Testament emploie à deux reprises le mot tradere pour marquer la manifestation d’une révélation divine. Ex., xvii, 14 ; Bar., iii, 37. Tradere signifie aussi confier, remettre en dépôt. Deut., v, 22 ; xxxi, 9 ; II Par., xxxiv, 15, 18 ; Eccli., prol. LXX, excepté le dernier texte, 8186vou). L’ancienne Vulgate traduisait 8l86voci par dare dans Bar., ni, 27 ; Ex., xvii, 14 ; Deut., v, 22 ; xxxi, 9.

Nouveau Testament.

Dans le Nouveau Testament,

les mots TOxpàSooiç, 7tapa8186vai, en relation avec les enseignements de la révélation, sont employés par saint Luc, saint Paul, saint Pierre et saint Jude. Luc.i, 2 ; Act., vi, 14 ; xvi, 4 ; I Thess., ii, 8 ; IIThess., n, 15 ; iii, 6 ; I Cor., xi, 2 ; Gal., i, 14. Dans tous ces textes, excepté I Cor., xi, 2, où TrapaSôaeiç est traduit par præcepta, l’équivalent latin de Trapa8186vai et de 7 : apâ80aiç est tradere, traditio. On transmet ce qu’on a reçu ; cf. I Cor., xi, 23 ; xv, 3 sq. Sur l’emploi du mot « tradition » chez saint Paul, voir A. Merk, S. J., Traditionis momentum apud S. Paulum, dans Verbum Domini, Rome, 1924, p. 332 sq. ; 362 sq. Voir également II Pet., ii, 21 ; Jud., 3.

L’équivalence de r.aca8186vai (transmettre) et de 8’.86voti (donner) apparaît en plusieurs textes du Nouveau Testament. Comparer Matth., xi, 27, avec Joa., x, 29 ; Rom., viii, 32 avec Joa., iii, 16. Cf. Joa., xvii, 8, 14. Mais on trouve d’autres équivalences qui auront plus tard leur répercussion sur le langage des Pères eux-mêmes : celles Jde xYjp’xræiv, SiSdurxeiv et eûaYYsXl^eaOai. Équivalence de x.^pùooeiv et Xéyeiv, Matth., iv, 17 ; XTjp’joætv et eûaf-(’£X^ea0ai, Luc, vm, 1 ; S’.Sâdxeiv et xr, p’JaTet.v. Matth., xi, 2, SiSicrxeiv et Xéyetv, Matth., v, 2. On trouve aussi seuls y.r, p’JT<reiv, Marc, i, 38, 39 ; Apoc, v, 2 ; Matth., x, 27 ; xxviii, 20 ; Luc, ix, 2 ; oucncore81a|xapTÛpEa0ai et XotXeïv, Act., viii, 25, ou encore j.yylXkei.v avec ses composés àvayY^XXeiv, Act., xx, 20 ; I Pet., i, 12 ;  : -inocYYéXXeiv, Act., xxvi, 20 ; x’Liryyé’/Xci-L

il. LA CHOSE. — 1° Considérations générales. — Les auteurs font valoir, en faveur de l’existence de doctrines transmises simplement d’une façon orale, le fait qu’avant la loi écrite de Moïse, la révélation d’un Messie futur et d’autres vérités religieuses se transmettaient de génération en génération par la succession des patriarches. Cf. Conc. Trid., sess. vi, c. ii, Denz.-Bannw., n. 791. De Moïse au Christ, malgré l’existence de livres sacrés, il y eut encore de nombreuses traditions orales transmises par le ministère des prêtres et des prophètes et reçues par tous comme divines. Ces traditions non seulement expliquent des vérités exprimées plus confusément dans l’Écriture, mais encore proposent certaines vérités qu’on chercherait en vain dans l’Écriture : par exemple, l’autorité divine des Livres saints et le canon des Écritures. Toutefois ces indications de l’Ancien Testament ne sauraient constituer une preuve certaine de l’existence de traditions spécifiquement chrétiennes. Un texte de Jer., xxxi, 33, retenu par le concile, pour prouver l’existence des traditions s’attache à décrire un des caractères de la Nouvelle Alliance, dans laquelle les relations de Dieu aux hommes seront plus intimes que dans l’Ancienne : la loi ne sera pas écrite sur des tables de pierre ; elle le sera dans les cœurs. C’est vraisemblablement dans cette opposition des lois écrites et de la loi imprimée dans l’âme, que les Pères de Trente ont voulu trouver une allusion — lointaine et sans fondement réel — au sujet qui nous occupe.

Les considérations générales relatives à la manière d’agir du Christ et des apôtres fournissent un fondement plus solide. Le Nouveau Testament, en effet, laisse entendre que la « bonne nouvelle » fut, en grande partie, transmise oralement. Le Christ lui-même n’a rien écrit et n’a intimé à aucun apôtre l’ordre d’écrire ; mais il leur a commandé expressément de prêcher sa doctrine et de s’en faire les témoins autorisés par toute la terre avec, pour les auditeurs, l’obligation d’y adhérer. Cf. Matth., x, 7 ; xxviii, 18-20 ; Marc, xvi, 15. Aussi les apôtres n’ont-ils jamais écrit ex professo de traités de doctrine et n’ont-ils jamais envisagé un enseignement écrit comme faisant partie de leur mandat apostolique. Bien plus, un certain nombre d’entre eux n’ont laissé aucun écrit, bien que tous se soient acquittés parfaitement de leur devoir. Ceux qui ont laissé des écrits n’ont pris la plume qu’occasionnellement pour défendre ou expliquer certains points du dogme ou de la morale selon les nécessités des circonstances ou pour répondre à la demande qui leur en était faite. Voir en ce sens Bellarmin, De verbo Dei, t. IV, c. iv, se référant à Eusèbe, Hist. eccl., t. III, c. xxiv (évang. de S. Matthieu) ; t. II, c. xv (S. Marc) ; t. III, c. xxiv (S. Luc et S. Jean).

Un enseignement oral est d’ailleurs très conforme à la description que nous donne, à la période apostolique, l’auteur de l’épître aux Hébreux parlant du « message salutaire qui, annoncé d’abord par le Seigneur, nous a été sûrement transmis par ceux qui l’ont entendu de lui ». Heb., ii, 3. Il s’agit donc bien d’un magistère vivant, auquel participent les apôtres, prédicateurs de la vérité qu’ils ont reçue de Jésus et dont ils doivent être les témoins quand, revêtus de la force du Saint-Esprit, ils iront prêcher l’évangile jusqu’aux extrémités de la terre. Act., i, 8 ; cf. ix, 15.

Enseignement explicite.

1. Les textes. — Ce dernier

texte, Act., ix, 15, concerne plus spécialement la prédication de saint Paul : or, personne, mieux que Paul, n’a mis en évidence l’existence de traditions doctrinales non écrites. Il renvoie, en effet, les fidèles de Corinthe aux doctrines qu’il leur a transmises verbalement : « Je vous loue de ce que vous reteniez mes instructions, telles que Je vous les al données, xaOwç itapéSwxa Ci(jùv, xâç TtapaScoeiç xaTi/exe. » l Cor.,