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TIMOTHÉE ET TITE. LA CRITIQUE RÉCENTE


d’un disciple qui voulut consigner par écrit les leçons de l’Apôtre sur le gouvernement des Églises, ou même reconstituer une lettre perdue de Paul à Timothée. L’école de Tubingue attaqua avec acharnement les positions traditionnelles. En 1835, le chef de l’école, Baur, Die sogenannlen Pastoralbriefe…, prétendait reconnaître dans les erreurs décrites par les trois Pastorales les doctrines gnostiques du iie siècle, en particulier celles de Marcion et de Valentin. Les « antithèses d’une fausse science », I Tim., vi, 20, visaient ouvertement le fameux ouvrage de Marcion, les Antithèses, paru vers l’an 140. Toutes trois également se proposaient d’orner de l’auréole apostolique l’institution récente de la hiérarchie. Ainsi l’histoire des idées assignait aux Pastorales leur place certaine : elles n’étaient pas antérieures aux environs de l’an 140. Les disciples de Baur s’attachèrent à consolider et à étendre les bases historiques du système non sans aboutir parfois à des résultats divergents. Schenkel et Hilgenfcld retardaient la composition des Pastorales jusqu’au milieu du iie siècle ; Volkmar jusqu’en 170 ; Hausrath et Pfleiderer les remontaient au temps d’Adrien (117-138) ; Pfleiderer et Julicher aux derniers temps de Trajan (98-117).

3° Authenticité partielle ; théorie fragmentaire. — Tandis que Baur rejetait en bloc les trois Pastorales, Credner, en 1836, Einleitung in das N. T., Halle, p. 406 sq., proposait l’hypothèse de fragments ou billets authentiques, dus à la plume de Paul, qui auraient servi, vers les dernières années du I er siècle ou au début du suivant, à la rédaction des épîtres sous leur forme actuelle. Bon nombre de critiques adoptèrent cttte vue, chacun d’ailleurs à sa manière, en sorte qu’il y a presque autant de systèmes que d’auteurs. Donnons un aperçu de cette bigarrure. Renan déclarait difficile de décider » si les trois lettres étaient apocryphes d’un bout à l’autre ou partiellement authentiques ; cependant, « peut-être, en certaines parties, à la fin de la deuxième à Timothée, par exemple, des bilUts de différentes dates ont-ils été mêlés ». Saint Paul, 1869, p. xlviii sq. ; 111-112. — Hausrath (1865) désignait comme fragments pauliniens II Tim., i, 1-2, 15-18 ; iv, 9-18, soit en tout une quinzaine de versets. — Krenkel (1869) admettait à peu près les mêmes versets, mais en ordre inverse, II Tim., iv, 1921 ; 9-18 et i, 16-18, précédés de Tit., iii, 12-13. — liesse, Die Entslehung der n. t. Hirtenbriefe, Halle, 1889, gardait en entier II Tim., composée de deux lettres primitives, et la moitié environ de Titc, suspectant seulement ce qui regardait l’organisation des Églises. — À la même date, Knocke, Commentar zu <len Pastoralbriefen, Gœttinguc, 1889, se montrait i ocore plus conservateur : II Tim., résulte d’une combinaison de billets authentiques, bien que le compilateur n’ait pas toujours re speeté l’ordre chronologique ; I Tim. elle-même est paulinienne, à l’exception d’une vingtaine de versets, et dans celle à Tite l’éditeur n’a ajouté que quatre versets : i, 7, 9, 12-13. — Harnack, en 1897, Chronologie, t. I, p. 480-486, acceptait dis « fragments très considérables » de II Tim. et « un bon tiers » de Tite, mais pas un verset sûrement paulinii n dans I Tim., dont le fond primitif lui paraissait trop reTnanié. — Cle men, Paulus, sein l.rbm und Wirken, Giessen, 1904, revient, pour II Tim.e t lit aux fragment’, r 1<- Krenkl 1, soit 21 vers < ts provenant de’trois billets écrits en 57 (II Tim., iv, 19-22 ; ’lit., iii, 12-14), en 61 (iv, 9-18) et en 62 (1, 1, 15-18).

Opinions modernes.

Au milieu eles attaques

redoublées, l’authenticité eles Pastorales avait <ni<>r<’pour défenseurs, non seulement te>us les exégètes

oliques, parmi lesquels, en Allemagne, Hug

(1XOX), Hancberg (1850), Maier (1852), Ginella (1865,

en latin), Langen (1868), mais aussi beaucoup de protestants, surtout en Angleterre. Mofîatt, dans son article Timothy and Titus de VEncyclop. biblica, t. v, col. 5079-5096, fait sienne la thèse de Baur ; il énumère cependant, parmi les critiques protestants, plus de partisans que d’adversaires de l’authenticité. H.-J. Holtzmann, l’un des plus illustres maîtres de l’école de Tubingue, n’a que mépris pour les efforts tentés en faveur des Pastorales. Persuadé que le monde d’idées où se meuvent les lettres en question trahit clairement leur origine tardive, il prononce dans son Lehrbuch der n. t. Théologie (réédité en 19Il par Julicher et Bauer, t. ii, p. 294, n. 1) : ee Sur ce terrain, l’apologétique mise en œuvre ces derniers temps, soit du côté catholique par Belser, Die Briefe des Apostels Paulus an Tim. und Tit., 1907, soit du côté protestant par Zahn, Barth etWohlenberg, dans Zahns Kommentar, t. xiii, 1906, et surtout par les anglicans, tel que J.-D. James, The genuiness and authorship of the Pastoral epistles, 1906, n’est plus à prendre au sérieux. » A quoi Barth répondait sur le même ton, Einleitung in das N. T., Leipzig, 1914, que c’est une bévue de regarder les Pastorales comme des écrits postérieurs au temps des apôtres. Le verdict de Holtzmann n’a pas empêché les travaux les plus sérieux soit des défenseurs pour établir plus solidement l’authenticité, soit des adversaires en quête de raisons plus décisives pour la miner, soit des neutres afin de justifier mieux leur non liquet. E. Kuhn, Das Problem der Pastoralbriefe, dans Neue kirchliche Zeitschrijt, t. xxxii, 1921, p. 164-181, réclame la liberté d’examen contre les prétentions de la critique interne, mais hésite devant la nécessité d’admettre un second emprisonnement de l’Apôtre. St. John Parry, The Pastoral Epistles, Londres, 1920, se place précisément sur le terrain des idées et des institutions, où croyait triompher Holtzmann, pour défendre l’authenticité des Pastorales. G. Wohle nberg, dans la 3e édition de ses Pastoralbriefe (Zahn, Komm.desN. T., t. xiii, 1923) reprend vigoureusement la même démonstration. M. Joncs, The New Testament in the twentieth Centurꝟ. 2e éd., Londres, 1924, croit constater que les Pastorales ne compte’iit plus dans les deux continents que quelques partisans isolés ; il estime cependant que le problème reste ouvert, parce que ces lettres présentent bien plus d’affinité avec celles de Paul qu’avec la littérature du IIe siècle.

Ce dernier point est étudié avec une attention spéciale par P.-N. Harrison, The problem of the Pastoral Epistles, Oxford, 1921. Poussant plus loin qu’on n’avait fait encore l’investigation du vocabulaire et élu style, il compare ces lettres soit avec les épîtres de-Paul, soit avec la littérature ecclésiastique et profane des débuts du iie siècle, et il conclut qu’elles doivent leur forme actuelle à un disciple de Paul, vivant sous le règne de Trajan ou d’Adrien, entre 110 et 130. Cependant il y a, dit-il, des traits personnels si bien dans le genre des vraies lettres de Paul, que nous pouvons affirmer en toute sûreté que personne n’aurait jamais songé à douter de leur authenticité, n’eût été le contexte’où ils se rencontrent. Il elistribue ces détails privilégiés en cinq groupes ou billets authentiques. Le premier contient les quatre versets lit., iii, 12-15 ; il fut écrit de Macédoine quelques me>is après II Cor., x-xiii et avant II Cor., i-ix (car Harrison dédouble la seconde aux Corinthiens). — De’Macédoine, après la vi ite à Troas mentionnée II Cor., ii, 2-13, Paul envoie à Timothée’quatre versets et demi, II Tim., iv, 13-15, 20, 21a, l’invitant à le rejoindre axant l’hiver. — Arrêté à Jérusalem et conduit à Césarée, Paul écrit quelques nuits, n Tim.. iv, 16-lSo, pour donner à Timothée eie s nouvelles <l<- ses deux apologies ! qui

eurent lien, la première élevant le peuple’, Aet., XXII, l’autre devant le Sanhédrin, Act., xxiii. — La qua-