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THOMISME. LES VERTUS THÉOLOGALES


rcment la foi infuse, qui nous fait connaître la fin surnaturelle à laquelle Dieu nous a appelés et le secours surnaturel promis à ceux qui l’implorent pour atteindre la vie de l’éternité.

De ce que l’espérance est inférieure à la charité, il ne faudrait pas supposer, ont remarqué plusieurs thomistes contre les quiétistes, qu’elle contiendrait un désordre, et qu’il faudrait en faire le sacrifice pour arriver à l’amour désintéressé. Il faut noter à ce sujet avec Cajélan, In II* m -II*>, q. xvii, a. 5, n. 6, que par l’espérance infuse desidero Deiun mihi, non propler me, sed propter Deum. Par l’espérance, nous désirons Dieu à nous, comme notre souverain Bien, sans le subordonner a nous, mais en nous subordonnant à lui, tandis que nous désirons un fruit, qui nous est inférieur, à nous et pour nous, nobis et propter nos, en le subordonnant à nous. C’est ce que les quiétistes n’ont pas assez remarqué. En d’autres termes la fin dernière de l’acte d’espérance est Dieu même. Par l’espérance nous désirons noire fin ultime, non pas certes en la subordonnant à nous comme la nourriture nécessaire à notre subsistance, mais en nous subordonnant à elle. De même Dieu le Père a voulu nous donner son Fils unique comme Rédempteur, sans le subordonner à nous, mais en nous subordonnant à lui, selon cette parole de saint Paul : Omnia enim vestra sunt, vos aillent Christi, Christus autem Dei.

Bien qu’elle soit inférieure à la charité, l’espérance, quoi qu’en aient dit les quiétistes, ne contient rien de désordonné. Le sens exact de la formule de Cajétan q le nous venons de citer est celui-ci : desidero Deum mihi, non propter me, sed ftnaliter propter Deum, nondum vero jormaliler propler Deum, nam hoc ad caritatem pertinet. Par la charité nous aimons Dieu formellement pour lui-même, parce qu’il est infiniment bon en lui-même, et par l’acte secondaire de la charité nous désirons Dieu à nous et au prochain, jormaliler propter Deum, pour le glorifier éternellement.

L’acte d’espérance est moins élevé, sans doute, mais il a certainement Dieu pour fin ultime : desidero Deum mihi non propler me, sed finaliter propter Deum, et cela de deux façons différentes, suivant que l’espérance est vivifiée par la charité ou qu’elle est informe.

Par l’espérance vive unie à la charité, je désire Dieu a moi finalement pour lui-même aimé efficacement par dessus tout. Par l’espérance informe, je désire Dieu a moi finalement pour lui-même inefficacement aimé. Dans l’état de péché mortel, il peut y avoir en effet un amour inefficace ou velléitaire de Dieu par dessus tout, a la pensée qu’il est infiniment meilleur que nous et que » oui c créature. Cet amour reste inefflt anl qu’il est contrarié par l’amour désordonné de soi même. L’espérance informe est ainsi principe d’un acte bon et même salutaire, mais cet acte ne peut être méritoire <le la vie éternelle ; aussi, bien que l’espérance informe soit une vertu, elle n’est pas proprement in statu virtutis, p i"e que son acte n’est pas efficacement ordonné à la fin dernière, comme il le faudrait, jacil actutn liiiimm. sed non ila bene, ut oporteret.

Lorsque au contraire elle est vivifiée par la charité,

l’espérance grandit avec elle et apparaît comme une

haute vertu, bien qu’elle ne soit pas la plus grande de’oui’s. l’our le mieux entendre, on peut noter que,

parmi les vertus morales, la magnanimité acqule et

plus encore la magnanimité infuse, qui a « les affinités

l’espérance, nous fait tendre vers de grandes

i s et nous l( s fait désirer en nous suboruonnant à

elles, comme on le voit chez les fondateurs d’ordre

dan II urs travaux et leurs luttes. À plus forte raison

éranci infuse est elle une haute vertu, qui nous

lait tendre non seulement vers de grandes choses,

Dieu même en nous subordonnant à lui.

Cela t d’autant plus vrai que l’espérance ne nous fait

pas seulement désirer un degré inférieur de la béatitude surnaturelle, mais la vie éternelle elle-même sans en préciser le degré, elle nous porte même à marcher toujours plus généreusement vers Dieu, en nous le faisant désirer davantage.

Par suite, contrairement à ce qu’ont dit les quiétistes, dans la purification passive de l’esprit décrite surtout par saint Jean de la Croix, loin de faire le sacrifice de l’espérance ou du désir du salut, il faut, selon l’expression de saint Paul, « espérer contre toute espérance ». Cette purification passive met en effet en un puissant relief le motif formel de cette vertu théologale, si bien que, lorsque tous les autres motifs secondaires s’effacent au point de sembler disparaître, il reste toujours le motif suprême : Deus auxilians, Dieu toujours secourable et qui n’abandonne pas ceux qui espèrent en lui. Dans ces purifications, du rcsle, l’espérance ou confiance en Dieu est de plus en plus vivifiée par la charité et ennoblie par elle. Dans l’adversité et l’abandon apparent de Dieu, l’espérance est purifiée de tout alliage, de tout amour désordonné de soi-même, et l’âme de plus en plus désire Dieu non pas seulement comme sa béatitude, mais pour le glorifier éternellement.

2. La certitude de l’espérance a été particulièrement étudiée par saint Thomas et ses disciples, q. xviii, a. 4. Le saint Docteur a déjà distingué dans l’intelligence la certitude de la science, fondée sur l’évidence, celle de la foi fondée sur la révélation et qui malgré l’obscurité des mystères dépasse toute certitude naturelle, celle du don de sagesse sous l’inspiration du Saint-Ksprit et, par connaturalité aux choses divines, celle de la prudence dans l’ordre practico-pratique. Il devait préciser aussi ce qu’est la certitude de l’espérance, qui, elle, n’est pas dans l’intelligence, mais dans la volonté sous la direction infaillible de la foi. Saint Thomas y voit une certitude participée et très formellement une certitude de tendance vers la fin dernière, malgré l’incertitude du salut. De même, dit-il, ibid., sous la direction de la Providence, l’instinct de l’animal tend sûrement vers son but, l’hirondelle vers la région où elle retourne. De même encore les vertus morales, sous la direction certaine de la prudence, tendent certainement à leur objet, au juste milieu : > garder en différentes matières ; ainsi l’espérance tend certainement vers la fin ultime : Et sic etiam spes ccrliludinaUter tendit in suum finem, quasi participons certiludinem a fide, quie est in vi cognoscitiva.

II faudrait avoir une révélation spéciale de notre prédestination pour avoir la certitude de noire salut individuel, mais, malgré l’incertitude du salut, par L’espérance nous tendons certainement mis lui, sous la direction de la foi et selon les promesses de Dieu, qui ne commande jamais l’impossible, niais qui ordonne de faire ce que nous pouvons et de demander ce que nous ne pouvons pas ». De même, si nous avons pris le train de Paris à Rome, sans avoir la certitude d’y arriver, un accident pouvant se produire en COUTS de route, nous tendons certainement vers le but du voyage et cette Certitude augmente a mesure que nous

nous en rapprochons.

L’espérance infuse, comme la foi infuse, ne peut se perdre que par vu péché mortel qui lui soit dit ment contraire, c’est a dire par un péché mortel de désespoir ou de présomption, t. es deux vertus théologales restent donc en bien des âmes effet al de pé( hé mortel, elles sont alors non m stulti pcrfeclse virtutis’lisent les I homisles et elles ne sont pas dans leur sujet eonnaturel. puisque l’âme est alors privée de I I ^’Acc habituelle. Lorsqu’au contraire, elles’.ont unies i la charité, leur acte s’ennoblit de pluse n plus par le-pro Cies de ci Me vertu, acc laquelle elles se développe ni.

A la vertu d’espérance i oi n spond, si ion saint Tbo