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THOMISME. PREUVES DE L’EXISTENCE DE DIEU


s’identifie avec ce qui est absolument inintelligible. C’est le cas de ce rapport de convenance entre deux termes qui ne se conviendraient nullement. En d’autres mots : l’union incausée du divers est impossible : Quæ secundum se diversa sunt non conveniunt in aliquod unum, nisi per aliquam causam adunantem ipsa. I", q. iii, a. 7. On dit aussi communément : causa unionis est unitas. L’union participe seulement à l’unité, car elle comporte une diversité d’éléments unis, et donc l’union suppose une unité supérieure. Un ange ou un grain de sable sortant, du néant sans aucune cause c’est là non pas seulement une affirmation gratuite comme celle d’un fait possible, dont on ignore l’existence, c’est une affirmaiion absolument inintelligible et absurde. Bref l’être par participation suppose nécessairement l’être par essence, et l’unité par participation suppose l’unité par essence.

Nous avons exposé plus longuement cette défense du principe de causalité ailleurs, cf. Dieu, son existence cl sa nature, 6e éd., 1933, p. 83 sq., 98 sq., 170-181.

On peut reprendre la défense de ce principe, non plus secundum viam ascendenlem inventionis, mais secundum viam judicii, en descendant de la notion d’Être par essence à celle d’être par participation. C’est ce que fait saint Thomas, I », q. xliv, a. 1. Plusieurs aujourd’hui se placent à ce point de vue, mais il faut commencer par la voie d’invention. Voir C. Fabro, La difesa critica del principio di causa, dans Rivista di filosofia neo-scolastica, 1936, p. 102-141 ; La notione melafisica di participazione sec. s. Tommaso, 1939.

La négation du principe de causalité n’est pas, il est vrai, une contradiction aussi évidente que si l’on disait : le contingent n’est pas contingent, ou le contingent existe nécessairement par soi. Gomme le remarque saint Thomas, I », q. xliv, a. 1, ad l um, en niant le principe de causalité, on ne nie pas la définition du contingent in 1° modo dicendi per se, mais on ni : ’M propriété Immédiate ûi 2° modo dicendi per se selon la terminologie d’Arislole (Posl. Analyt., t. I, c. iv, lect. 10 S. Thomac). Rejeter le second membre de cette distinction conduit à dire qu’on ne peut jamais déduire de la définition d’une chose ses propriétés, par exemple les propriétés du cercle. Et cette négation de la dépendance de l’être contingent à l’égard de sa cause conduit à une véritable contradiction, car elle conduit à affirmer que l’union incausée du divers est possible, que l’existence convient positivement à un sujet contingent incausé, bien qu’il n’y ait rien par où elle puisse lui convenir ; ce serait affirmer la convenance positive et actuelle de deux termes qui ne se conviennent nullement, ce qui est à la fois absolument inintelligible et absurde, parce que en dehors de l’être intelligible et sans aucun rapport possible avec lui. En dehors des propositions très manifestement contradictoires il en est d’autres qui contiennent, comme dans le système de Spinoza, une contradiction moins évidente, et parfois même une contradiction cachée ; ainsi certains n’ont pas vu la contradiction de cette proposition : incorporalia possunt esse ex se in loeo, et pourtant il répugne que l’esprit pur soit par lui-même dans un lieu, car il est d’un ordre supérieur à l’espace (cf. s. Thomas, I*, q. ii, a. i) : incotporalia i<>n rssr m

Inra ut propOêUia j>rr sr nota ojiiut tapientt » taiitiirn.

Il y a même des contradictions dont la répugnance n’apparatl qu’à la lainière de la i tévélal ion divines pat exemple si quelqu’un disait qu’il y a quatre personnes en Dieu, c’est là une contradiction inévidente pour nous, mais évidente pour ceux qui savent de Dieu quid est, ce qu’il est, pour aux qui ont la vision béatiflmie. il y a bien des intermédiaires entre les contradictions absolument manifestes et les contradictions cachet la négation du principe de causalité approche beau

coup des contradictions in terminis absolument évidentes.

Si le principe de causalité ne peut être nié ou mis eu doute, sans qu’on nie ou qu’on mette en doute celui de contradiction, il suit que les preuves classiques de l’existence de Dieu entendues dans leur vrai sens, ne peuvent être rejetées sans qu’on mette l’absurde à la racine de tout. Il faut choisir : ou l’Être nécessaire et éternel qui seul peut dire : « je suis la vérité et la vie », ou bien l’absurdité radicale au principe de tout. Si Dieu est véritablement l’Être nécessaire, de qui tout dépend, il s’en suit très évidemment que sans lui tout devient absurde, ou que l’existence de tout le reste devient impossible. De fait, si l’on ne veut pas admettre l’existence d’une cause suprême et éternelle, qui est l’Être même et la Vie même, on doit se contenter de l’évolution créatrice, qui, n’ayant pas en soi sa raison d’être, ne peut être qu’une abstraction réalisée et une contradiction : un mouvement universel sans sujet distinct de lui, sans cause efficiente distincte de lui, sans direction déterminée, sans finalité, une évolution dans laquelle le plus parfait sort du moins parfait sans cause aucune. C’est contraire à tous les premiers principes de la pensée et du réel, aux principes de contradiction ou d’identité, de causalité efficiente et de finalité. Bref : sans l’Être nécessaire et éternel dont tout dépend, rien n’est et ne peut être. Affirmer, en niant l’existence de Dieu, l’existence de quoi que ce soit, c’est tomber dans une contradiction, qui n’apparaît pas toujours comme contradiction dans les termes ou immédiate, mais qui est pourtant, si on l’examine de près, une contradiction véritable. Si, dans la doctrine de Spinoza, beaucoup de conclusions, sans être immédiatement contradictoires dans les termes, le sont médiatement, à plus forte raison dans une doctrine athée qui nie l’existence de Dieu ; par suite l’agnosticisme qui doute de l’existence de Dieu peut être conduit de même à douter de la valeur réelle du principe de contradiction, premier principe de la pensée et du réel.

Telle est, selon l’école thomiste, la valeur des preuves classiques de l’existence de Dieu, telles que saint Thomas les a résumées dans la Somme théologique.

3. Point culminant vers lequel convergent les cinq preuves types de l’existence de Dieu. — Saint Thomas nient re fort bien, 1°, q. iii, a. 4, que ce sommet n’est autre que YÊtre même subsistant. Ces cinq voies sont comme cinq arcs qui aboutissent à la même clef de voûte. Chacune en effet se termine à un attribut divin : premier moteur des corps et des esprits, première. (anse efficiente, premier nécessaire, être suprem. suprême intelligence qui dirige tout. Or, chacun de ces attributs ne peut appartenir qu’à Celui qui est l’Être même subsistant et qui seul peut dire : Ego sum qui suai.

Le premier moteur doit être son activité même, or le mode d’agir suit le mode d’être, il doit doue et re l’Être même. -- Lu cause j>rrmière, pour être incausec. doit avoir en elle la raison de sa propre existence, Or, elle ne peut se causer elle-même, car pour causer il faut e’ie déjà. Elle n’a donc pas reçu l’existence, mais elle est l’existence même. — L’Être nécessaire Implique aussi comme attribut essentiel l’existence, c’est a dire qui] doit non pas seulement avoir l’existence, mais son existence, ou l’existence même. — L’Être suprême, absolument simple et partait, ne saurait non plus participer à l’existence, mais il doit être l’Être par essence. — La première intelliqrncr, qui ordonne tout, ne peut elle-même être ordonnée à l’être et ; la vérité comme a un objet distinct ; il faut qu’elli e même toujours actuellement connu, il fini

qu’elle puisse dire, non seulement : j’.n la vérité cl la vie. mais |e luit la vérité et la vie ».