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THOMASSIN. LA DISCIPLINE ECCLÉSIASTIQUE


très ou les curés des paroisses particulières n’y disaient point la messe ». C. xxii, 4. De ces faits, « il faut donc conclure que les paroisses de la campagne n’ont commencé qu’au ive siècle, qu’elles n’ont pas commencé partout en même temps, que celles des villes sont plus anciennes, mais qu’elles n’étaient que dans les plus grandes et qu’au commencement, on n’y célébrait point la messe ». N. 10. Thomassin connaît l’usage du pain consacré porté de l’église principale aux églises particulières, du fermenium conservé pour la messe suivante en vue d’assurer, l’un la primauté du pape ou de l’évêque, l’autre la continuité du sacrifice.

Gerson avait enseigné l’origine divine des curés « comme successeurs des soixante-douze disciples », c. xxvi, 1 ; Thomassin préfère dire, avec l’abbé de Saint-Cyran, que « l’état des curés est d’une institution et d’une origine divines en tant qu’il est renfermé dans l’épiscopat ». N. 5. Il raconte que les diacres avaient la prétention de s’élever au-dessus des prêtres et que saint Jérôme, qui les met au troisième degré de la hiérarchie, leur rappelle qu’ils ont été institués pour le soin des veuves. C. xxix. Quant aux sous-diacres et aux autres ordres mineurs, ils ne sont pas d’institution divine, ce sont des démembrements du diaconat : « Tous les conciles et tous les Pères conviennent unanimement et invariablement des trois ordres supérieurs et disconviennent entièrement des autres. Les uns en ajoutent que la postérité n’a pas reconnus ; les autres en retranchent que les siècles suivants ont autorisés. » C. xxx, 4.

Dans le chapitre des interstices, la question importante est celle-ci : « savoir si l’on a jamais ordonné ou des évêques qui ne fussent pas déjà prêtres, ou des prêtres a qui le diaconat n’eût jamais été conféré. » C. xxxvi, 1. Un canon de Sardique semble le défendre quand il ordonne d’observer les degrés, n. 2, 3 ; ces interstices doivent être gardés entre les trois ordres majeurs, ils seront assez longs pour qu’on ait le temps de s’accoutumer à l’exercice des fonctions. Quelquesuns opposent les ordinations de Barnabe, Silas, Barsabas, Tite, Timothée, etc. « Il est aisé de répondre que ce ne sont que des conjectures, puisque les Saintes Lettres ne disent rien sur ce sujet de clair et de précis. » C. xxxvi, 17. Ceux qui ne seraient point satisfaits de cette réponse peuvent penser que « les apôtres, dans ces premiers commencements, avaient quelquefois communiqué le sacerdoce en la même manière qu’ils l’avaient reçu eux-mêmes du Fils de Dieu… en donnant l’épiscopat à ceux qui n’avaient reçu aucun des ordres inférieurs ». Ibid.

L’exercice de l’autorité a été également soumis à cette loi de la variabilité : « La principale autorité passa d’abord de Jésus-Christ à saint Pierre et aux apôtres, des apôtres aux évêques et ensuite des évêques aux conciles. Des conciles elle retomba entre les mains des évêques ; et enfin une grande partie de cette autorité a passé des évêques au pape. Il serait peut-être inutile, ou du moins il n’est pas nécessaire d’examiner laquelle de ces polices différentes est la plus naturelle et la plus avantageuse à l’Église. Quelque parti que nous prenions, il n’en sera autre chose que ce qu’il a plu à Dieu d’en ordonner… Nous devons agréer ce qu’il agrée et nous soumettre avec respect à toutes ses sages dispositions. Il importe bien moins d’examiner par quelles mains la juridiction principale de l’Église est administrée que de savoir par quelles règles et avec quelle conformité à la loi éternelle elle est exercée. » Préface, p. vu-vin. Il répète la même chose, t. I, c. xlviii, 17. Il n’explique pas longuement qu’au sommet de la hiérarchie est le pape avec pleins pouvoirs, mais cela résulte de tout son enseignement. Après ces notions générales sur l’origine des différents ordres, il étudie les changements survenus chez

les patriarches, primats, archevêques, métropolitains, évêques, vicaires apostoliques, archiprêtres, etc. Il parle très longuement des cardinaux, de leur origine, etc. : c’était d’abord une fonction d’accompagner le pape dans les cérémonies, d’être son conseil ; c’est devenu ensuite une dignité, la plus haute de l’Église : i Ceci, dit-il, a eu le sort des plus grandes choses et des plus anciennes qui est que l’origine nous en est ordinairement cachée. » L. II, c. cxv, 1. Voir part. 1, t. II, c. xiii sq., 1. 1, p. 1261 sq. Après ces données générales, il indique les changements survenus au cours des siècles.

3. Pénitence.

La discipline pénitentielle n’était pas encore, au xvii c siècle, connue aussi parfaitement qu’elle l’est aujourd’hui.

Thomassin parle assez brièvement de ce qui se faisait aux trois premiers siècles, il ne veut pas refaire les travaux de Petau et de Morin ; il rapporte cependant que, d’après Socrate, « au temps de la persécution de l’empereur Dèce qui fut très sanglante, les évêques établirent dans leurs églises des prêtres pénitenciers, afin que ceux qui avaient succombé à la crainte ou à la rigueur des tourments se confessassent à eux de leur apostasie et en reçussent la pénitence canonique ». L. II, c. vii, 13. Mais la réconciliation des pénitents publics restait toujours réservée à l’évêque ; le prêtre pénitencier avait pour mission propre de recevoir la confession des péchés secrets ; après quoi, s’il y avait lieu, il les obligeait à la pénitence publique. Thomassin raconte que, sous le pontificat de Nectaire à Constantinople, une dame, après s’être confessée au prêtre pénitencier, s’accusa en public d’avoir péché avec un diacre ; Nectaire en profita, en 390, pour supprimer la charge de pénitencier. Thomassin en conclut : « Quoique la pénitence fût publique en ce tempslà même des péchés secrets, la confession en était toujours secrète, et la pénitence même s’en faisait en secret dans toutes les conjonctures où, si elle eût été publique, elle eût tourné plutôt au scandale qu’à l’édification de l’Église. » Ibid. Le décret de Nectaire mit fin à la pénitence publique en Orient ; « elle ne se pratique plus dans l’Occident depuis environ le xiie siècle », 14 ; cf. c. xi, 5-10. Peu à peu, elle se rendit de plus en plus rare, sans qu’on puisse citer un décret authentique qui l’ait proscrite. Le concile de Trente « ordonne expressément qu’on impose des pénitences publiques pour les péchés publics et scandaleux ». Sess. xxiv, c. viii, cité t. II, c. xvi, 7.

4. Les clercs.

Le t. n s’occupe de la vocation et de l’ordination des clercs ; de l’élection, confirmation, consécration des évêques ; des bénéfices, des conciles et des assemblées du royaume ; de la juridiction des évêques, etc. Le t. iii, des biens temporels de l’Église, de leur distribution, de leur usage suivant les canons. L’ouvrage s’achève par l’exemple de saint Charles qui faisait servir sa libéralité « comme d’un attrait et d’un assaisonnement pour faire entrer bien avant dans l’âme la lumière des vérités chrétiennes et l’amour des véritables vertus ». Les documents rassemblés dans cet ouvrage sont innombrables et restent toujours très précieux, même après les progrès réalisés par l’érudition moderne ; il est difficile de trouver Thomassin en défaut et l’on peut encore s’en rapporter à ses affirmations, tant sa science est étendue et sa perspicacité merveilleuse : « Il a cru, dit Cloyseault, qu’en traitant (de la discipline), il fallait exposer simplement ce qui se trouve dans les auteurs, faisant assez voir par des réflexions judicieuses de quel côté il penchait ; ces réflexions sont fréquentes dans ses ouvrages, et on y trouve partout beaucoup de science, de sublimité et d’onction. » Op. cit., p. 175. Malgré cela, il fut contredit, non seulement par le parti janséniste et gallican, mais même par les autres : « Quelque mena-