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THOMAS D’AQUIN. ÉCRITS

les questions qu’on lui pose par plusieurs opuscules, et il n’omet pas le ministère de la prédication dans lequel il sait émouvoir et édifier le peuple. G. de Tocco, p. 122 ; Bern. Guidonis, p. 195. Ce souci d’être utile aux âmes lui inspire un zèle profond dont sa vie compte beaucoup d’exemples. Ibid., p. 96, 109, 110.

Par dessus tout, c’est son amour de Dieu qui lut l’âme de tout son effort intellectuel, ainsi qu’il le confesse au moment de recevoir le viatique :. S umo te… pro cujus amore studui, vigilavi et laboravi, le prædicavi et docui… Ibid., p. 132. Depuis quatre mois cependant, le saint docteur avait abandonné toute activité doctrinale, à la suite d’une extase plus prolongée que les autres : Venit finis scripturæ meæ, confiait-il à frère Réginald, quia talia sunt mihi revelata quod ea quæ scripsi et docui, modica mihi videntur, et ex hoc spero in Deo quod sicut doctrinse meæ sic cito finis erit vitae meæ. Ibid., p. 120. Le grand docteur qui s’est toujours effacé derrière la vérité objective, sans rien confier de ses expériences surnaturelles, ne s’est pas expliqué davantage sur la nature de ces lumières. S’agit-il de cette vision intellectuelle de la Trinité et de l’expérience intime des attributs divins qui couronnent la vie des saints ici-bas ? Alors leur langue et leur plume comme celles de saint Thomas se refusent à dire ce qu’ils savent, non discens, sed patiens divina. En tout cas le plus intellectualiste des docteurs, qui laissa la Somme inachevée, commenta sur son lit de mort le Cantique des Cantiques. Cette brève exposition de sa conception du docteur et de la façon dont il l’a réalisée, suffira, croyons-nous, à écarter toutes les critiques suscitées par l’allure intellectuelle de sa doctrine.

Elle ne sera pas non plus inutile pour comprendre son enseignement. Car il ne saurait être séparé de la personnalité de saint Thomas.

P.-M.-R. Gagnebet.

III. Écrits de saint Thomas.

Saint Thomas a laissé beaucoup d’écrits sur les matières les plus diverses dans les domaines de la philosophie et de la théologie. Ces écrits sont en partie le fruit de ses leçons académiques (ainsi les Commentaires bibliques et le Commentaire sur les Sentences), ou des disputes scolastiques (ainsi les Questions disputées), et en partie le produit d’une compositionlibre, soit systématique (comme les Sommes), soit en réponse à des demandes ou nécessités d’explication (comme la plupart des Opuscules).

Quelques-unes de ses œuvres ont été écrites de sa propre main ou ont été dictées par lui, d’autres au contraire furent « reportées » soit par des confrères soit par des étrangers. On possède encore des écrits de saint Thomas qui nous sont parvenus dans l’original en autographe, cf. M. Grabmann, Die Autographe des hl. Thomas v. Aquin, dans Hist. Jahrbuch, t. xl, 1940, p. 514-537. D’autres nous ont été transmis dans des copies.

Certaines œuvres authentiques ont disparu comme divers commentaires bibliques ; les expositions du Cantique dans les Opéra omnia ne sont pas de saint Thomas. Cf. Mandonnet, Écrits, p. 144 sq.

A cause de l’interruption d’enseignement, soit à Paris, soit en Italie, et pour d’autres raisons, le problème des écrits de saint Thomas a donné lieu à des graves discussions, surtout quant à l’authenticité ou non-authenticité de l’un ou de l’autre ouvrage conservé sous son nom. Déjà les éditeurs de la Piana (1570) avaient marqué le caractère authentique ou au contraire douteux de certains écrits attribués au saint docteur. Dans cette étude de la transmission des œuvres de saint Thomas et de l’établissement de leur authenticité s’est surtout distingué le P. Jacques Échard, dans les Scriptores Ord. Præd., Paris, 1719, t. i, p. 283 sq., suivi, avec moins de précision par Ber nard de Rubeis, Thomas Soldati, P.-A. Uccelli et d’autres. De nos jours, ce sont surtout le P. Pierre Mandonnet († 1936) et Mgr Martin Grabmann, deux savants qualifiés, qui, en de nombreuses publications, ont contribué à la solution des problèmes d’authenticité de la production littéraire du maître d’Aquin.

P. Mandonnet, dans son étude Des écrits authentiques de saint Thomas d’Aquin, 2e éd., Fribourg, 1910, apporte à la discussion le critère nouveau du catalogue officiel, critère ou hypothèse dont M. Grabmann, Die Werke des heitigen Thomas von Aquin, 2e éd., Munster-en-W., 1931, p. 53-75 montre toute la fragilité.

Outre les érudits que nous venons de citer, la controverse et les recherches sur l’authenticité et la chronologie des écrits de saint Thomas, ont mis en avant les savants éditeurs léonins et d’autres spécialistes, comme Denifle, Gilson, De Bruyne, Destrez, Synave, Chenu, Lottin, Glorieux, Pelzer, Pelster, Suermondt, Beltran de Heredia, Kâppeli, Castagnoli. généralement dans les revues suivantes : Revue thomiste, Revue des sciences philosophiques et théologiques, Bulletin thomiste, Divus Thomas (Fribourget Plaisance), Gregorianum, Scholastik, Angelicum, Ciencia tomista, Ephemerides theologicæ Lovanienses, Recherches de théologie ancienne et médiévale. Signalons encore les études du P. A. Bacic, Inlroductio compendiosa in opéra S. Thomas Aquinatis, Rome, 1925, du P. J. de Guibert, Les doublets de S. Thomas, Paris, 1926, et de J. Destrez, Études critiques sur les œuvres de saint Thomas d’Aquin d’après la tradition manuscrite, t. i, Paris, 1933.

P. Mandonnet, Bibliographie thomiste, p. xii-xvii, distribue les écrits de la manière suivante : I. Philosophie : 1° Commentaires sur Aristote (n. 1-13) ; 2° Œuvres diverses (n. 14-25). — II. Écriture sainte : 1° Ancien Testament (n. 26-31) ; 2° Nouveau Testament (n. 32-42). — III. Théologie : 1° Théologie générale (n. 43-46) ; 2° Dogmatique (n. 47-49) ; 3° Morale (n. 5062). — IV. Apologétique (n. 63-68). — V. Droit canonique (n. 69-70). — VI. Parénétique (n. 71-74 bis). — VII. Liturgie (n. 75).

M. Grabmann, dans Die Werke…, classe les œuvres de saint Thomas selon les genres littéraires. La liste suivante s’inspire des travaux de Mandonnet, Grabmann, etc. Sur les éditions et traductions des textes des œuvres thomistes, voir Bulletin thomiste, 1924 sq. ; surtout 1933, p. 80-84, 113-128 ; 1937, p. 61-79 et M. Grabmann, Thomas v. Aquin, 1935, p. 227-231.

Commentaires sur l’Écriture sainte.

1. In Job expositio (1261-1264), Mandonnet, 1269-1272.

2. 7/i psalmos Davidis lectura, jusqu’au ps. li inclusivement (1272-1273). Réportation par Réginald de Piperno.

7n Cantica canticorum expositio, perdu ; le texte Sonet vox tua est de Gilles de Rome, l’autre Salomon inspiratus d’un auteur préthomiste.

3. 7n Isaiam prophetam expositio (1267-1269), Pelster, 1252-1253.

4. 7/i Jeremiam prophetam expositio (1267-1269), Pelster, 1252-1253.

5. In Threnos Jeremiæ prophetæ expositio (12671268), Pelster, 1252-1253.

6. 7n evangelium Mallhœi lectura, réportation par Pierre d’Andria et Ligier de Besançon (1256-1259).

7. 7n evangelium Joannis expositio, c. i-v ; lectura, du c. vi à la fin, réportation par Réginald de Piperno (1269-1272).

8. Catena aurea (Glossa) continua super quattuor evangelia : Super Matthsum, dédiée à Urbain IV (12611264), Super Marcum, dédiée au card. Hannibald, (1265), Super Lucam (1266), Super Joannem (1267).