Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.1.djvu/323

Cette page n’a pas encore été corrigée
631
632
THOMAS D’AQUIN. LE DOCTEUR

misteti, Le Saulclioir, 1923, p. 1-18 ; P.-A. Walz, Ilistoria canonizationis S. Thomas de Aquino, dans Xenia thomistica,

t. iii, p. K>.-)-172, 173-188 (lmlle) ; J.-.I. Berthier, S. Thomas Aquinas, « doelor communis » Ecclesiæ, t. i : Testùnonia Ecclesiæ, Home, 1914 ;  !.. Lavaud, S. Thomas « Guide des études », Paris, 1925 ; Walz, Studi domenicani, Rome, 1939, p. 130-147 ; B.-H. Molkenboer, S. Thomas v. Aquino in der Schilderkunst, dans S. Thomas u. Aquino, éd. par A. von Winckelet F, von Goethem, Gand-Louvain, 1927, p. 143228, avec 131 clichés. Voir Bibliographie thomiste de Mandonnet-Destrez, n. 87-138 et le Bulletin thomiste, 1924-1937.

III. Biographies. On retiendra surtout celles do A. Touron, Paris, 1741 ; R.-W. Vaughan, 2e éd., Londres, 1890 ; J.-V. de Groot, 2 « éd., Utrecht, 1907 ; J.-A. Endres, Mayence, 1910 ; H. Petitot, Paris, 1923 (Irad. en italien et espagnol) ; P.-A. Walz, Delineatio vitæ S. Thomte de Aquino, Rome, 1927 ; E. de Rruyne, Rruxelles, 1928 ; A. Puccetti, Turin, 1928 ; A.-C. d’Arcy, Londres, 1930 ; R. Diaccini, Rome, 1934 ; I. Taurisano, Turin, 1941 ; A. Toso, Rome, 1942.

Voir les articles dans The Catholic Encyclopedia, t. xiv, 1912, p. 663-676 (Kennedy) ; Enciclopedia Uniuersal Ilustrada Europeo-Americana, t. LXII, 1928, p. 574-583 (Espasa-Calpe ) ; Enciclopedia Italiana, t. xxxiii, 1937, p. 1013-1020 (Pelster, Grabmann) ; Lexikon fur Théologie u. Kirche, t. x, 1938, col. 112-121 (Grabmann).

J. Maritain, Le Docteur angélique, Paris ; C.-K. Chesterton, Londres, 1933 (trad. en cinq langues) ; J.-H.-E.-J. Iloogveld, Nimègue, 1934, et autres introduisent surtout à la personne et aux doctrines de saint Thomas.

P.-A. Walz.

II. Le docteur et le saint. Caractéristiques générales. — Jusqu’à saint Thomas, la pensée chrétienne s’était développée le plus souvent dans la lumière supérieure de la sagesse mystique. La recherche rationnelle, visiblement animée par l’amour, semblait toute orientée vers la satisfaction des tendances les plus hautes de l’âme religieuse.

Le Docteur angélique semble au contraire se placer sur un plan strictement intellectuel et son effort ne paraît viser qu’à constituer par des procédés rationnels une science de Dieu tel qu’il s’est manifesté à nous par la Révélation. Depuis le Moyen Age cette attitude lui a valu bien des critiques. Luther, qui mettait en doute son salut, l’accusait d’avoir livré en pâture à la curiosité humaine les vérités que Dieu nous a enseignées pour nous sauver. Au temps du modernisme, tel auteur ne voyait en lui qu’un sage de type aristotélicien, oublieux du caractère essentiel à toute pensée chrétienne qui doit être avant tout un instrument de salut et de sainteté.

Sans se porter à des jugements si excessifs, beaucoup sont gênés par cet intellectualisme rigoureux. Il ne sera pas inutile, pour dissiper cette impression, d’exposer la conception propre à saint Thomas de sa mission doctrinale, et de caractériser sa sainteté dans ses rapports avec son office de docteur. Ce sera donner du personnage la connaissance indispensable à la bonne interprétation de son œuvre.

Mission doctrinale.

Saint Thomas, dans son estime pour l’enseignement sacré, n’hésite pas à l’assigner comme fin spéciale à la forme la plus haute de vie religieuse. II*-II ffi, q. clxxxviii, a. 6. Car il est un acte impéré par la charité dans son exercice, ibid., a. 1, qui par sa nature dérive de la plénitude de la contemplation. Ibid., a. 6. Sans doute l’acte d’enseigner, ordonné à la perfection du prochain, appartient à la vie active, IP-II*, q. clxxxi, a. 3, mais, pour connaître la vérité divine qui est son objet, il faut étudier, méditer et prier, afin d’obtenir de la voir dans la lumière de la contemplation. Ibid., a. 6.

Sa dignité suréminente est d’ajouter à la contemplation, sans la diminuer en rien, ibid., q. clxxxii, a. 3, ad 3° iii, la communication de ses fruits au prochain : Majus est contemplata aliis tradere quam solum contemplari. Ibid., q. clxxxviii, a. 1. Pour sentir com bien nous sommes loin ici du sage aristotélicien, il suffira de noter comment la charité, qui est à l’origine de cet effort studieux tout pénétré de prière, l’oriente vers le bien commun de l’Église. Contra impugnatorcs, c. u ; Quodl., vii, a. 18 ; II » —II « , q. clxxxiii, a. 2.

L’étude sacrée ne s’intéresse aux créatures que pour mieux connaître Dieu, II » —II", q. clxxx, a. 4 ; q. clxxxviii, a. 5, ad 3um ; Conl. Cent., !. II, c. ii, ou pour mieux réfuter les erreurs qui le concernent. Ibid., c. in. Or, c’est l’amour de Dieu qui applique l’intelligence à son étude:Et propler hoc Gregorius constitua vilam contemplalivam in caritute Dei, in quantum scilicet aliquis ex dilectione Dei inardescit ad ejus pulchriludinem conspiciendam. IP-IP’, q. clxxxviii, a. 1. L’amour ne se contente pas de vues superficielles sur la personne aimée, mais, occupé sans cesse à examiner intérieurement tous les détails qui la concernent, il veut pénétrer jusqu’au plus intime d’elle-même. Aussi l’Esprit qui est amour scrute-t-il les profondeurs de Dieu. Ia-IIæ, q. xxviii, a. 2. Cette constante méditation de l’esprit, toujours tourné vers le trésor du cœur, chasse toute pensée étrangère, ibid., a. 3, mais elle exige aussi une purification de toutes les puissances réalisée par les vertus morales. IP-II*, q. clxxxviii, a. 2. Une âme ainsi possédée par l’amour de Dieu et pacifiée intérieurement, pourra appliquer son intelligence à l’étude intense des choses divines qui est l’objet propre de la « studiosité ». Ibid., q. clxvi, a. 1, ad 2um. Cette vertu a pour but de rectifier l’appétit naturel de connaître pour le faire tendre vers sa fin qui est la connaissance de Dieu. Ibid., q. clxvii, a. 1 et 2. La charité est donc pour saint Thomas le motif qui applique le docteur à l’étude des choses divines.

Mais il importe de le remarquer, le docteur remplit dans l’Église une mission sociale. Coni. imp., c. n ; Quodl., vii, a. 18 ; II » —II », q. clxxxiii, a. 2. Son office est de subvenir aux nécessités spirituelles du prochain en lui communiquant les connaissances spéculatives et pratiques dont il a besoin pour atteindre sa fin surnaturelle, soit par l’enseignement, soit par la prédication. Sermon Rigans montes, éd. Mandonnet, t. iv, p. 494; Quodl., iii, a. 9. Le devoir lui incombe également de réfuter les erreurs (Rigans montes) et d’écarter les doutes qui mettraient la foi en péril. Serm. iii, éd. de Parme, t. xxiii, p. 228. L’usage de sa science à cette fin est une œuvre de miséricorde impérée par la charité, In IV m Sent., dist. XLIX, q. v, a. 3, qu. 3, ad l ura et 2um, plus méritoire que le ministère particulier des âmes, et qui aura comme récompense au ciel une auréole spéciale. La charité, au principe de l’effort intellectuel du docteur, le pousse donc aussi à communiquer sa science aux autres dans le désir de leur profit spirituel et du bien de l’Église. Ibid., q. iii, a. 9.

L’intellectualisme de saint Thomas paraît lui-même commandé par sa mission doctrinale. Lorsqu’un contemplatif comme Anselme se livre à l’étude, c’est. selon son expression, sub persona conantis erigere mentem suam ad contemplandum Deum. Prosl. Dans une telle perspective, la méditation même théologique prend une allure affective. Qu’un fils de saint François tel que saint Bonaventure s’installe sur la montagne de Sainte-Geneviève pour enseigner, il doit subordonner l’effort intellectuel à l’esprit de saint François. Le but de son activité scientifique sera donc : ut… hauriantur consolationes qux sunt in unione sponsi et sponsæ quæ quidem fit per caritatem… De red. artium ad theol., éd. de Quarracchi, t. v, n. 26, p. 328. Mais saint Thomas est docteur par vocation, Conl. Gent., t. I, c. ii, et il appartient à un ordre qui dès le début, fut un ordre de docteurs et de prédicateurs. Cf. P.Mandonnct-M. -H. Vicaire, Saint Dominique, l’homme, l’idée, l’œuvre, Paris, 1937, t. i, p. 76. La fin de son étude n’est plus de subvenir aux besoins même les