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THESSALONICIENS (ÉPITRES AUX). ESCHATOLOGIE


révélation ou parousie des antéchrists. Est-ce encore témérité de croire que les ténèbres eschatologiques se font un peu moins épaisses, si nous savons désormais qui sont les agents de Satan et qui sont les agents de Dieu, ce qu’ils font, à quelles fins et avec quels résultats’?


e) Les phases du retour du Christ. — a. La résurrection. — Dans sa catéchèse orale à Thessalonique, l’Apôtre n’avait pas touché ce point particulier qu’on pourrait appeler la liturgie du cortège final ou l’ordre des préséances ; à vrai dire il ne pouvait guère prévoir la difficulté. Aujourd’hui que la question se pose, voici la réponse, qui, du reste, dépasse la zone de la discipline et se rattache à l’enseignement doctrinal : résurrection des morts en premier lieu ; après quoi, organisation du cortège des morts et des vivants, qui se portera au-devant du Christ venant sur les nuées. I, iv, 13-18. Les morts ressusciteront, affirme saint Paul aux Thessaloniciens, inquiets sur le sort réservé aux néophytes défunts. Les chrétiens n’ont pas à pleurer comme les païens qui n’ont pas d’espérance ; certes les chrétiens ont la douleur aussi humaine que les païens ; mais ils la tempèrent par l’espérance d’un au-revoir prochain et durable au ciel. C’est sur la résurrection du Christ que saint Paul n’hésite pas à fonder la croyance en notre propre résurrection. Sans doute ne parle-t-il ici que de la résurrection des justes, oî vexpol èv Xpicrap, ꝟ. 16 ; parce que, seuls, ils intéressent les Thessaloniciens, mais la résurrection des pécheurs est implicitement attestée dans II, i, 7-10.

b. Le sort des derniers justes. — « Nous, les vivants, les survivants lors du retour du Seigneur », I, iv, 15, 17. Ces paroles soulèvent la question de la mort des survivants. Comme la consultation est muette à cet égard, on pourrait déjà conclure de cette prétention que les survivants ne mourront pas. Mais nous avons mieux que des déductions, puisque l’Apôtre s’en est expliqué franchement en des passages comme I Cor., xv, 51-52 ; II Cor., v, 4. Un enseignement dogmatique s’en dégage : les justes trouvés vivants au moment du retour ne mourront pas ; mais, avant leur ascension aérienne, ils recevront la transformation de l’immortalité qui sera pour eux ce que la résurrection sera pour les morts. I Cor., xv, 52.

c. La rencontre avec le Christ. — Au temps marqué, I, v, 1, au signal donné, à la voix de l’archange, au son de la trompette divine, I, iv, 15, Jésus redescendra du ciel, I, iv, 15 ; II, i, 7, escorté par les anges de sa puissance. II, i, 7-8. Paul insiste sur trois détails de la parousie : le signal donné, la voix de l’archange, le son de la trompette divine. Sont-ce trois détails différents ? ou désignent-ils la même chose ? Le procédé littéraire de l’Apôtre (hendiadis, hendiatris) suggère la seconde interprétation. Cette eschatologie ne renchérit guère sur les données de la Bible. Apportet-elle quelque précision au problème de la réalité ou du symbolisme de ces éléments ? Il faut répondre que notre curiosité reste toujours aussi peu satisfaite : « Dans quelle mesure ces allusions au passé (à la théophanie du Sinaï) se vérifieront-elles dans l’avenir, et quelle est la part de l’image et du symbole ? C’est le secret de Dieu ». Prat, op. cit., t. i, p. 89 ; cf. Magnien, Rev. bibl., 1907, p. 370-373. Nous ne sommes même pas certains que cette trompette, dont l’Apôtre assure avec une insistance tout oratoire qu’elle sonnera, I Cor., xv, 52, retentira réellement. Tout ce que nous pouvons dire, c’est qu’il y aura une mystérieuse et toute-puissante intervention de Dieu.

Le Seigneur redescend du ciel, où il se trouve depuis son ascension, Act., i, 9-11, mais sans atteindre la terre, puisque les élus se portent au-devant de lui dans les airs. I, iv, 18. Tous ensemble, ressuscites et survivants, seront enlevés, enlèvement violent et sou d fin qui doit s’attribuer, comme la résurrection, à la toute-puissance du Père, organisateur du cortège. Ils seront enlevés à la rencontre du Christ. Peut-être y a-t-il dans cette dernière expression une idée d’hommage rendu au Christ, puisqu’un papyrus l’emploie pour marquer la réception officielle d’un nouveau dignitaire. Magnien, ibid., p. 377. La rencontre a lieu dans les airs, dans les nuées (v. 17), autre élément indispensable de l’eschatologie, cf. Dan., vii, 13 ; Act., i, 9 ; Matth., xxiv, 30 ; xxvi, 64 ; Apoc, i, 7, et qui souligne l’idée de la gloire ou de la puissance mystérieuse (cf. le se khînâh du Tabernacle).

Ce qui arrive ensuite n’intéresse plus le problème envisagé dans cette consultation. Une fois en possession du Christ, pleinement assurés que la réunion n’aura plus de fin, t. 17, les néophytes ne désirent plus rien savoir : toutes autres circonstances de temps, de lieu, de décor, leur sont indifférentes ; personne ne se préoccupe de la direction que prend le cortège. Nous-mêmes, malgré notre légit’ine curiosité, nous sommes condamnés à la même ignorance.

d. Le jugement. — Le jour du retour sera aussi celui du jugement universel. II, i, 7-8 ; cf. II Cor., v, 10 ; II Tim., iv, 1. Où doit se tenir le jugement ? Si c’est sur terre, il est indiqué que le Christ continue à descendre et que les élus reviennent sur leurs pas. Si c’est dans les hauteurs, le cortège remonte ; à moins que ce ne soit exactement au lieu de la rencontre. Pures hypothèses ! Ce qui est certain, c’est que, à ces assises solennelles du jugement dernier décrites par le Sauveui lui-même, Matth., xxv, 31-46, la grande séparation se fera : saint Paul mentionne d’abord le châtiment des impies. II, 1, 8-9. Les pécheurs qui ne connaissent pas Dieu et n’obéissent pas à son saint Évangile seront punis de châtiments éternels. Ils subiront le châtiment de la ruine éternelle, ꝟ. 9 : l’éternité biblique est, suivant les cas, absolue ou relative, au sens d’une durée ; ici l’intervention divine se produisant à la fin du monde, le châtiment ne sera plus dans le temps. C’est tout ce que le texte dit, mais c’est déjà beaucoup. Enfin les pécheurs seront à jamais loin du Seigneur, v. 9, âizb Tcpoaâ)7tou toù Kuptoo. Par cette expression, le divin juge est mis en relation avec la ruine éternelle. Quelle relation ? Ce n’est pas une relation de temps, comme si le châtiment deva.l commencer au moment où le Christ montrera sa face ; ni une relation de cause, comme si le châtiment était infligé par le Seigneur ; c’est plutôt une relation d’espace : le châtiment consistera en la privation du Seigneur, avec le sens de « loin de ». Cette exégèse est motivée par les passages d’Isaïe, ii, 10, 19, 21 ; par le sens fréquent de la préposition ànô, Rom., ix, 3, anathème « loin du Christ » ; II Cor., xi, 3 ; Gal., v, 4 ; par l’analogie des textes évangéliques, Matth., vii, 13 ; xxv, 41 ; Luc, xiii, 27 : « éloignez-vous de moi » ; surtout par l’analogie de la doctrine eschatologique de saint Paul : les justes ayant pour récompense d’être toujours avec le Christ, I, iv, 17 ; v, 10 ; II, i, 7, il est tout indiqué que les méchants soient châtiés par l’exclusion de cette divine présence. Ces versets viseraient donc les peines de l’enfer et nous aurions une allusion formelle à la peine du dam. Serait-il question également du feu de l’enfer ? Qu’on ne se hâte pas de le conclure de l’expression èv TCupl çXoyôç. II, i, 8 (leçon préférable à èv çXoyl Trupôç, B. Y. D), dans un feu de flamme. Il ne s’agit pas du feu de l’enfer, comme le note Estius, ni même du feu de la conflagration générale. Calmet a trouvé la juste formule : « C’est le symbole de la engeance et de la coière, et même de la majesté de Dieu. » P, 331. Les prophètes nous ont habitués à ces manifestations symboliques, à ces épiphanies du Sinaï ou du désert, où le feu joue un rôle obligé. Gen., xv, 17 ; Ex., m, 2 ; xix, 16 ; Dcut., i, 30 ; N"um., ix, 15 ; Ps., lxxmii,