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    1. THESSALONICIENS (ÉPITRES AUX)##


THESSALONICIENS (ÉPITRES AUX). ESCHATOLOGIE

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chèse de saint Paul et de ses compagnons touchant le retour triomphal du divin Maître. Après le départ des missionnaires, leur imagination s’était occupée plus que de raison de ces événements prodigieux. Comme il arrive en pareil cas, elle avait vite outrepassé les limites de la vérité. La communauté en était venue à croire à l’imminence du retour du Seigneur. La mort récente de quelques chrétiens laissa les survivants dans une tristesse et une désolation excessives. En quoi consistait précisément cet excès dans les regrets des survivants ?

a. — Le P. Lemonnyer, après Schmiedel. pense que les Thessaloniciens n’avaient pas été instruits de la résurrection des morts. — Mais ces anciens juifs ou prosélytes « ne devaient pas ignorer un mystère qui était l’une des plus chères espérances de la Synagogue ». Magnien, Rev. bibl., 1907, p. 350-351. Et puis, s’il faut juger de la question par la réponse, l’effort de l’Apôtre ne va pas ici à établir la croyance en la résurrection des morts, comme I Cor., xv ; il insiste seulement sur le fait que, lors du retour de Jésus, les morts n’auront rien à envier aux vivants, ce qui suppose la résurrection universelle.

b. — Le P. Magnien, op. cit., p. 352-353, après Renan, Fillion, Schæfer, Le Camus, Crampon, pense que les regrets procédaient de préoccupations millénaristes. Les fidèles s’attendaient à jouir ici-bas, pendant une période plus ou moins longue, de toutes les délices du royaume messianique. Mais, si la mort les surprenait avant le retour, c’en était fait de ce bonheur tant désiré I Les frères endormis n’en seraient-ils pas à jamais frustrés ? De là cette désolation qui semblait égaler le deuil de ceux qui n’ont point d’espérance.

— La réponse est la même ; si les néophytes eussent été touchés de cette idée, nous le saurions par la réfutation de saint Paul. On trouve dans ses épttres maintes assertions doctrinales incompatibles avec le millénarisnie, jamais un argument direct. Et l’on sait que Paul n’avait pas coutume de passer à côté des erreurs ou des adversaires à combattre.

c. — À en juger d’après l’exposé de l’Apôtre, notre unique moyen d’information, l’inquiétude des néophytes venait de la fausse opinion que, le jour du retour, les morts seraient privés d’un avantage considérable, dont seuls bénéficieraient les vivants. Tandis que les vivants assisteraient et prendraient part à ce triomphe inouï, les morts ou bien arriveraient en retard ou en seraient exclus. Cet état d’esprit suppose évidemment que les Thessaloniciens attachaient une importance exagérée au côté féerique de la paroasie, peut-être au détriment de la vraie signification, qui sera la proclamation de la royauté universelle du Christ Jésus. L’Apôtre rétablit les faits en sa première lettre en traçant les lignes principales du programme aulhentiquement prévu pour cette solennité : vivants et morts seront également avantagés ; personne ne manquera au triomphe. I, iv, 13-18. Il semble que ces explications autorisées aient calmé l’émotion factice de la jeune communauté, mais sur un point seulement.

Elles ne firent qu’accroître chez ces néophytes leur hantise de la parousie imminente. Trompés par de fallacieux arguments, ils pensaient que leur génération verrait le retour triomphal de Jésus. Les paresseux propagèrent sournoisement cette rumeur et, pour accréditer leurs dires ou se couvrir aux yeux des frères moins enthousiastes, ils recoururent aux moyens classiques des illuminés. II, II, 1-2. Comment de telles Idées eu vinrent elles à troubler ainsi les espiits ? Cette persuasion que la fin du monde était prochaine, voire imminente, persuasion que d’ailleurs

les Theasalonicieni n’étaient pai seuls à part

cf. II Petr., iii, 9. semble venir de certaine ! paroles du

Christ et des apôtres qui. l’ill n’avaient pas prédit la

parousie comme prochaine, ne l’avaient tout de même pas déclarée éloignée, cf. Matth., xxiv, 34 : le terme lui-même de parousie n’éveillait-il pas l’idée d’un retour prochain du Christ (7tâpeiu.i) ?

c) La pensée de saint Paul. — L’Apôtre partageait-il les illusions de ses néophytes sur la proximité de la parousie et espérait-il voir de ses yeux le retour triomphal du Christ ? Certains textes mal interprétés ont pu le laisser croire, surtout I Thess., iv, 15 : « Nous vous disons ceci sur la parole du Seigneur : nous, les vivants, les survivants lors du retour du Seigneur, nous ne devancerons pas ceux qui sont morts. » Passage célèbre et difficile. La question, ardemment débattue entre exégètes ces dernières années, concerne la signification exacte de ces expressions « nous les vivants, les survivants ». I, iv, 15 et 17. Plusieurs solutions ont été proposées.

a. — Les critiques rationalistes y trouvent une affirmation catégorique de la parousie : Paul se serait trompé. Reuss, La Bible, Les épîtres pauliniennes, t. i, p. 54 ; Rovon, Théologie du N. T., t. ii, p. 288295 ; Guignebert, Manuel d’histoire ancienne du christianisme, p. 347-350. Mais le système ne tient compte que de quelques textes isolés de leur contexte et exagérés à plaisir. — b. — Par contre, quelques rares catholiques prétendent que, en aucune manière, la parousie ne serait envisagée comme prochaine : Romeo a soutenu récemment cette thèse : Nos qui vivimus, qui residui sumus, dans Yerbum Domini, 1929, p. 308-313 ; 339-348 ; 360-364 : Non tam parilas sortis, qute a nemine sanx mentis denegabatur, quam polius concomitantia et unio fulura hic describitur, quai rêvera valida immo unica consolationis ratio esse poterat… Objectum formate tolius pericopse consolatorise est fulura nostra gloriosa et Ixtissima congregalio cum nostris mortuis in resurrectione mortuorum, Christo prscsenle ac præeunte, p. 346-347. — Mais l’insistance nos qui vivimus, qui residui sumus ne se comprend que s’il s’agit de ceux que la parousie trouvera vivants, et les deux classes des morts et des vivants sont trop opposées pour rentrer l’une dans l’autre. Aussi une autre opinion estime-t-clle que Paul serait tombé dans la même illusion que ses néophytes ; il aurait, du moins au début de sa vie missionnaire, présenté l’imminence de la parousie sinon comme certaine, du moins comme vraisemblable, à titre de probabilité, de conjecture personnelle, sans donner un enseignement formel, jusqu’à ces dernières années, un grand nombre d’exégètes catholiques soutenaient cette opinion : A. Maier, Komm. tiber den Briej an die Romer, I-Yibourg, 1847, p. 387 sq. ; Bisping, Exegelisches llandbuch, in I Thess., iv, 12 sq. ; Corluy, Diction, apol. de Jaugey, art. Fin du monde, col. 1279-1281 ; La seconde venue du Christ, dans La science calh., 1887, p. 284-300, 337-346 ; Pesch, De inspiratione, Fribourg, 1906, p. 459, note 1 ; Le Camus, L’œuvre des apfltrcs, Paris. 1905, t. ii, p. 343, note 5 ; Prat, La théologie de saint Paul, t. i, p. 89 sq. ; Toussaint, I. i, p. 124 sq. ; surtout Tillmann. Die Wiederkunft Christ i ; Magnien, dans Rev. bibl., 1907, p. 365 ; Lemonnyer, t. I, 4° éd., p, 40 ; Diction, apol. d’A. d’Alès, art. Antéchrist, t. i, col. 1 19, et art. Fin du monde, col. 1916-1920. La Commission biblique, en son décret du 18 juin 1915. a condamné cotte explication comme contraire au dogme de l’inspiration et de l’inerrance biblique, en vertu duquel omne id quod hagiographas (inscrit, tnuntiat, insinuai, relineri débet asserlum, cnunlialum, insinuatum a Spinlu Sunclo. et pai coméquent sans qu’il soit permis de distinguer entre expressions de sentiments humains sujets a

l’erreur ou à l’illusion et « affirmations garanties par

l’inspiration >. On ne peut même pas dire, comme

Tillmann (p. 17), qu’il ne s’ayil pas en cette matière d’erreur dogmatique, mais simplement d’erreur chro-