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TANNER (ADAM’42

, opuscule sur la justification par la foi, en réponse à un ouvrage d’un prédicant de Ratisbonne, paru quelques semaines plus tôt ; Analomia confessionis Augustanæ, en deux parties : I. Lutherus, 1613, où l’on apprend à juger du luthéranisme par la valeur de son auteur, tel qu’il apparaît dans ses écrits ; II. Ecclesiasticus, 1614, où la doctrine des notes de l’Église est appliquée à l’Église luthérienne et à l’Église catholique. Puis — publication qui ouvre un jour intéressant sur la personnalité intellectuelle et morale de Tanner — voici une série d’études sur l’abbé Trithème. Le but en est de défendre la mémoire du célèbre polygraphe contre l’accusation de magie, et de révéler le véritable caractère de sa « Stéganographie ». Proposées d’abord sous forme de « Conclusions », en 1614, à l’occasion d’une promotion de docteur, ces études furent publiées ensuite sous le titre d’Astrologia sacra. C’est un premier excursus dans le domaine de la superstition. Il ne sera pas sans lendemain. Enfin en 1617 paraît le plus important ouvrage que Tanner ait écrit en allemand : Dioptra fidei. C’est une apologétique complète, destinée à faire pièce à un écrit protestant, très répandu alors en Autriche, la Confutatio de J. Faber. L’auteur déclare y utiliser des ouvrages déjà existants, qu’il cite d’ailleurs en toute conscience et loyauté, mais qu’il dépasse de beaucoup par sa science patristique et ses qualités de clarté et de précision.

En 1618 s’ouvre dans la vie de Tanner une nouvelle période. À la demande de ses élèves, il réunit cette année même en deux volumes, suivant le plan de la Somme de saint Thomas, toutes les thèses qu’il avait fait défendre à Ingolstadt. Ce sont les Disputalionum theologicarum… libri IV. Mais cette esquisse ne lui suffit pas. Il rive d’un grand ouvrage théologique adapté aux besoins de son temps. Pendant huit années il va se consacrer à l’écrire, d’abord à Vienne, où l’cmpereur Matthias le fait appeler pour succéder au P..Martin van der Becck (Becanus), comme professeur de théologie, puis de nouveau à Ingolstadt, dont la bibliothèque est irremplaçable pour lui. Fruit de vingt -cinq années d’enseignement, la Theoloqia scolaslica parait enfin en 1627 en 4 volumes in-folio.

Tanner doit alors se rendre à Prague, où il devient i bancelier de l’université récemment confiée aux . I » ’s 1 1 i 1 1 s. Toutefois sa santé n’est plus ce qu’exigerait pareille fonction. Au bout d’un an elle se révèle même si compromise qu’un séjour au Tyrol paraît s’imposer. On l’envoie donc au collège de Hal et, de fait, il y retrouve assez de forces pour qu’en 1631, il puisse revenir à Ingolstadt. Mais c’est la guerre qui maintenant va le chasser. Gustave-Adolphe est en Bavière et la i peste hongroise y sévit par surcroît. À la hâte Tanner reprend le chemin de son pays natal, et déjà il touche au but, lorsqu’il est atteint par la mort le 25 niai 1632, Agé tout juste de soixante ans.

II. Caractéristiques de sa théologie. — I" (.munir conlrooerstsle, Tanner fait preuve en général d’une grande objectivité, citant abondamment ses adversaires et les laissant ainsi exposer eux-mêmes leurs idées ; servi ensuite au mieux, dans la réfutation, par son érudition patristique et sa science de l’Écriture. Par ailleurs, sa maîtrise de lui-même et sa « nui toisie font île lui un des polémistes les plus humains de son l"iii|is. C’était la sans doute un fruit de l’ardent aniuiir des âmes qu’il avait au cœur, zèle qui se traduisait d’autre put d’une manière éclat aille par son Infatigable activité au service de la vraie religion.

2° Comme théologien scokutlque, il ne dispose pas d’une moindre richesse d’information. Sa connaissance de saint Thomas est d’ordinaire très sûre et cela est de conséquence, puisque i est la Somme qui lui sert de fil conducteur dans la Theologia etolattlea plus encore

que dans les dispulationes. Mais il suit le maître avec liberté, modifiant à l’occasion l’équilibre des parties, allongeant ou diminuant suivant les besoins, intercalant, quand il le juge utile, de longs développements nouveaux. Par ailleurs il se montre attentif à faire état, dans la discussion, de l’opinion des maîtres récents, surtout de ceux qui le touchent de plus près : Vasquez, Lessius, Valencia (dont il fut l’élève et dont il prétend modestement adapter les Commentaires aux questions récemment mises en lumière), enfin et surtout Suarez, dont on peut dire que Tanner s’est donné pour rôle de répandre les idées en Allemagne. Toujours il cherche autant qu’il le peut à mettre l’esprit de ses lecteurs en contact direct avec les pensées et les formules même des grands théologiens. Enfin, qualité plus éminente et plus rare, il a vraiment le sens de la théologie ; son objectivité n’est pas simplement celle d’un homme de science, elle est celle d’un théologien. C’est dire qu’à travers ses asserta concis, qui s’enchaînent les uns aux autres en une gradation claire et régulière, non seulement chaque progrès de la pensée apparaît avec sa valeur exacte, mais de plus on est toujours loyalement averti, quand la pensée de l’auteur quitte le domaine du dogme et de la certitude, pour entrer dans celui du système et de l’opinion personnelle.

3° Car on peut parler à son sujet d’une vraie personnalité doctrinale. Ses dons de penseur critique prendront même un singulier relief dans l’appréciation qu’il portera sur les procès de sorcellerie. Et, pour alléguer un autre exemple, si on lui a reproché de justifier l’usure, c’est qu’il a cherché sous les solutions compliquées un terrain solide, et a admis la légitimité du prêt à intérêt dans certains cas, en essayant de ramener les titres légitimes à ceux de certains contrats simples, t. iii, disp. IV, q. 7, dub. ni.

En revanche il reste de son temps lorsqu’il traite de la liberté de conscience. Seuls, en somme, les infidèles y auraient droit, en raison de l’ignorance invincible où ils peuvent être. Les hérétiques, eux, sont passibles de peines canoniques et civiles, y compris la peine de mort, l’excuse de la bonne foi ne leur étant pas accordée, encore qu’il puisse exister des cas d’hérésie matérielle, t. iii, disp. I, q. 8, dub. ix.

Pareillement, malgré son goût pour les mathématiques et les sciences naturelles, el même un intérêt passager pour les observations astronomiques, il demeure fermement attaché au système aristotélicien du ciel incorruptible et des sphères rigides unies par des anges, t. i, disp. VI, q. 3, dub. ii-m ; el il discute en cinquante-qualre colonnes les observations et les conclusions de Tycho-Brahé. S’il admet les premières, il nie énergiquement les secondes, s’appuyant contre Copernic sur le décret du Saint Office, Notons enfin. pour les historiens de la théologie, que notre auteur croit devoir refuser le privilège de l’immaculée conception à la vierge Marie, parce qu’elle n’a pas eu. en fait, les dons prétcrnaturcls qui accompagnent normalement la justice originelle, t. iv, disp. II. q. 1. dub. ii, n. 10.

III. Doctium : DE i.a crack. — Sur la prédestination et la grâce ou ne s’attend pas à voir Tanner Innover d’une manière sensationnelle. Ici l’orientation

générale de sa doctrine lui est imposée par les directives de son ordre. II n’en représente pas moins dans le molinisme une direction de pensée relativement originale, en raison de L’étude approfondie qu’il a faite

de la notion de science moyenne ». sur laquelle il a

cherché à centrer, s’inspirant de Suarez plus que de

Molina, tout son système de l’action de Dieu sur la créât me libre.

C’est presque dès ses premières p.pes ipie la Theologia tCOlaattCH aborde le sujet. À propos des objels île