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THÉORIEN — TIIEOSOIMUE
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négociations pour l’union devaient échouer par suite de la mauvaise volonté du clergé grec. Au même moment le basileus entreprenait la réconciliation avec l’Église impériale des dissidences monophysites : jacobite et arménienne. C’est dans ces conjonctures que Théorien fut envoyé au catholicos d’Arménie. Une première prise de contact eut lieu en mai 1170 et les discussions commencèrent aussitôt sur les différends, d’ordre dogmatique ou liturgique, qui séparaient les deux Églises et dont le catholicos avait donné le détail dans une lettre envoyée par lui au basileus. Au point de vue du dogme, le point crucial était la renonciation de l’Arménien à la formule de « l’unique nature » et l’admission de Chalcédoine. C’est là-dessus que porta le fort de la discussion où Théorien fit montre de réelles qualités de théologien et de polémiste. Il s’était parfaitement assimilé non seulement la terminologie et la dialectique où s’appuyait la théologie orthodoxe, mais était bien au courant de la littérature patristique. L’essentiel était de convaincre le catholicos, qui était d’ailleurs acquis à l’idée d’union, qu’entre chalcédoniens et monophysites il n’y avait qu’une question de vocabulaire, que la doctrine des deux natures était admise de part et d’autre, quoi qu’il en fût de la manière dont on s’exprimait. À côté de cette divergence de fond il restait des points tout à fait secondaires et reconnus comme tels par les deux parties : selon les Arméniens, le Verbe incarné aurait séjourné au sein de la Vierge neuf mois et cinq jours ; la fête de la nativité de Jésus se célébrait le 6 janvier en même temps que celle du bapième ; à la fin du Trisagion on ajoutait : « qui a été crucifié pour nous » ; pour la confection du saint-chrême on employait non de l’huile d’olives, mais de l’huile de sésame ; on admettait comme règle que les églises étaient réservées exclusivement à la célébration du sacrifice et que les fidèles, durant cet acte, devaient se tenir au dehors. Sur ces divers points Théorien établit le bien fondé de ce qui se faisait dans l’Église grecque.

Cette première prise de contact amena la rédaction par le catholicos d’une lettre secrète à Manuel, où il déclarait recevoir le concile de Chalcédoine. Théorien la rapporta à Constantinople et revint, deux ans plus tard, avec une lettre du basileus et une autre du patriarche Michel III ; l’un et l’autre pressaient le catholicos de faire adhérer le synode de l’Église arménienne aux vues du catholicos. Tout ceci fut exposé par Théorien devant une assemblée assez restreinte de prélats, qui se montra d’ailleurs plus difficile à convaincre. Outre les différends dogmatiques furent évoquées de nouvelles divergences en matière de culte : Théorien attachait beaucoup d’importance au fait que les Arméniens ne mêlaient pas d’eau au vin de la messe : sans eau, disait-il, il manque quelque chose à la divine liturgie : aveu yàp aÙToG TeXeîa Ispoupyîa où yîvETai., col. 257 C ; par contre il n’avait pas d’objections graves contre l’emploi que faisaient les Arméniens du pain azyme. On revint encore à la question de la célébration des fêtes, pour laquelle il était bien souhaitable que les Arméniens se rapprochassent de l’usage général. Les demandes de Théorien sont récapitulées en une sorte d’aide-mémoire, col. 269 AB, où l’on remarquera le dernier point : confirmation par le basileus de l’élection du catholicos. Théorien reconnaissait ; d’ailleurs, que toutes ces exigences n’étaient pas mises sur le même pied et qu’il pourrait y avoir lieu à transaction sur l’une ou l’autre. Narsès promit de soumettre ces divers points au concile général de sa nation ; mais il lui fallait en plus s’entendre avec le catholicos d’Albanie, sans lequel il ne pouvait rien décider. Cf. col. 272 B.

Au retour Théorien se rencontra avec un délégué du catholicos des jacobites. Le seul point difficile avec

cette Église, c’était de lui faire rejeter la Mîa cp’joiç ; la dialectique du |jia’fo- : wp byzantin eut à se mesurer avec celle, non moins redoutable, d’un philosophe dissident. Four les questions de calendrier, de rites, etc., il n’y avait point de divergences sérieuses entre jacobites et grecs.

A tous égards ces divers comptes rendus, pris sur le vif, sont intéressants ; ils témoignent en particulier du fait, déjà signalé ici au vocable Monothysiti :, que les divergences doctrinales entre l’Église byzantine et les dissidents s’étaient bien atténuées et que seul l’esprit de contention ou, si l’on veut, l’attachement aveugle à la tradition maintenait le schisme. De cet esprit de contention Théorien, pour son compte, n’était pas la victime. Il s’est conservé de lui une lettre — publiée seulement en partie — qu’il adressait à des moines byzantins, pour leur demander de traiter les Latins comme des frères : « Ils sont orthodoxes, ils sont fils de l’Église catholique et apostolique. Les discussions que nous avons ensemble ne touchent pas à la foi. Ni chez eux, ni chez nous il n’y a rien dans les coutumes ecclésiastiques qui s’écarte du bien et de l’honnête. Et Théorien visait surtout l’usage des azymes, reconnaissant volontiers que c’était là une question accessoire. Azyme ou fermenté, le pain de l’eucharistie est apte à devenir par la consécration et l’épiclèse le corps du Seigneur ; de même que peu importe la couleur du vin employé à la messe, de même peu importe que le pain eucharistique soit ou non fermenté. Cette largeur de vues de Théorien ne se retrouvait pas malheureusement chez beaucoup d’ecclésiastiques byzantins. L’opposition se monta contre Manuel Comnène ; la mort du basileus (1180) fut suivie à Constantinople d’une vive réaction contre les tentatives d’union. Elle emporta les espérances que l’on avait fondées soit pour l’Occident, soit pour l’Orient. L’union avec l’Église arménienne, à laquelle avait travaillé Théorien, fut indéfiniment ajournée.

La première Disputatiu publiée d’abord par Leunclavius, Bâle, 1578, mais assez incomplète, l’a été une seconde fois par A. Mai dans Scriptor. veter. noua collectio, t. vi, qui a édité pour la première fois la seconde. Le tout reproduit dans P. G., t. cxxxiii, col. 120-29 7. La lettre aux ermites grecs n’a été publiée que fragmentairement : en voir des débris dans P. G., t. cxxxiii, col. 297, note 43 ; t. xciv, col. 405-409 et col. 85-86 où. l’on trouvera le début, qui indique le sujet de la lettre : les divergences entre Grecs et Latins sur le jeûne du samedi, les azymes, le mariage des prêtres, le port de la barbe.

Voir Fabricius-Harles, Bibl. græca, t. XI, p. 281 ; A. Ehrhard, dans Krumbacher, Gesch. der byz. Litcratur, 2e éd.*, p. 88.

É. Amann.
    1. THÉOSOPHIE##


THÉOSOPHIE. — I. Caractères généraux et origines. IL Écoles théosophiques (col. 543). III. Les enseignements théosophiques et la doctrine chrétienne (col. 546).

I. Caractères généraux et origines.

1° Généralités. — Sous le vocable de théosophie, dérivé du grec 0s6ç, Dieu et soçloc, science, devons-nous chercher une religion, comme l’affirme une de ses plus ferventes adeptes, Mme Annie Besant, Introduction à la théosophie ? Ou faut-il ne voir dans son enseignement qu’une spéculation philosophique, une étude des croyances religieuses comparées, selon l’opinion d’une non moins notable adepte de cette doctrine, Mme Blavatsky, The Key lo Theosophy ? Ces deux opinions s’accordent dans le fond plutôt qu’elles ne s’excluent apparemment. « La théosophie, nors dit le programme de la « Société théosophique », peut être définie comme l’ensemble des vérités qui forment la base de toutes les religions. » « Elle éclaire les Écritures sacrées de toutes les religions, en révèle le sens caché et les justifie aux yeux de la raison comme à ceux de l’intuition. » Elle se.