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THÉOPHILE D’ANTIOCHE

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déjà proclamé la béatitude des cœurs purs, parce qu’ils verront Dieu. Mais il les dit avec une assurance et une clarté qui ne sauraient guère être dépassées.

Où faut-il s’adresser pour trouver la vérité? Aux Livres saints qui ont été inspirés par l’Esprit-Saint. Saint Théophile se plaît surtout à citer le témoignage de l’Ancien Testament, des prophètes qui ont annoncé l’avenir, mais qui ont aussi rappelé les grandeurs de la création. Il parle ainsi de l'Écriture sainte, de l'Écriture divine, de Salomon le prophète, etc. Beaucoup plus rarement il fait appel au témoignage du Nouveau Testament : il cite une fois, Ad Autol., ii, 22, le prologue de saint Jean ; en dehors de là, les seules traces de l'Évangile que l’on relève chez lui sont une citation du discours sur la montagne, Ad Autol., iii, 13-14, et peut-être de saint Luc, xviii, 27. Ad Autol., ii, 13. Par contre, il est important de souligner que, pour lui, le Nouveau Testament est aussi bien inspiré que l’Ancien, i De là vient, écrit-il, l’enseignement des saintes Écritures et de tous les inspirés, de Jean par exemple, qui dit : Au commencement était le Verbe. » Ad Autol., ii, 22. La parole ds Paul, dit-il ailleurs, est aussi une parole divine, 6eîoç Xéyoç. Ad Autol., iii, 14. Personne avant lui n’avait affirmé avec la même clarté l’inspiration des livres du Nouveau Testament.

Les Écritures nous révèlent avant tout l’unité de Dieu. Dieu est éternel, tout puissant, créateur du ciel et de la terre : « Tout d’abord les prophètes nous ont enseigné d’un commun accord que Dieu a créé l’univers du néant. Car rien ne lui est contemporain, mais lui, qui est à lui-même son bien, qui n’a besoin de rien, qui existe avant tous les siècles, a voulu créer l’homme pour être connu de lui. » Ad Autol., ii, 10. Saint Théophile insiste beaucoup sur l’idée que Dieu ne peut pas être contenu dans un lieu, qu’il n’y a pas de lieu où il se promène et où il se retire pour prendre son repos. Ad Autol.. ii, 22. Les anthropomorphismes de la Genèse l’obligent à cette insistance et tout autant la nécessité de-montrer à Autolycus la spiritualité de Dieu.

Bien qu’il soit unique, Dieu est pourtant Trinité. Saint Théophile, nous l’avons déjà remarqué, est le premier à employer le mot de rpidcç et il le fait sans nous prévenir, sans paraître y attacher d’importance, comme la chose la plus naturelle du monde, ce qui nous amène à conclure que ce mot était déjà usuel dans le milieu antiochien : Les trois jours qui ont eu lieu avant les astres sont des images de la Trinité de Dieu, de son Verbe, de sa Sagesse. » Ad Autol., ii, 15.

Sur Dieu, c’est-à-dire sur la première personne de la sainte Trinité, Théophile n’insiste pas autrement. Il développe au contraire, en commentant le récit de la création, le rôle du Verbe : » Dieu donc ayant son Verbe intérieur, £v8tà6erov, en ses entrailles, l’a engendré avec sa Sagesse, le proférant avant l’univers. Il se servit du Verbe comme d’un aide, ÛJtoupyoç, dans l< i m livres qu’il lit ei c’est par lui qu’il a tout fait. Ce Verbe est dit principe, ipxh> parce qu’il est principe et rieur de toutes les choses qui ont été faites par lui. » Ad Autol., ii. 10.

Le Verbe est le Fils de Dieu : « Il n’est pas son Fils,

au sens OÙ les poêles et les mythograplies racontent que les (ils (les dieux sont nés de rapports sexuels, mais selon que l.i vérité nous décrit le Verbe intérieur existant toujours dan le cœur de Dieu. Car, avant que rien fût produit, il avait ce Verbe comme conseiller, lui qui "ii intelligence et sa pensée. Mais, quand Dieu Voulu) (.lin ce qu’il avait projeté, il engendra le Verbe en le proférant, premiei né de toute la création. Pal là, Dieu m-se priva pis lui même de son Verbe, mais il idra son Verbe et s’entretenait toujours avec lui. Ad Autol., ii, 22.

<>n peut d’abord relever ici remploi des tenues tech Bique /', -', : - -. :. Verbi

proféré et Verbe intérieur, pour désigner les deux états du Verbe après et avant la création. La doctrine ellemême n’est pas nouvelle ; mais nul des apologistes antérieurs, du moins dans les ouvrages que nous avons conservés, n’utilise ces expressions qui étaient couramment usitées dans la philosophie stoïcienne. Il est curieux que saint Théophile les adopte sans donner aucune explication, ce qui permet de supposer que ses lecteurs étaient à même de les comprendre et même que, dans l'Église d’Antioche, elles étaient déjà employées.

Quant à la doctrine que traduisent ces formules, saint Théophile l’a reçue de ses devanciers. Avant la création, de toute éternité, Dieu possède son Verbe intérieur, sa raison. Puis, pour créer le monde, il le profère et le Verbe devient parole. Peut-on dire que le Verbe intérieur possédait déjà la personnalité, ou bien qu’il ne l’a acquise qu’en devenant Verbe proféré? Il est difficile de répondre à la question : « Saint Théophile décrit le Verbe intérieur comme le conseiller de Dieu, mais il ajoute aussitôt qu’il était son intelligence et sa prudence ; puis il déclare : Quand Dieu voulut faire ce qu’il avait projeté, il engendra le Verbe en le proférant premier-né de toute la création. Ainsi certaines expressions sauvegardent l'éternelle personnalité du Verbe ; d’autres la compromettent ; si on les presse, on se représentera le Verbe de Dieu comme étant d’abord son intelligence, sa prudence ; puis, quand Dieu veut créer, il l’engendre en le proférant. Cette génération, intimement liée à la création, a comme elle le caractère d’un acte temporel et libre. Il faut reconnaître dans tout cela beaucoup de confusion. » J. Lebreton, Histoire du dogme de la Trinité, t. ii, p. 511.

Il est difficile de mieux traduire l’impression que l’on éprouve en lisant les textes de Théophile. Évidemment l’apologiste ne s’est pas posé le problème de la même manière que nous et il n’a pas été par suite sensible aux difficultés que nous soulevons nous-mêmes. L'Évangile de saint Jean fait du Verbe l’instrument de la création. La Genèse montre l’efficacité de la parole de Dieu. Il est naturel de conclure qu2 le monde est créé dès que Dieu profère la parole et par suite que Dieu n’a parlé que pour créer. D’ailleurs la parole de Dieu subsiste avec lui : en la proférant, Dieu ne se prive pas d’elle, mais il l’engendre et la garde auprès de lui.

Le Verbe, une fois proféré, est particulièrement l’instrument de Dieu pour toutes ses œuvres extérieures. Cest lui. par exemple, qui « prend le rôle du l'ère et du Seigneur de l’univers, c’est lui qui se trouvait dans le paradis, y jouait le rôle de Dieu et s’y entretenait avec Adam. Et en elîet. l'Écriture divine elle-même nous enseigne qu’Adam dit qu’il entendit la voix. Or, une voix, qu’est-ce autre chose que le Verbe de Dieu, qui est aussi son Mis ? » Ad Autol., n. 22. Dieu ne quitte pas le ciel. Il ne se manifeste pas dans un lieu, (/est le Verbe qui parle à Adam et qui se promène dans le paradis.

C’est aussi le Verbe qui inspire les prophètes : Ce Verbe donc, étant esprit de Dieu et principe et sagesse et puissance du Très Haut descendait dans les pro phètes et par eux énonçait ce qui regarde la créai ion du monde et tout le reste. Car les prophètes n'étaient pat quand le monde fut fail. niais seulement la S.i

gesse qui esi en lui. la Sagesse de Dieu et son Verbe

saint qui est toujours avec lui. i </ Autol., II. III. Nous sommes aujourd’hui plus habitués à attribuer

l’inspiration au Saint Esprit, la pensée de Théophile

lui même semble un peu hésitante, puisque dans le

passage quc nous venons de citer, il parle en même temps du Verbe et de la s.iuessc comme inspirateurs

des prophètes.

Sous le nom de Sagesse <n effet. I’e cqne il' l ioi he