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THÉOLOGIE. GENÈSE ET NÉCESSITÉ


nous, chaque nature ayant son mode propre de connaissance, déterminé par son objet connaturel. Cf. saint Thomas, In I" m Sent., prol., a., 1 sol. et ad l nm ; a. 3, sol. 1 ; In J/ um, prol. ; In Boet. de Trin., prol., q. ii, a. 2 ; q. v, a. 4 ; Cont. Gent., t. I, c. m et vin ; t. II, c. iv ; t. IV, c. i ; Sum. theol., I », q.xii, a. 12.

Dieu, qui est l’Être même et l’Infini parfait, a pour objet propre et connaturel soi-même ; le mode de sa connaissance est de se connaître lui-même intuitivement et les autres choses à partir de lui et en lui, comme des participations de lui-même. La science divine suit ainsi, parce qu’elle le crée, l’ordre en soi des choses et de leur intelligibilité.

Notre objet connaturel, qui est au niveau de notre propre ontologie, est la quiddité des choses sensibles, la nature des choses physiques. Notre connaissance va de l’extérieur à l’intérieur, des choses moins premières et moins intelligibles en soi aux réalités plus premières et plus intelligibles. C’est ainsi qu’elle atteint Dieu, comme cause efficiente, exemplaire et finale des choses sensibles, dans une connaissance analogique, liée à son objet connaturel, la quiddité des choses sensibles. On a, depuis le xve siècle, semble-t-il, donné le nom de « théologie naturelle » à cette connaissance de Dieu par la raison à partir de la connaissance que nous avons des choses créées.

La connaissance que Dieu a de lui-même est, par grâce, communiquée aux hommes. Elle l’est d’une manière parfaite, pour autant du moins que cela est possible à des créatures et d’une façon qui comporte des degrés, dans la vision béatifique. Elle l’est d’une manière imparfaite dans la foi surnaturelle. La foi est une réalité des choses que l’on espère, une ferme assurance de celles qu’on ne voit pas ». Hebr., xi, 1. Elle est une puissance de perception des objets ou plutôt de l’objet connaturel à Dieu lui-même. Mais, si elle est une « ferme assurance », si elle est le germe de la vision et si elle a en soi, dès maintenant, l’efficacité d’atteindre le mystère de Dieu lui-même comme objet, la connaissance de la foi est conditionnée en nous par une communication extérieure d’objets, qui s’opère par la Révélation. Dieu se dévoile à nous et nous parle de lui ; il le fait en une manière proportionnée à notre condition d’hommes, c’est-à-dire, d’un côté, selon un mode collectif, social, d’un autre côté, en un langage d’hommes, en des images, des concepts et des jugements pris parmi les nôtres. Dieu choisit, dans le monde de notre connaissance naturelle, des choses, des concepts et des mois qu’il sait et qu’il nous garantit, par le fait, être des signes non menteurs de son propre mystère. Ainsi est ce à travers des images, des concepts et des jugements de même type et de même extraction que les nôtres, que notre foi passe pour adhérer au Dieu même qui est notre destinée totale. (.v n’est que dans les images, les concepts et les formules de la Révélation et du dogme que la foi peut percevoir son objet ; mais, a travers la précarité et l’insuffisance des voiles verbaux qui ne révèlent Dieu qu’imparfaitement, la foi tend a une perception moins imparfaite de Dieu ; cf. S. Thomas, Dr oeril., q. xiv, a. 8, ad 5 om ; ad ll° m ; Sum. theol., II » -II », q. i. a. 2. ad 2° » ; In III"" Sent., dist. XXV, q. i. a. 1. sol. |, ad l 1 " » ; II » - II », q. i, a. (> : Articulas est perceptio divitur verilatis, tendent m ipsam.

Cette tendance à une perception pi us complète de la Vérité divine s’opère dans une activité de l’homme il répondant a l’avance de Dieu. Dans cette activité le croyant achevé l’œu re de Dieu en Joignant vltalement son activité au don qu’il a reçu. Ainsi VOyons-nous naître une troisième connaissance de Dieu, qui n’est plus ni purement divine, ni purement humaine, mais divino humaine ou t h. andrique (.

plu la connai >i.one pur< ment philosophique de

DICT. DE THÉOL. OATIIOL.

Dieu, obtenue par notre seul effort et limitée à ce que les créatures nous disent de lui. Ce n’est plus la connaissance proprement divine communiquée dans la vision intuitive et, ici bas, d’une manière inchoative et imparfaite, dans la foi. C’est une connaissance qui, partant de la foi et en exploitant le donné, tend, par un effort où l’homme apporte à Dieu une réponse active, à mieux percevoir l’objet divin livré dans la grâce et les énoncés de la foi.

Mais cet effort de perception de l’objet révélé peut se faire par deux voies différentes qui sont, aussi bien, les deux voies du progrès dogmatique : il peut se faire par la voie de la contemplation surnaturelle, sur la base d’une union affective à Dieu ; ou bien par la voie de la contemplation théologique, sur la base d’une activité de connaissance de mode rationnel et discursif. Ces deux voies sont caractérisées par deux manières différentes de posséder le principe, qui est Dieu en son mystère surnaturel. Dans le premier cas, l’âme le possède et lui est unie par mode d’expérience ; elle pénètre davantage l’objet de la foi par la charité ; ce n’est pas tant elle qui travaille le mystère de Dieu que ce mystère qui la travaille intérieurement, se la rendant vitalement accordée, conforme et sympathique. Dans la théologie de saint Thomas, cette activité de perception par mode vital est attribuée plus spécialement aux dons du Saint-Esprit, surtout aux dons d’intelligence et de sagesse. Sum. theol., II » -II">, q. iv, a. 8, ad 3um ; q. viii, a. 5, ad 3um.

Dans la seconde voie, on possède Dieu en son mystère, non plus dans l’ordre de la connaturalité vitale, mais dans celui de la connaissance, qui est celui d’une conformité intentionnelle à l’objet. La pénétration de celui-ci se fait par un travail proprement rationnel, où nous sommes actifs et non plus passifs et où chacun peut profiter du travail d’autrui et communiquer ses propres acquisitions. L’amour, certes, intervient dans ce travail, mais c’est seulement comme en toute activité, à savoir comme moteur. Sum] ^heoL, , Ia-IIæ, q. xxviii, a. 2, corp. ; II a -II", q. ii, a. lO.corp. Formellement, la pénétration de l’objet se fait par l’activité, avec les ressources, selon les lois et les méthodes de l’intelligence ou, plus précisément, de la raison. C’est à cet ordre qu’appartient la théologie, qui est contemplation proprement intellectuelle et de mode rationnel des enseignements de la foi. Cf. Sum. theol., I », q. i, a. 6, ad 3um ; II » - II », q. xlv, a. 1, ad 2° m. Dans la contemplation théologique, la foi se développe et rayonne dans l’homme selon le mode de celui-ci, qui est rationnel et discursif ; elle se développe et rayonne dans sa raison, y prenant la forme et obéissant aux exigences d’un savoir humain. Parmi ces exigences, il en est deux surtout qui donneront à la théologie son allure propre : une exigence d’ordre et une exigence d’unité dans les objets de connaissance.

Exigence d’ordre et de hiérarchie.

D’un côté.

Dieu a fait toutes choses avec ordre et mesure. Cet ordre procède de la science créatrice de Dieu. De la science de Dieu, cet ordre passe non seulement dans ses œuvres, mais dans sa Parole, qui nous communique quelque chose de cette science : ainsi, tandis que nous déchiffrons quelque chose de l’ordre de la création et de la science de Dieu dans le livre « le la nature ». nous en recevons une autre connaissance dans la Révélation à laquelle nous adhérons par la foi. Or, cette foi est celle d’un homme dont la raison porte dans les objets qui lui sont proposés de légitimes exigences d’intelligibilité et d’ordre, l.a foi n’est pai de la compétence « le la pure raison, mais, de quelque manière qu’il la

reçoive, lorsque l’homme s’y est ouvert, elle réclame

de lui la soumission de tout lui même et occupe jusqu’à ion. (.elle ci ne peut donc refuser de l’accepter

et. puisqu’elle ne peut davantage abdiquer les exigen T. — XV. — 15.