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THÉODORET. L’EUCHARISTIE, LA TRINITÉ


est au dessus de tout soupçon et les condamnations du concile de 553, dictées par des raisons d’ordre politique, n’atteignent pas la doctrine qu’il a enseignée.

L’eucharistie.

De la doctrine christologique de

Théodoret, il faut rapprocher sa doctrine eucharistique, car c’est en pensant au Christ que l’évêque de Cyr a étudié les mystères de la présence réelle et de la transsubstantiation. Il faut noter d’abord, sans avoir besoin d’y insister, que Théodoret est un témoin de la foi commune de l’Église pour tous l ?s points qui sont l’objet de cette foi. Il enseigne que la présence du Christ dans l’eucharistie lui permet d’être sacrifié sans sacrifice, distribué sans division, consommé sans destruction. In psalm. LXII, 3, P. G., t. lxxx, col. 1337. II exige que l’on soit pur pour porter à sa bouche le corps de Jésus-Christ, bien qu’il attribue spécialement à la communion la vertu de remettre les péchés. In episl. I ad Cor., xi, 27, t. lxxxii, col. 317 ; In Isaiam, vi, 6, t. lxxxi, col. 268.

Sur la conversion seulement, il présente quelques enseignements importants. On sait que certains eutychiens admettaient dans le Christ une confusion des deux natures ou la conversion de l’une des deux natures en l’autre et par suite la passibilité de la nature divine. Théodoret s’élève contre cette dernière erreur et il indique pour la réfuter le rite de la Cène. « En divisant l’eucharistie comme type de sa passion, toû TctxOouç tov tùttov, Jésus-Christ n’a pas parlé de sa divinité, mais bien de son corps et de son sang. « Ceci « est mon corps, ceci est mon sang », c’est donc le corps qui a été crucifié, qui a soulïert, non la divinité

Le monophysite qui discute contre l’orthodoxe ne se tient pas pour battu. Il argue au contraire de l’eucharistie pour démontrer que le corps du Seigneur, après l’ascension, a été transformé en la divinité. Avant l’épiclèse, dit-il, on n’a sur l’autel que du pain et du vin ; après la consécration, on appelle les oblats le corps et le sang de Jésus-Christ, et on les reçoit comme tels dans la communion. « De même donc que les symboles du corps et du sang du Seigneur sont une chose avant l’épiclèse sacerdotale et après l’épiclèse sont convertis et deviennent autre chose, ainsi le corps du Seigneur, après l’ascension, a été converti en la substance divine, i Eran., Il, t. lxxxiii, col. 1C8 B.

Théodoret n’accepte pas le raisonnement de son adversaire ; il n’accepte même pas ses prémisses. Suivant lui, le fait invoqué est faux : < Après la sanctification, les symboles mystiques ne perdent pas leur nature propre ; ils demeurent et dans leur substance première ci dans leur apparence et dans leur forme, visibles et tangibles comme auparavant. On ne peut que concevoir ce qu’ils deviennent et le croire et l’adorer, comme s’ils étaient ce qu’on croit. » Ibid.

Mais alors, que se passe l il dans le pain et dans le Vin, puisque les noms sont changés, puisque le pain n’est plus appelé pain, mais corps du Christ’.' Théodore ) ne peut échapper a cette question et il essaye de la résoudre dans le premier dialogue de Y Lranistes. Il est vrai, dit-il, que le pain et le vin sont appelés corps el sang ; niais il l’est aussi que le Christ s’est appelé lui-même vigne et qu’il a donné à son corps le nom de ftro ment. Les Initiés comprennent ce changement de nom : Le Christ voulait que (eux qui participent aux divins mysl ères ne s’al I æ liassent pas a la nature de ce qu’ils voient, mais, considérant les changements de noms, qu’ils eussent foi en la conversion qui est le lait de la grâce, 7TIOTCÛCIV -f, iv. ~’r, c gàflTOC, Y*Y cv7 W i ^ v 7] Car, s’il a appelé son corps naturel froment I pain, comme il l’est appelé lui même vigne, il a honoré les symboles qui se voient du nom de corps el de sang, non pas qu’il ait changé la nature, mais parce

qu’il a a joli le la grâl I a la liai m e. / m ; /L. |. col. 56. « I.a consécration opère donc une |xrro60XV), Mais

DtCT. D1 i i’i"i ( miioi..

cette jX£Ta60XTj n’est pas la conversion au corps de Jésus-Christ de la substance du pain : cette substance acquiert seulement une grâce, une dignité qui lui vient de son union avec le corps du Sauveur produit et présent, union qui permet entre le pain et le corps cet autre échange d’appellation que l’on constate. Théodoret n’insiste pas sur la production, dans la consécration, du corps de Jésus-Christ : c’était un point acquis ; mais il nie que cette production soit le résultat d’une conversion des oblats et il explique que ces oblats sont, vis-à-vis du corps de Jésus-Christ dans une relation analogue à celle où l’humanité de Jésus-Christ se trouve par rapport à sa divinité. De ce corps, il découle encore une vertu ou une grâce qui les sanctifie sans changer ni détruire leur nature. » J. Tixeront, op. cit., p. 250.

Ce système nous surprend un peu, mais pour le comprendre, il faut se placer dans la perspective christologique de l’évêque de Cyr. De même qu’il y a deux natures dans le Christ, il reste en quelque sorte deux natures dans le pain consacré. Celui-ci ne cesse pas d’être du pain ; mais l’union qu’il contracte au corps du Sauveur est assez étroite pour être indestructible et pour former un tout inséparable. On pourrait ici parler d’union physique.

Sur le sacrifice eucharistique, Théodoret n’a que quelques lignes. Il remarque que le Sauveur a inauguré à la Cène l’exercice de son sacerdoce, qu’il continue d’exercer comme homme par le ministère de l’Église, alors qu’il reçoit, comme Dieu, l’offrande du sacrifice. 7/î psalm. OIX, 4, t. lxxx, col. 1772-1773. Il y a donc dans l’Église un sacrifice divin et non sanglant (Ma xoa àvaîji.axTOÇ Ouaia, dont Jésus-Christ est le piètre principal, dont la victime est aussi le seul agneau immaculé qui porte les péchés du monde. In Malach., i, 11, t. lxxxi, col. 1968. Tout cela n’a rien d’original, et Théodoret se contente de parler ici en représentant de la tradition.

La Trinité.

Sur les autres dogmes, il est possible

de passer plus rapidement. En ce qui regarde la Trinité, Théodoret n’ajoute pas grand’chose à ce qu’il a appris de ses devanciers. Il condamne les ariens et les macédoniens, à la réfutation de qui il consacre des ouvrages spéciaux, perdus d’ailleurs. Avec toute l’Église, il prolesse que les trois personnes de la Sainte Trinité sont consubstantielles et ont droit à la même adoration et aux mêmes honneurs. Sur un point seulement, sa doctrine mérite d’être relevée, c’est celui qui concerne la procession du Saint-Esprit.

Saint Cyrille avait écrit, dans le ix" analhématisnie, cpie le Saint-Esprit n’est pas une puissance étrangère à Jésus-Christ, mais une puissance qui lui appartient en propre, comme étant son propre esprit. ÏSiov ocÙtoû TCveû(j.a, par lequel il opérait ses miracles. Cette formule choque Théodoret. I.’cvcque de Cyr répond en effet que, si, par l’expression CSlOV TO

Ilve’j[j.a toû rioû, Cyrille veut dire que le Saint-Esprit est consubstantiel au Fils et procède du Père, c’est là

une assertion pieuse et digne d’être reçue ; mais s’il

signifie que le Saini Esprit tient son existence du Fils

ou par le Fils, c’est la un blasphème et une impiété que Ton doil repousser : el 8’à>ç, ï flou r, Si’Itoû tt, v GnotpÇiv (yov (to I [vcûua), wç pXioçTj^iov toûto y.iX coç

Suaæoèç KTCOppttJ’OpCV. P(>..t. ixxi. COl. I3’2.

A rai dire, les expressions de Théodore ! ne sont pas aussi claires qu’on pourrail le désirer. Depuis le iv siè

cle, l’Église grecque ci ait d’accord pour admet ire que le Saint-Esprit procédait du Père par le Fils, oï’i

niais elle se divisait sur la question de savoir en quel

sens il fallait entendre celle procession par le Fils. Ie Fils jouait -Il un rôle actif dans la procession de l’Esprit 7 ou était il simplement un canal par lequel l’Esprit du Père l’écoulait en quelque manière ? (.’est. semblerait I. - XV.

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