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THÉODORET. ÉCRITS HISTORIQUES


désir de la clarté, la même défiance à l’égard des explications contournées. Lorsque Théodoret rencontre un passage difïicile, il n’hésite pas à le reconnaître et il lui arrive de se moquer agréablement des commentateurs qui veulent à tout prix expliquer ce qu’ils ne comprennent pas.

Aussi ne cherche-t-il pas à faire parade d’originalité. Il déclare volontiers qu’il s’inspire des Pères, qu’il transmet les biens hérités des Pères. In Canlic, prolog. , t. lxxxi, col. 48 ; In Epist. S. Pauli, prolog., t. lxxxii, col. 37. Dans le prologue au livre de Daniel, il écrit : « J’ai rassemblé, en la mendiant auprès de beaucoup de pieux interprètes, un tout petit peu de science. » T. lxxxi, col. 1257. Dans le prologue aux petits prophètes : « Semblable aux femmes qui filaient et qui tissaient la laine demandée à d’autres et qui achevaient ainsi les tapis de la tente, cf. Exod., xxxv, 25 ; xxxviii, 8, nous voulons aussi rassembler les explications que nous avons recueillies de divers côtés et en fabriquer un livre avec l’aide de Dieu. » Ibid., col. 1548. Évidemment, il ne faut pas exagérer ces déclarations de modestie. Théodoret est tout autre chose qu’un copiste ou un compilateur : on s’en rendra mieux compte lorsqu’on aura fait la recherche à peine commencée des sources auxquelles il a puisé et l’on pourra alors faire la part exacte de ce qui lui revient en propre. En s’inspirant des anciens, il a d’ailleurs suivi l’exemple des autres exégètes : saint Jérôme, pour ne rappeler que le plus grand de tous, n’avait pas agi d’une autre manière. Il avait trop de valeur personnelle pour se contenter de reproduire ses devanciers et même s’il n’avait pas déclaré qu’il s’était livré à des recherches personnelles, cf. In Cantic., prolog., t. lxxxi, col. 48 ; In XII prophet. min., prolog., t. lxxxi, col. 1548, on retrouverait sans peine la trace de son génie propre.

Il reste vrai qu’aujourd’hui nous nous intéressons moins à l’exégèse de Théodoret qu’on a pu le faire autrefois. Parce que l’évêque de Cyr est un esprit moyen, parce qu’il n’a pas apporté d’idées neuves dans le domaine de la littérature biblique et aussi parce que ses commentaires nous paraissent un peu secs, un peu arides, nous en négligeons la lecture. Ne nous montrons-nous pas à leur égard d’une excessive sévérité ?

Ouvrages historiques.

Théodoret n’a pas été

seulement un théologien, un apologiste et un cxégète. Il a encore été un historien. On lui doit ici :

1. Historia religiosa seu ascelica vivendi ratio, OiXôŒoç taTopCa ïj àerxTjTixT) iroXiTeta, P. G., t. lxxxii, col. 1283-1496. Cet ouvrage est un recueil d’histoires édifiantes ou de biographies de moines, assez analogue a V Histoire lausiaque de Palladius. Cependant, tandis que l’alladius s’était proposé de conduire son lecteur à travers tout l’Empire romain, pour lui montrer partout la pratique de la perfection chrétienne, rhéodorel se borne à rappeler les hauts faits des ascètes qui ont brille comme des astres dans li-ciel’H |’Ol lent : <l il faut entendre ici le mol Orient dan son sens strict, connue désignant le diocèse dont Antioche est la capitale civile. I.es chapitres l-xx de {’Histoire religieuse sont consacrés aux athlètes qui ont déjà reçu la couronne de la victoire, à Commencer

par Jacques de Nisibe, c. i, el Julien de Saba, c h ;

les dix derniers Chapitres parlent des athlètes qui

combattent encore, en particulier de Slméon le Stj

lile, c. XXVI ; les chapitres xxix-xxx proposent même a l’imitatiOIl l’exemple de deux femmes. I.es ascètes

fin din. i i ni une belle place « tans l’ouvrage,

car les chapitres xi xv leur sont réservés. Dans des éditions imprimées et dans plusieurs manuscrits,

l’Histoire religieuse possède un appendice, orniio <ir

divlna ri sancta carltate, /Vciyoc t : zç>1 tîJç Oci-zç x « l

P. G., t. lxxxii, col. 1497*1622, qui se

propose de montrer comment l’amour de Dieu a été le principe de toutes les vertus pratiquées par les ascètes. Il y a là, selon l’expression de Tillemont, Mémoires, t. xv, p. 330, un modèle d’éloquence, mais il est fort douteux que ce beau morceau ait été écrit par Théodoret. Du moins, le problème de son origine n’est pas encore éclairci.

L’Histoire religieuse est un des plus anciens documents que nous possédions sur les ascètes orientaux. Théodoret a connu un bon nombre des personnages dont il rapporte l’histoire. Pour ceux qu’il n’a pas vus et entendus lui-même, il a tenu à s’informer sérieusement auprès de témoins dignes de foi. Il est impossible de mettre en doute sa sincérité ou même la valeur de son information. On est d’autant plus surpris devant les récits merveilleux dont l’ouvrage est rempli. L’évêque de Cyr ne rapporte pas seulement des prouesses extraordinaires en fait de mortification ; il raconte aussi des miracles étonnants, avec la plus parfaite assurance. Les esprits critiques hésitent devant de pareils récits. Pourtant ils sont garantis par l’indiscutable autorité du narrateur. Le problème qui se pose ici n’est pas spécial à l’Historia religiosa, mais il se présente, dans le cas présent, avec de particulières difficultés.

La date de VHistoria religiosa est difficile à déterminer avec certitude. On peut cependant noter que Théodoret y indique, c. ii, la durée de l’épiscopat d’Acace de Bérée : cinquante-huit ans. Si Acace est devenu évêque en 379, comme il est vraisemblable, la cinquante-huitième année de son épiscopat tomberait en 437, ce qui donnerait un terminus a quo pour l’Histoire religieuse. Mais cet le série de déductions est fragile : Acace semble bien être mort assez peu de temps après l’Acte d’union de -133. Les chiffres sont toujours plus ou moins suspects, étant donné la facilité avec laquelle ils peuvent être modifiés dans les copies. Enfin la date de 379 pour le début de l’épiscopat d’Acace n’est pas assurée. Ce qu’il y a de plus clair, c’est que Théodoret mentionne VHistoria religiosa, sous le nom de Ttôv àyiwv ô Piôç, dans la lettre lxxxii qui date de 449 : l’ouvrage est donc certainement antérieur à cette date.

2. Historia ecclesiastica, ’ExxXtjot. occttixt) îaTopla, P. G., t. lxxxii, col. 882-1280. Cet ouvrage renvoie assez fréquemment à VHistoria religiosa ; cꝟ. 1, VI ; II, xxvi ; III. xix ; IV. xxii. xxiv. xxv. Dans les lettres î. xxxil, cxiii, cxvi. écrites en 341) et qui se réfèrent aux ouvrages antérieurs de l’auteur, l’Histoire ecclésiastique n’est pas encore citée. Pourtant elle doit avoir été composée avant la mort de Théodose II, 28 juillet 450, car elle parle de lui comme de l’empereur actuellement régnant, ô vjv pacuXeùcov. V, xxxvi. On peut donc placer sa rédaction pendant l’exil de Théodoret, au cours de l’année 1 lit- 150.

L’Histoire ecclésiastique de’théodoret. comme celles de Socrate et de Sozomène. se présente comme la continuation de l’œuvre d’Eusèbe. Bile prend son point

de dépari en 323, lors des débuts de la controverse

arienne et s’achève en I2 ! i. avec la mort de Théodore

de Mopsucste et de Théodote d’Anlioche. Si illustres qu’aient pu être ces deux hommes, leur célébrité n’est pas la vraie raison qui a poussé’Théodoret a ne pas continuer son ouvrage au delà de la date de leur mort.

i.n réalité, les années 128-429 marquent le commencement de l’affaire de Nestortus et l’évêque de Cyr n’a

aucune envie de s’engager dans le récil d’une lutte ou il a eu son rôle personnel à jouer. Bien que le I. Y rapporte encore quelques incidents postérieurs a fit », il ne le fait que d’une manière accidentelle et Théodore !

se garde d’oublier la limite qu’il a lui-même fixée > son oeuvre,

Il est manifeste que Ihcodoiel a accompli lapide