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THÉODORE DE MOPSUESTE

v, 26 ( « tu n’en sortiras que tu n’aies payé jusqu’à la dernière obole » ) et dans Luc, xii, 47-48 (sur l’inégalité des châtiments) ? D’ailleurs, comme le fait remarquer Sweete, la conception fondamentale qu’il avait de la mission et de la personne du Christ obligeait Théodore à croire à une restauration finale de toute la création : Omnia… recapilulauit in Christo quasi quamdam compendiosam renovationem et adinlegrationem totius jaciens creaturse per eum. Hoc autem in future-sœculo erit quando homines cuncti neenon et ralionabiles virtutes ad illum inspiciant, ut jas exigit, et concordiam inter se pacemque firmam obtineant. In Eph., i, 10. En somme l’adversaire d’Origène sur le terrain scripturaire se retrouvait d’accord avec le docteur alexandrin sur les points les plus discutables de la théologie de ce dernier.

Conclusion générale. — À tout prendre, l’évêque de Mopsueste n’est donc pas le révolutionnaire que l’on a dit. Inspirée des plus pures traditions de l’École antiochienne, son exégèse a eu le singulier mérite de ramener à l’étude du texte scripturaire une interprétation de la Bible que les fantaisies de l’allégorisme risquaient d’égarer en des impasses. Il ne lui a manqué qu’un peu de souplesse et quelque révérence pour les commentateurs antérieurs. C’est en exégèse surtout qu’est indispensable l’esprit de finesse ; l’esprit géométrique de Théodore s’est trop complu en des schématismes qui lui ont fait faire parfois d’amusants contre-sens sur la signification de tel des Livres saints.

Il faut en dire autant de sa théologie. Pour autant qu’il soit loisible d’avoir sur elle une vue d’ensemble, elle représentait une synthèse grandiose dont toutes les parties s’agençaient étroitement. Au centre la doctrine de Yhomo assumplus où se fait l’union de la créature et du Créateur ; l’ordre restauré par là dans un Cosmos où l’homme, être raisonnable et corporel à la fois, aurait dû primitivement faire l’articulation entre les purs esprits et les êtres matériels ; et toutes les conséquences qui se déduisent de cette restauration et que décrivent si amplement les Catéchèses. Ici donc rien que de traditionnel.

Dans l’étude même de Yhomo assumptus, Théodore a fait porter également son attention sur les deux termes de cette expression. Si le Christ est un homme, c’est un homme « assumé > par le Verbe divin. La distinction des deux natures, l’autonomie des opérations de la nature humaine, c’est le point de doctrine que I héodore a réussi à mettre en évidence contre tous les docétismes ; de son activité théologique c’est bien cela qui restera. Il a été moins heureux quand il s’est agi d’exprimer correctement, sinon d’expliquer, l’union étroite entre les deux éléments que la pensée chrétienne a toujours reconnus en Jésus-Christ. Qu’il ait affirmé avec un redoublement d’insistance une union étroite, indissoluble, existant depuis le premier instant fie la conception entre Yhomo assumptus et le Verbum tissu/unis, nous l’avons mi de reste et tout

l’eflorl du catéchiste a bien été de faire entrer Cette idée en la conscience de ses auditeurs. Mais de cette union il n’a pas su trouver une expression salisfai-Bante. Pour être trop demeuré sur le lerrain de la psy-Cbologie cl des laits, il n’a pu se hausser à une explication métaphysique qui fit droit à toutes les exigences de la foi aussi bien qu’à toutes celles de la raison. Ne lui faisons pas grief d’avoir rejeté l’union physique » que préconisera bientôt Cyrille d’Alexandrie ; c’est la un terme niai venu et dangereux, l’as davantage de n’avoir pas prévu le concept d’union hypostati que, qui ne prendra qu’au début du vre siècle, avec Léonce de Byzance, la signification exacte qu’il posaujourd’hui. A son époque y’ii’.c ci uitocrroau ;

sont, pour beaucoup, des tenues syiioin nies ; il faudra

du temps pour mettre entre eux deux L’Importante

différence que l’on sait. Ce qu’on peut lui reprocher par contre c’est, dans ses ouvrages techniques sur la matière, d’avoir, par un esprit de contention qui lui a joué d’autres tours, poussé à l’extrême ses déductions, d’avoir déroulé, quand il s’agissait des opérations de Yhomo assumptus, des conclusions qui ne sont peut-être pas entièrement inexactes, mais dont l’accumulation toute dialectique ne laisse pas d’inquiéter. Le Christ du De incarnatione ou du Contra Apollinarcm risquerait parfois de faire figure de « grand inspiré », plutôt que celle de Fils de Dieu. Après Théodore un travail restait à faire qui conciliât la doctrine correcte des deux natures complètes, concrètes et agissantes avec l’affirmation de l’unique Fils, à laquelle, en dépit de ses apparentes audaces. Théodore se ralliait. Ce travail malheureusement ne s’est pas accompli dans la sérénité nécessaire. À peine Théodore a-t-il disparu que les incartades de Nestorius viennent attirer l’attention sur les déficiences de la théologie antiochienne. L’évêque de Mopsueste ne tardera pas à être rendu responsable des outrances de langage, voire des erreurs plus ou moins caractérisées de l’archevêque de Constantinople. Il était impossible qu’un jour ou l’autre des luttes passionnées n’éclatassent autour du nom de Théodore. Étudiée avec le dessein de la trouver fort criminelle, son œuvre révéla à des inquisiteurs sans bienveillance nombre de pensées qui, arrachées au système général, tronquées parfois dans leur expression, pouvaient difficilement s’accorder avec d’autres systèmes qui étaient en voie de s’imposer. La condamnation de ces textes isolés était inéluctable. Longtemps ils sont restés comme les seuls témoins de la pensée de Théodore. Au fur et à mesure que celle-ci se révèle dans son authenticité primitive, l’évêque de Mopsueste perd quelque chose de ce qui le rendait antipathique aux croyants. À l’historien impartial de la théologie et du dogme il apparaît maintenant comme le représentant autorisé d’une école qui, pour n’avoir pas résolu entièrement les problèmes — quelle école pourrait se vanter de le faire ? — n’en a pas moins fait réaliser un progrès définitif à nos pauvres conceptions du Christ et de Dieu. Le dyophysisme chalcédonien a trouvé en lui sa plus claire et sa plus ferme expression.

I. TEXTES ET EDITIONS.

La question a ele traitée au cours de l’article, col. 237-21 1.

II. ÉTUDES BIOGRAPHIQUES ET LITTÉRAIRES. < lotie les a ne icônes histoires lit te rai l’es : Cave, t. I, p. 217 ; E. (lu Pin,

t. iii, p. 91, et su ri ont Tillemont, Mémoires, t.xii, p. 133 sq., voir en particulier Léo Allai i us. De Theodoris diatriba, "si x v, publiée par A. Mai. dans Bibliotheca noua Patrum, t. vi, p. 11(3, et reproduite partiellement dans P. (.., t. LXVI, col. 77-101 ; O.-F, Frltzsche, De Theodori Mopsuesteni vita et scriptis commentatio, Halle, 1830, reproduit dans ». < ;., ibiil., col.’.1-78 ; et parmi les auteurs récents II. -H. Sweete,

art. Theodor von Mopsuestia, dans Dtetionary « / Christian Biography, i. iv, 1887, p. 934-948, article magistrat auquel se réfère, en se contentant d’ajouter quelques compléments, E. I.oofs, dans Protest. Realencyclopddie, t. xix. 1907, p.. r ».18605 ; 1°. Bardenhewer, Altkirchliche Literatur, t. iii, p. 312 sq, lires hostile a Théodore) ; H. Devreesse, Le Ihiriliiir /<

Léonce de Byzance dans Itrv. des Mirons ni., t. x. 1930, p. 545 s(|.

III. I.xii.isi. Bibliographie bien mise a jour par

l.. Pirot, L’œuvre exégétique de Théodore de Mopsueste,

Rome, 1913 ; a compléter pour ce qui est du Psautier par

M. Devreesse, i.< commentaire rf< Théodore de M. sur les Psaumes, CittA del Vatlcano, 1939, ouvrage préparé par de nombreux articles dans la Revue biblique, a partit de 1924. Travail spécial de Specht, Der exegetische Standpunkt des Theodor » nn M, und Theodorel von Kyrot in der Autlegung messlanischer Welssagungen, Munich, 1871, et de Klhn, Theodor oon M, und Juniliui Africanus ait Exegeten, l’ri bourg-en-B. , 1880.

1 v. lui 10.01. m. (iT m a m 1 1 1 1 okisic.11. Se reporter a la bibliographie de l’ait. Ni s 1 nui s, qui donnera un aperçu lui la nécessité de reconsidère ! le problème de la