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THÉODORE DE M OPS UESTE. LES CATÉCHÈSES


Esprit. Il le sera pour nous, si nous en sommes jugés dignes, comme le dit l’Apôtre : « Si l’Esprit de celui qui a ressuscité Notrc-Seigneur Jésus-Christ habite en vous, celui qui a ressuscité Jésus vivifiera vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous. » Rom., vm, 11. Mais être vivifieateur, c’est participer à la puissance créatrice et donc à la nature divine. Quant à la dernière parole du Christ sur la terre, Matth., xxviii, 19, elle montre à l’évidence qu’unique est la nature divine du Père, du Fils et du Saint-Esprit. L’ensemble de cette doctrine du Saint-Esprit s’apparente à ce que Théodore avait déjà dit à la conférence d’Anazarbe, ci-dessus, col. 240-241 ; mais la démonstration s’est faite ici plus rigoureuse.

L’explication des derniers articles du symbole : Église, baptême, résurrection, vie future est vite achevée, puisqu’aussi bien les catéchèses mystagogiques auront à revenir sur tous ces points. On est baptisé, en effet, pour devenir membre de l’Église, membre du corps du Christ, avec l’espoir de participer un jour, avec celui-ci, aux merveilles futures dans le monde à venir.

8. Les catéchèses mystagogiques : la prière, les sacrements. — Parallèles, en gros, aux catéchèses de saint Cyrille de Jérusalem, ces instructions en diffèrent au moins en ceci qu’au lieu d’avoir été prononcées après réception des rites de l’initiation, elles semblent l’avoir été avant et comme préparation à celle-ci. C’est certain des catéchèses relatives au baptême (hom. ii, iii, iv) ; ce l’est peut-être moins de celles qui ont pour objet la sainte eucharistie (hom. v et vi). Elles n’apportent d’ailleurs rien de très spécial ; il suffira de les parcourir rapidement.

a) La prière. — La première qui est consacrée à la prière, permet de connaître quelques vues de Théodore sur la vie morale, mais donne aussi des indications d’ordre christologique, en particulier sur la prière de Jésus. C’est pour l’avoir vu prier, que les apôtres lui ont demandé de leur enseigner à eux-mêmes à prier et qu’il leur a donné le Pater. La prière, il l’a résumée en quelques phrases pour leur apprendre que l’oraison consiste moins en paroles que dans l’amour et le zèle pour le devoir. Et le catéchiste d’indiquer, avant de commenter mot à mot le Pater, la lutte que nous devons soutenir contre nos ennemis surtout contre ceux de l’intérieur. Tout autant que les Pères occidentaux, il met l’accent sur la faiblesse inhérente à notre nature, laquelle nous amène à tomber involontairement en une multitude de fautes. C’est contre quoi nous arme la prière, qui nous permet de tendre ici-bas vers l’idéal qui ne sera réalisé que là-haut.

b) Le baptême. — Les instructions sur le baptême s’ouvrent par une doctrine générale des sacrements, « actes visibles qui sont des signes ou des symboles de réalités invisibles et indicibles ». Ces signes prolongent l’action terrestre de Jésus, le souverain prêtre, dont le sacerdoce est caractérisé en quelque traits, et présenté surtout comme une anticipation de ce que nous devons faire et de ce que nous devons espérer. « Les hommes ne pouvaient entrer au ciel qu’après qu’un homme d’entre nous aurait été assumé, serait mort conformément à la loi naturelle de l’humanité, serait ressuscité glorieux de la mort, serait devenu immortel et incorruptible par nature, serait monté au ciel et aurait été constitué grand-prêtre pour le reste de l’humanité et comme les prémices de notre ascension au ciel. » Aussi bien le baptême est-il un signe, en ce sens d’abord qia’il rappelle la mort et la sépulture de Jésus et ensuite sa résurrection. Il ne fait pas qu’évoquer ces événements qui sont à la base de notre salut ; il nous donne la réalité même que ces faits ont apportée au monde ; il nous fait mourir au péché et ressusciter à une vie nouvelle, vie de l’âme sans doute, mais aussi

vie du corps qui reçoit comme un germe de l’immortalité. Toutes ces considérations amènent une doctrine très explicite du péché originel et de ses suites que nous retrouverons fplus loin. Ci-dessous, col. 270 sq.

Fort intéressantes du point de vue de l’histoire de la liturgie sont les explications détaillées des cérémonies du catéchumènat et du baptême proprement dit. Nous ne pouvons nous arrêter au détail ; notons seulement la nécessité de la bénédiction de l’eau, qui y fait descendre le Saint-Esprit. Le célébrant demande, dans cette cérémonie, que la grâce de l’Esprit-Saint vienne dans l’eau et lui donne la puissance de concevoir les enfants de la grâce, de devenir le sein maternel pour la renaissance sacramentelle. Notons encore la consignation qui suit immédiatement le baptême : de même que Jésus en sortant du Jourdain reçut la grâce du Saint-Esprit, véritable onction d’ordre spirituel qui lui vaut son nom de Christ, de même le baptisé, par l’onction matérielle du chrême, reçoit une participation à cette grâce du chef de l’humanité.

c) L’eucharistie. — Après avoir reçu une nouvelle naissance, les baptisés vont accéder à la nourriture immortelle qui convient à leur nouvel état. Les deux dernières catéchèses, v et vi, présentent d’abord une doctrine rapide de l’eucharistie, puis l’explication des actes successifs de la liturgie.

La signification de la nourriture et du breuvage qui sont donnés aux fidèles est clairement indiquée par les paroles de Jésus à la dernière Cène. Quand il donna le pain à ses disciples il n’a pas dit : « Ceci est le symbole de mon corps », mais bien « Ceci est mon corps », parce qu’il voulait que nous n’envisagions pas ces éléments, après qu’ils ont reçu la bénédiction et la venue du Saint-Esprit, d’après ce que l’on en voit, mais que nous ! les recevions comme le corps et le sang de Notre-Seigneur. Les paroles de la promesse de l’eucharistie, Joa., vi, 35 sq., sont un gage de la vérité de cette interprétation. C’est quand les apôtres « verront le Fils de l’homme monter là où il était d’abord », ꝟ. 62, qu’ils auront la pleine intelligence du mystère eucharistique. Ils comprendront alors quelle transformation vient de s’opérer, par la résurrection, dans le corps mortel du Sauveur, transformation qui, œuvre du Saint-Esprit, fait passer ce corps à l’immortalité définitive et lui donne d’être pour ceux qui le recevront désormais un gage, un germe d’immortalité. Aussi bien nous qui avons reçu la grâce du Saint-Esprit par le symbole des sacrements, ne devons-nous pas regarder les « éléments » comme du pain et comme du viii, mais comme le corps et le sang du Christ, auxquels ils sont transformés par la descente du Saint-Esprit. Quoique, en effet, le pain (sacramentel) ne possède pas de soi le pouvoir de donner l’immortalité, pourtant, quand il a reçu l’Esprit et sa grâce, il est rendu apte à communiquer à ceux qui le mangent la joie de l’immortalité. Il ne le fait pas par sa propre nature, mais par l’Esprit qui habite en lui, de même que le corps de Notre-Seigneur, dont ce pain est la » représentation » a reçu l’immortalité par le pouvoir du Saint-Esprit et impartit dès lors l’immortalité aux fidèles.

Pour être moins « réaliste » que celle de Cyrille de Jérusalem et surtout que celle de Jean Chrysostome, la doctrine de Théodore sur l’eucharistie ne laisse pas, on le voit, de faire justice aux mots de l’Évangile qui présentent le pain et le vin consacrés comme le corps et le sang du Sauveur. Mais, pour avoir trop insisté sur le rôle du Saint-Esprit dans la transformation des « éléments » — à ce point de vue il serait le témoin le plus notable, dans l’antiquité, de la signification de l’épiclèse, cf. t. vi, p. 104 — Théodore a plutôt appuyé sur la « vertu » qui est dans le sacrement et moins sur l’identité qu’il faut reconnaître entre les éléments consacrés et la chair et le sang de Jésus. Qu’il ait, d’ail-