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THÉODORE DE MOPSUESTE. EXÉGÈSE


de l’évêque de Mopsueste. Il va de soi que l’impartialité n’a pas toujours été la règle de ces enquêtes. Détachés de leur contexte, coupés parfois de manière tendancieuse, bien des fragments, d’ailleurs authentiques, peuvent rendre un son qu’ils n’avaient pas dans l’œuvre primitive.

Marius Mercator ouvre la liste. À la suite de son Commonitorium adversum hæresim Pelagii et Cselestii, où il a pris Théodore à partie dès le début, et avant de donner les pièces de la controverse nestorienne, il insère une Exposilio pravse fidei Theodori, un symbole de foi qu’il prétend être de l’évêque de Mopsueste et qu’il fait suivre d’une réfutation. Texte dans A. C. O., t. i, vol. v, p. 23-28 ; cf. P. L., t. xlviii, col. 1041-1046.

— Au début du vie siècle, quand déjà est dans l’air la controverse des Trois-Chapitres, Léonce de Byzance, pour faire le procès de Théodore, rassemble tout un dossier dont les pièces sont extraites surtout du Contra Apollinarem et du De incarnatione. Voir Léonce, Contra nestor. et eutych., fin du t. III, P. G., t. lxxxvi a, col. 1383-1390 en tenant compte de la note de la col. 1385 qui renvoie à t. lxvi, col. 972 (sic) et sq. — C’est à Léonce surtout que Justinien empruntera ses documents dans un petit traité rédigé sous forme de lettre et qui tend à justifier la condamnation déjà prononcée par lui d’ibas, de Théodoret et de Théodore. Justinien cite de ce dernier huit textes, dont quelques-uns assez longs, sept en provenance du Contra Apollinarem, un venant du De incarnatione. Voir P. G., t. lxxxvi a, col. 1049 C, 1051 C, 1053 A, 1057B, 1060 A, 1061 D, 1071 D, 1073 A (De incarn.). Presque toutes ces citations sont déjà dans Léonce. — Mais, un peu avant la réunion du concile prévu, une enquête plus approfondie est faite dans l’œuvre de Théodore. On finit par en extraire 71 propositions, qui seront soumises au concile à la ive session. Elles sont empruntées, sans qu’il soit possible de voir dans quel ordre, au De incarnatione (12 extraits), au Contra Apollinarem (12 extraits), aux Catéchèses (7 extraits), au Commentum de creatura (5 extraits), à divers commentaires exégétiques ; chaque proposition est munie de sa référence. Texte dans Mansi, t. ix, col. 202 sq., en latin seulement, car il n’y a pas d’original grec du Ve concile. Beaucoup des citations du concile doublent celles de Léonce, dont il y a intérêt à comparer le texte grec avec la version latine, souvent difficile à comprendre.

— Le Constitutum publié par le pape Vigile en mai 553 (date d’ouverture du concile), reproduit les 61 premières propositions du concile (les numéros d’ordre ne se correspondent pas toujours) ; mais ne donne pas les références. C’est donc au texte conciliaire qu’il vaut mieux se rapporter ; beaucoup plus étendu que les dossiers de Léonce et de Justinien, il est la source essentielle pour beaucoup d’ouvrages de Théodore. L’édition du Constitutum de la Collectio Avellana, dans le Corpus de Vienne, t. xxxv a, p. 230 sq., a l’avantage de mettre sous les yeux le texte grec de Léonce correspondant au latin de Vigile et du concile. — Sensiblement à la même date l’excerpteur de la Collectio palatina (qu’il ne faut plus identifier avec Marius Mercator) donne de Théodore un certain nombre de textes relatifs au péché originel, empruntés à YAdversus asserenies peccatum in natura insistere. Dans A. C. O., t. i, vol. v, p. 173-176, et un fragment de la vin catéchèse, ibid., p. 176-177 ; cf. P. L., t. xlviii, col. 1051-1056. — Postérieurement au schisme d’Aquilée, Pelage II pour convaincre les schismatiques de la culpabilité de Théodore, reproduit, dans sa 3e lettre aux évêques d’Istrie, sans y rien ajouter, une partie des textes déjà mentionnés par Vigile. P. L., t. lxxii, col. 715 sq. ; mieux dans A. C. O., t. iv, vol. ii, p. 112132.

Lors de la controverse des Trois-Chapitres, les dé fenseurs de Théodore ne sont pas restés inactifs. Si l’on peut négliger au point de vue qui nous occupe les œuvres des deux diacres Busticus et Libératus, de Vérécundus, évêque de Junca, il faut accorder une grande attention au traité du diacre Pelage (le futur pape Pelage I er) contre le Judicalum du pape Vigile, éd. B. Devreesse, Pelagii diaconi in defensione Trium Capitulorum, Borne, 1933, Sludie Testi, n. 57, et surtout au volumineux ouvrage de Facundus d’Hermiane, Pro defensione Trium Capitulorum, P. L., t. lxvii, col. 527-852, qui donne de Théodore un nombre important de textes inconnus par ailleurs : un du Cont. Eunomium : IX, 3, col. 754 ; sept du De incarn. : III, 2, col. 587 ; IX, 3, col. 748, 750, 751, 752, 753, 762 ; deux des Catéchèses : III, 2, col. 585 ; IX, 3, col. 747 ; trois du Cont. Apollinarem : III, 2, col. 585 ; IX, 4, col. 755 ; X, 1, col. 769 ; un du De allegoria : III, 6, col. 602 ; un du Commentaire surRom. : III, 6, col. 601 ; un sur Matth. : IX, 2, col. 742 ; un sur Joa. : ibid., col. 746 ; un sur le Ps. xliv : col. 739 ; enfin un fragment d’une lettre à Artémius, importante pour l’enseignement trinitaire : III, 5, col. 599. Encore que le point de vue de Facundus soit faux — il voudrait désolidariser complètement Théodore et Nestorius — cet auteur ne laisse pas de fournir des fragments théodoriens qui rendent un son bien différent de ce que l’on entend ailleurs.

C’est dans la littérature théologique de langue syriaque que l’on aurait le plus de chance de retrouver des textes non encore remarqués de Théodore. Ce travail a été à peine commencé par P. de Lagarde, qui dans ses Analecta syriaca, Leipzig, 1853, donne sans traduction, p. 100-102, des fragments syriaques de Théodore, empruntés à un florilège de toute apparence jacobite, et par Ed. Sachau, Theodori M. fragmenta syriacae codicibus Musœi Britannici nitriacis, Leipzig, 1869, qui reproduit les textes de P. de Lagarde, avec traduction latine, et fournit des textes nouveaux.

b) Où trouver ces fragments rassemblés ? — Le t. lxvi de P. G. est, à l’heure présente, le seul recueil tant soit peu complet. L’éditeur a surtout utilisé les travaux du professeur zurichois O.-F. Fritzsche (1812-1896) et il donne, outre la dissertation de celui-ci De Theodori M. vita et scriptis : le commentaire sur les petits prophètes (de Mai) ; les fragments sur l’Ancien Testament (à compléter, pour ce qui est des Psaumes, par l’édition Devreesse) ; les fragments sur le Nouveau Testament (d’après Fritzsche, Zurich, 1847), à compléter par l’édition du Commentaire sur Jean ; les fragments dogmatiques, d’après Fritzsche. De ces fragments dogmatiques on trouvera un bien meilleur texte dans l’édition fournie par H.-B. Sweete, Theodori M. in epistolas B. Pauli commentaria, à la suite du commentaire (en latin) des petites épîtres pauliniennes, t. ii, toute la fin : les fragments sont disposés dans l’ordre suivant : De incarnatione, Contra Apollinarem, Contra Eunomium, les Catéchèses (y substituer l’éd. fournie par Mingana), le Traité sur le péché originel, enfin les Épitres.

Malgré les enrichissements récents, la conservation de l’œuvre de Théodore demeure donc tout à fait médiocre. C’est dire avec quelle prudence les critiques devront s’exprimer sur sa doctrine.

III. L’exégète. — Presque dès les débuts de son activité littéraire, Théodore a été un « signe de contradiction ». L’Église orientale a vu de bonne heure en lui l’exégète par excellence, de qui nul n’avait loisir de s’écarter ; mais, au même moment, l’Église d’État de l’Empire byzantin lui vouait une haine qui le poursuivra jusqu’à sa condamnation en 553. Et ce n’est pas seulement le théologien de l’incarnation qu’elle a condamné en lui ; son exégèse, qui constituait somme toute le gros de sa production littéraire, n’a pas été attaquée avec moins de violence que ses spéculations