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235 THÉODORE MÉTOCHITÈS -THÉODORE DE MOPSUESTE

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l’ensemble ferait bien dix mille vers, sur les événements et les personnages de l’époque. Plusieurs sont d’inspiration religieuse, célébrant Dieu, la Vierge ; deux poèmes sont consacrés aux Pères de l’Église : Athanase, Basile, Grégoire de Nazianze, Jean Chrysostome. — Théodore a-t-il fait œuvre d’historien proprement dit ? Quelques-uns l’ont cru et J. Meursius a donné à Leyde en 1618 : Theodori Mctochilæ historiée romanæ a J. Cœsare ad Constanlinum liber singularis, texte grec et traduction latine. En fait Meursius s’est laissé tromper par le titre du ms. qu’il a publié. L’ouvrage en question est simplement une partie de la Chronique de Michel Glykas. Dans la préface de son édition, Meursius promettait de donner aussi une Histoire sacrée en deux livres et une Histoire de Constantinople, BuÇocvtîç, du même Métochitès. Rien de cela n’a jamais paru et ici encore il pourrait y avoir confusion avec d’autres œuvres, soit de notre Théodore, soit d’écrivains différents. — Parmi les lettres de Théodore qui attendent encore un éditeur, H. Omont a signalé une lettre latine adressée au roi de France Charles IV le Bel, datée du 13 mai 1327 ; elle est relative à la mission à Constantinople du dominicain Benoît de Côme, venu pour traiter, au nom de Jean XXII, de l’union des Églises. Cette mission n’eut aucun succès. Cf. H. Omont, Projet de réunion des Églises grecque et latine sous Charles le Bel, dans Biblioth. de l’École des Chartes, t. lui, 1892, p. 254-257.

Fabricius-Harles, Biblioth. grveca, t. x, p. 412-426, reproduit dans P. G., t. cxliv, col. 929-954 ; K.Sathas.McO’auovExr, fitoÀioOr ; Lr|, t. i, p. 19-135 ; K. Krumbacher, Gesch. der byzant. Literatur, 2e éd., 1897, p. 550 sq.

É. Amann.

11. THÉODORE DE MOPSUESTE, ainsi

nommé de la ville de Cilicie dont il fut évêque ; nommé aussi Théodore d’Antioche, cette ville étant son lieu de naissance ; le personnage le plus représentatif, tant en exégèse qu’en théologie, de l’École d’Antioche (350-428). I. Vie. II. Œuvres (col. 237). III. L’exégète (col. 244). IV. Le théologien (col. 255).

I. Vie.

Théodore naquit à Antioche vers 350, d’une famille riche et dont plusieurs membres occupèrent des situations importantes. Comme Jean Chrysostome, sinon en même temps que lui, il a été, dans sa ville natale, l’élève du fameux rhéteur païen, Libanius. Converti par Jean à la vie ascétique, en même temps qu’un de leurs amis communs, Maxime, qui deviendra évêque de Séleucie d’Isaurie, il se fait baptiser et se retire dans un ascétérion dirigé par Cartérius et par Diodore, le futur évêque de Tarse. À ce moment, Théodore pouvait avoir vingt ans. Après quelque temps d’une vie exemplaire, il est tenté de rentrer dans le monde et de se marier, ne se sentant pas fait pour la vie monastique. C’est alors que Jean lui adresse les deux petits traités Ad Theodorum lapsum, P. G., t. xlvii, col. 277-316, dont le second avait été spécialement composé à son intention. Cf. l’édit. française de Legrand. Théodore ne resta pas sourd aux prières de son ami ; il renonça à l’idée du mariage et revint à la vie monastique. Sozomène, H. E., VIII, n ; cf. Socrate, H. E., VI, m ; mais la Responsio Theodori lapsi, P. G., t. xlviii, col. 1063, est, à n’en pas douter, inauthentique. Sur les dix années qui suivirent cette crise nous avons peu de renseignements. Ce furent sans doute, des années de travail intellectuel intense sous la direction de Diodore, qui devait quitter l’école en 378 pour monter sur le siège de Tarse. Cette période fut décisive dans la vie de Théodore ; c’est alors qu’il se pénétra des principes exégétiques et théologiques que son maître avait hérités de la première génération des Antiochiens.

En 383 il est ordonné prêtre, selon toute vraisemblance par Flavien, qui depuis 381 gouvernait le parti mélétien de l’Église d’Antioche. Voir art. Mélèce,

t. x, col. 520. Mais il ne paraît pas s’être beaucoup mêlé aux pénibles discussions qui déchiraient les catholiques antiochiens en deux factions rivales. Dans toute son œuvre littéraire on ne trouve rien qui y fasse allusion. Bien plutôt avait-il la préoccupation de réfuter les hérétiques et de commenter, à l’usage des personnes savantes, les divers livres de la Sainte Écriture. Dès ce moment, en effet, il entreprend son travail d’exégète qu’il poursuivra jusqu’à ses derniers jours. Prédicateur de quelque renom, cf. Facundus d’Hermiane, Pro defensione trium capitul., VIII, 4 : agebal fréquenter… sermonibus in populum contra Synusiastas, P. L., t. lxvii, col. 722, il vit sa gloire pâlir quand, en 386, Jean Chrysostome inaugura sa carrière oratoire. Diodore, son ancien maître, l’attirait auprès de lui ; c’est à Tarse qu’on le trouve entre 386 et 392 ; c’est là qu’on vient le chercher pour en faire l’évêque de Mopsueste, pas très loin de Tarse, dans la Cilicie seconde. Un siècle plus tard, Léonce de Byzance, qui ne lui voulait pas de bien, racontera qu’à la mort de Diodore l’évêque de Mopsueste aurait intrigué pour monter sur le siège de Tarse et que Théophile d’Alexandrie aurait mis bon ordre à cette tentative. Contra nestorian. et eulychian., P. G., t. lxxxvi, col. 1364. C’est un méchant propos d’une méchante langue.

L’épiscopat de Théodore devait durer vingt-six ans, mais l’on sait peu de chose de son activité durant cette période. On ne saurait douter de son zèle à procurer le bien des âmes ; la fameuse lettre d’Ibas atteste que Théodore convertit de l’erreur à la vérité sa ville de Mopsueste. Sa renommée de science dépassait de beaucoup les limites de son diocèse. C’est ainsi qu’il aurait assisté à la conférence d’Anazarbe, entre catholiques et macédoniens. Cf. P. O., t. ix, p. 506. Il est à Constantinople en 394, au concile qui jugea le dissentiment entre Agapius et Bagadius au sujet de la possession du siège de Bostra ; c’est sans doute à cette occasion qu’il prêcha devant Théodose le Grand, lequel admira la fermeté de sa théologie et la profondeur de son éloquence. Facundus, op. cit., II, 2, col. 563. Le drame de 404, dont fut victime Jean Chrysostome, ne le laissa point indifférent. Voir la lettre cxii de Jean, qui lui est adressée, P. G., t. lii, col. 668 ; cf. lettre cciv, col. 725. En 418, Théodore vit arriver à Mopsueste Julien et les évêques pélagiens d’Italie qui avaient été déposés par le pape Zosime et pensaient trouver en lui un défenseur. Voir Marius Mercator, Commonilorium, 15, dans la Collectio palatina, Acta concil. oecum. (A. C. O.), t. i, vol. v, p. 23. Julien resta auprès de lui jusqu’en 422, date à laquelle il retourna en Italie. S’il faut en croire Mercator, ibid., sitôt Julien parti, Théodore l’aurait condamné dans un synode provincial. Peutêtre l’évêque de Mopsueste prit-il prétexte, en effet, d’une assemblée réunie à d’autres fins pour préciser sa propre doctrine au sujet du péché originel. Il mourut six ou sept ans après, vers la fin de 428. Théodoret, H. E., V, xxxix, 40. C’était le moment où Nestorius d’Antioche venait d’être désigné pour le siège de Constantinople. Un des historiens de celui-ci, Barhadbesabba, fait passer Nestorius par Mopsueste, alors qu’il se rendait dans la capitale ; Théodore aurait donné à l’archevêque nommé des conseils de modération. Texte dans P. O., t. ix, p. 517. C’est possible, ce n’est pas certain. Voir art. Nestorius, t. xi, col. 91. On rapprochera de ce récit un texte fort tendancieux d’Évagre le Scolastique, H. E., i, ii, P. G., t. lxxxvi, col. 2425, suivant qui c’est à cette entrevue que Nestorius aurait reçu les semences de l’hérésie qu’il ne devait pas tarder à répandre. Pour s’affermir en ses idées, Nestorius n’avait pas besoin des derniers avis du vieil évêque de Mopsueste.

En dépit de certaines attaques auxquelles il avait été en butte à diverses reprises, Théodore mourut dans