Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 14.2.djvu/831

Cette page n’a pas encore été corrigée
3163
3164
SYRIGOS (MÉLÊCEl


força à rentrer en Crète, puis à chercher le vivre et le couvert dans un monastère. C’est alors qu’il prit le nom de Mélétios. Son instruction le désigna bientôt comme candidat au sacerdoce, il fut ordonné à Cythère par un évêque grec dissident.

De retour à Candie, le nouveau hiéromoine se signala par son talent oratoire et aussi par son zèle contre le catholicisme. Les autorités vénitiennes s'émurent de ses attaques et l’on profita de la première occasion pour expulser le prédicateur, qui se retira d’abord au couvent d’Angaratho, puis à celui de Kali Liménès, KaXoi Aifxéveç, dont il fut higoumène. Là encore, il afficha bien haut son anticatholicisme. Cela suffit à le faire passer pour un ennemi déclaré de la Sérénissime République et la peine de mort fut portée contre lui. On lui laissa d’ailleurs tout le temps de s'évader sur un bateau en partance pour Alexandrie. C'était vraisemblablement en 1626.

Après quelque quatre ans de séjour en Egypte, il fut appelé à Constantinople par Cyrille Lucaris, qui en était alors à son quatrième patriarcat constantinopolitain et poursuivait sans répit son projet d’introduire le calvinisme dans l'Église grecque. Déjà avait paru sous son nom à Genève, en 1629, sa fameuse Confession de foi. Cependant, il lui fallait dissimuler ses véritables intentions, car les jésuites établis à Galata, aidés par les ambassadeurs de France et d’Autriche, mettaient tout en œuvre pour amener sur le siège patriarcal un prélat favorable aux doctrines catholiques. Cyrille crut trouver en la personne du hiéromoine Cretois, l’homme qu’il lui fallait. Aussi l’installa-t-il d’emblée à Galata, face aux jésuites, dans l'église de la Chrysopégé. C’est là que, dès l’automne de 1630, Mélèce commença la série de ses homélies dominicales, qui devaient embrasser tout le cycle liturgique. En même temps, le patriarche lui donnait le titre officiel de « didascale de la Grande Église ».

En 1632, Mélèce s’absente une première fois de Galata pour se rendre en Moldo-Valachie, chargé par Cyrille d’une mission secrète, qui consistait peut-être à surveiller les menées de la propagande catholique en cette région. Celui qui devait bientôt réfuter longuement le patriarche calvinisant parut alors se prêter à des agissements assez louches en faveur de l’hérésie. Après un an passe en Moldo-Valachie, il revint à Péra, où, tout en continuant ses prédications, il ouvrit une école de langues et de sciences. Dès 1635, sur l’invitation du hospodar Basile le Loup, il retourna en Moldo-Valachie, où il s’occupa de traduire en grec vulgaire l'œuvre polémique de Jean Cantacuzène contre l’Islam. Nous le retrouvons à Galata, au carême de 1637, où il reprend ses prédications et ses leçons. Le 29 juin 1638, en la fête des saints apôtres, il prend la parole devant le nouveau patriarche Cyrille II Contaris, successeur de Cyrille Lucaris, que les Turcs venaient d'étrangler et de jeter à la mer. Cyrille II avait été le grand adversaire de Lucaris, comme Syrigos en avait été l’ami. Maintenant Syrigos oubliait le passé et se rangeait du côté des anticalvinistes. Dès cette année 1638, il commençait son grand ouvrage contre la Confession de Cyrille Lucas. Ses sentiments anticalvinistes eurent l’occasion de se manifester publiquement l’année suivante. Lé jour de l’intronisation du nouveau patriarche Parthénios I er, successeur de Cyrille Contaris (1639-1644), Théophile Korydaleus, tout dévoué au calvinisme, profita de la circonstance pour entamer l'éloge de Cyrille Lucaris, présenter sa Confession comme l’expression de la foi orthodoxe et nier expressément la présence réelle de Jésus-Christ dans l’eucharistie. Grand fut le scandale parmi les auditeurs. Parthénios I er, qui ne partageait nullement les idées de Lucaris, voulut obtenir de Korydaleus une rétractation publique de ses erreurs. N’ayant pu

y réussir, il chargea Mélèce Syrigos de prononcer en son nom contre l’hérétique un discours retentissant. C’est ce que fit celui-ci le 27 octobre. Il réussit si bien que les auditeurs voulurent faire un mauvais parti au disciple de Calvin. Syrigos avait donc pris position contre les calvinisants de Constantinople. Cela devait lui valoir dans la suite bien des désagréments. Déjà, après le discours contre Korydaleus il crut bon de quitter Constantinople pour Moudania, où il paraît avoir passé l’année 1641. Nous le retrouvons à Galata en 1642. Cette année-là même, il fut chargé par Parthénios I er d’une importante mission en Moldo-Valachie. Répondant à la demande du métropolite de Kiev, Pierre Moghila, le patriarche œcuménique décida d’envoyer à Iassy, en Moldo-Valachie, deux délégués officiels pour examiner un catéchisme composé en latin par Moghila lui-même dans le but de codifier la doctrine orthodoxe tant contre les protestants que contre les latins, mais surtout contre les premiers. Pour cette mission de confiance, il fit choix de Mélèce Syrigos. De leur côté, les Kiéviens envoyèrent trois délégués, porteurs du fameux catéchisme, à savoir Isaïe Trofimovitch Kozlovskii, higoumène du monastère Saint-Nicolas de Kiev, le prédicateur Ignace Oksénovitch Starusitch et le recteur du collège de Kiev, Joseph Kononovitch. Cela faisait en tout cinq personnes avec le compagnon de Mélèce. C'était peu pour constituer ce qu’on a appelé le concile de Iassy, qui ne fut en réalité qu’une série d’entretiens entre théologiens. L’entente sur le terrain doctrinal fut loin d'être parfaite entre eux. Deux questions surtout les divisèrent : celle du purgatoire et celle de l'épiclèse. Ils ne purent, du reste, prendre aucune décision définitive. Il fut seulement convenu que le catéchisme de Moghila, traduit en grec, serait envoyé à Constantinople pour être soumis à l’approbation du patriarche, et ce fut Mélèce Syrigos qui fut chargé de la traduction. Le travail était terminé à la fin d’octobre, lorsque prirent fin les conférences. Sur le sort ultérieur du catéchisme de Moghila, devenu La confession de foi de l'Église orientale orthodoxe, voir l’article Moghila. La confession de Pierre, t. x, col. 2070-2081.

De Iassy Syrigos paraît s'être rendu directement en Petite-Russie, où il passa toute l’année 1643. Il visita Kiev et plusieurs autres villes. Des entretiens directs avec Pierre Moghila durent parachever les conférences de Iassy, sans aboutir du reste à une entente sur les points controversés : les Kiéviens maintinrent leur doctrine sur la forme de l’eucharistie et les corrections de fond introduites par Syrigos dans le catéchisme de Pierre Moghila n’eurent point leur agrément.

Revenu à Galata au début de 1644, Syrigos vit bientôt sa situation compromise du fait de l’accession au patriarcat de Parthénios II, dit le Jeune (1644-1646), tout dévoué aux amis de Lucaris et au parti calvinisant. Il dut partir en exil le 1 er juin 1645 et se retira d’abord à Iassy, puis, après une tentative de rentrée furtive dans la capitale, à Kios (Ghemlck), sur le golfe d’Ismidt. Il y resta jusqu'à la déposition de Parthénios II (Il novembre 1646). Le 21 mars 1647, il prêchait devant le nouveau patriarche Joannice II (16461648). Mais, au retour de Parthénios II sur le trône patriarcal (28 septembre 1648), il dut reprendre le chemin de l’exil. C’est en vain qu’il essaya, en 1649, de rentrer en cachette à Constantinople. Découvert, il dut repartir à Kios. Ce troisième exil cessa à la mort de Parthénios II (16 mai 1650). Rentré dans la capitale, il put y passer dans la tranquillité les quatorze années qu’il lui restait encore à vivre sous les nombreux successeurs de Parthénios II — ils ne furent pas moins de douze — occupé à prêcher et à écrire. Au printemps, de 1653, il quitta Galata pour l'église de la Vierge de