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SYLLABUS. PUBLIC TION


catholiques belges un Important congres. Le but était

de « créer un foyer de lumière, de charité et d’amour, où viendrait se consolider la sainte alliance des fils de l'Église ». Compte rendu officiel de l’assemblée. Introduction, p. ni. Montalembert s’y rendit et prit la parole à deux reprises. Les discours qu’il prononça reflétèrent ses idées libérales. Cf. Lecanuet, Montalembert, t. iii, p. 346 sq. ; Mpr Baunard, op. cit., t. a, p. 196 sq. ; l’art. Libéralisme, t.ix. col. 585-590 ; l’art. Montalembert. t. x. col. 2353. L’orateur marquait sans doute la distinction essentielle entre l’intolérance dogmatique et la tolérance civile, 1 une nécessaire i la ritt éternelle, l’autre nécessaire à la société moderne » ; il proclamait sa soumission absolue à l'Église et au pape en matière de dogme. -Mais, dans son premier discours, il rejetait l’alliance du trône et de l’autel » et réclamait au nom des idées modernes la séparation des deux pouvoirs. Dans le second discours, il revendiquait pour tous la liberté de conscience qu’il appelait la plus précieuse, la plus sacrée, la plus légitime, la plus nécessaire. « J'éprouve, disait-il, une invincible horreur pour tous les supplices et toutes les violences faites à l’humanité, sous prétexte de servir et de défendre la religion. Les bûchers allumés par une main catholique me font autant d’horreur que les échafauds où les protestants ont immolé tant de martyrs. » De telles paroles eurent immédiatement un retentissement considérable. A Matines, l’assemblée enthousiaste les acclama ; le cardinal-archevêque remercia vivement l’orateur et le roi Léopold lui envoya ses félicitations ; mais, dès ce premier moment, le silence désapprobateur du cardinal Wiseman et du nonce à Bruxelles firent comprendre à Montalembert qu’il s'était aventuré sur un terrain brûlant. De retour en France, il publia ses deux discours dans le Correspondant des 25 août et 25 septembre 1863, puis dans une brochure qui portait ce titre significatif : L'Église libre dans l'Étal libre. L’effet déjà produit fut loin de s’apaiser ; les idées que défendait l’orateur pouvaient évidemment s’entendre en un sens orthodoxe ; il était sûr d’autre part que Montalembert ne voulait pas s'élever contre la doctrine catholique, lui qui déclarait à la fin de son second discours « soumettre toutes ses expressions et toutes ses opinions à l’infaillible autorité de l'Église ». Cependant, il avait parlé des libertés modernes avec un tel enthousiasme qu’il semblait ne point avoir d’autre idéal ; prononcés au moment où le 1 iémont dépouillait le pape de ses États et introduisait dans ses lois l’indifTérentisme religieux sous prétexte de liberté, les discours de Matines parurent faire revivre, en 1863, le libéralisme condamné trente ans auparavant. De nombreux évêques intervinrent a Rome pour demander la condamnation de Montalembert. Mgr Pie signala au pape les paroles regrettables de l’orateur et envoya son vicaire général porter au souverain pontife la lettre qu’il lui écrivit à ce sujet. Cf. Mgr Baunard, op. cit.. p. 206-207. De leur côté les amis de Montalembert, tels les archevêques de Malines et de Tours, firent tous leurs efforts pour le défendre. L'évêque d’Orléans alla lui-même à Rome et, de novembre 1863 à mars 1864, ne comptant ni son temps ni ses peines, multiplia les visites chez le cardinal Antonelli pour empêcher que les discours de Malines fussent traduits devant la Congrégation de l’Index. Cf. Lecanuet, op. cit., p. 370-372. Le pape hésita longtemps ; il lui en coûtait de reprendre ouvertement celui qu’il considérait comme « l’un de ses meilleurs amis ; mais, devant les dénonciations qui lui parvenaient de plus en plus nombreuses, il chargea le cardinal Antonelli, dans les premiers jours de mars 1864. de transmettre à Montalembert un blâme secret. Voir la lettre du cardinal dans Lecanuet, op. cit., p. 373. L’orateur s’abstint de paraître au deuxième

congrès de Malines pour ne point aggraver la tension des esprits ; pourtant l’opposition aux catholiques libéraux se lit plus grande dans les derniers mois de l’année 1864. Mgr Pie, dans ses Entretiens avec le clergé durant les exercices de la retraite, releva les « erreurs doctrinales » qu’il avait trouvées dans les discours de Malines et établit surtout le bien-fondé des immunités ecclésiastiques, que Montalembert lui paraissait sacrifier de bon cœur. Cf. Œuvres de Mgr Pie, t. v, p. 335-357. Dans une autre publication plus importante encore, intitulée Troisième instruction synodale sur les principales erreurs du temps présent, l'évêque de Poitiers combattit le naturalisme sous toutes ses formes et particulièrement le naturalisme « prétendu catholique, qui admet le règne de Jésus-Christ dans l’ordre des choses privées, mais l'évincé absolument dans l’ordre des choses publiques ». Cf. l’analyse et l’appréciation de la brochure dans Mgr Baunard, op. cit., p. 215-219. Les défenseurs de l'Église se trouvaient plus divisés que jamais ; le Saint-Siège crut donc le moment venu de faire entendre une parole autorisée et souveraine sur les questions si délicates, qui opposaient les uns aux autres les catholiques euxmêmes.

3° La publication du Syllabus.. — Le 8 décembre 1864 paraissaient deux documents pontificaux : l’encyclique Quanta cura et le Syllabus. A cause de leur publication simultanée et de la similitude des erreurs qui sont combattues dans l’un et l’autre écrit, ils forment un tout et ne peuvent guère être étudiés l’un sans l’autre. Toutefois il importe de constater que, s’ils furent envoyés tous les deux à l'épiscopat catholique, ils ne furent pas présentés dans les mêmes termes à leurs destinataires. L’encyclique portait l’entête traditionnel : « A tous nos vénérables frères, les patriarches, les primats, les archevêques et évêques en grâce et en communion avec le Siège apostolique, Pie IX, pape. » Au Syllabus était annexée une lettre du cardinal Antonelli, secrétaire d'État, qui annonçait officiellement aux évêques l’envoi du recueil. A cause de sa particulière importance, il est nécessaire d’en transcrire les passages principaux. « Le pape, disait le cardinal, n’a jamais cessé, depuis le début de son pontificat, de proscrire et de condamner, par ses encycliques, ses allocutions consistoriales et d’autres lettres apostoliques déjà publiées, les erreurs les plus importantes et les fausses doctrines, surtout celles de notre très malheureuse époque. Mais, comme il aurait pu arriver que tous ces actes pontificaux ne fussent point parvenus à chacun des Ordinaires, le souverain pontife a voulu que l’on rédigeât un Syllabus de ces mêmes erreurs, destiné à être envoyé à tous les évêques du monde catholique. Quant à moi, ajoutait le cardinal, il m’a ordonné de veiller à ce que ce Syllabus imprimé vous fût expédié, Illustrissime et Révérendissime Seigneur, à l’occasion et au temps où le même souverain pontife, par suite de sa grande sollicitude, …a jugé à propos d'écrire une autre lettre encyclique à tous les évêques catholiques. Ainsi exécutant, comme c’est mon devoir, avec tout le zèle et le respect qui conviennent, les ordres du même pontife, je m’empresse de vous envoyer ce Syllabus avec cette lettre. »

Le Syllabus se présentait, tel qu’il était sorti des mains des théologiens en 1863, avec l'énoncé de quatre-vingts propositions et, après chacune, l’indication des sources, mais sans signature et sans date. La forme d’un tel document était insolite ; la réaction à son apparition fut extraordinaire.

Après lu publication du Syllabus.

Jamais, peutêtre, un écrit pontifical ne souleva pareille émotion.

On imagine a peine maintenant les sarcasmes des ennemis de l'Église, les applaudissements enthousiastes de nombre de catholiques, les restrictions de plu-