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    1. SYLLABUS##


SYLLABUS. PRÉPARATION

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noine Cossa, professeur, le P. Galti, dominicain, et le P. Bernard Smith, bénédictin du Mont-Cassin. Cf. Hourat, op. cit., t. ii, p. 25. Les réunions se tinrent alors nombreuses, on en compta sept en septembre, autant en novembre et décembre et un certain nombre en janvier et février 1862. Les discussions portèrent principalement sur la censure dont il convenait de marquer chaque proposition. On distribua aux théologiens un opuscule intitulé Observations sur les soixante-dix propositions, qui servit de matière aux délibérations, et finalement, au cours de février 1862, la commission fit paraître le résultat de ses travaux. C’était un catalogue imprimé sur deux colonnes ; la première, sous le titre : Thèses ad apostolicam Sedem delatse, contenait les propositions sans aucune division par groupes ; les théologiens en avaient ramené le nombre de soixante-dix à soixante et une ; l’autre colonne portait, en face de chacune des propositions, une ou plusieurs notes théologiques avec le titre : Censurée a nonnullis theologis propositse. Voir le texte dans Hourat, op. cit., t. ii, p. 28 sq.

Le catalogue ainsi composé fut remis à Pie IX, qui profita d’une circonstance solennelle pour en élargir la diffusion. En juin 1862. la canonisation des martyrs japonais et du bienheureux Michel de Sanctis avait amené à Rome plus de trois cents évêques venus de tous les pays du monde. Le pape leur fit communiquer le futur Syllabus. Sous le sceau du secret le plus rigoureux, il leur demandait de collaborer à l’œuvre qu’il avait entreprise. Chaque évêque devait examiner attentivement les propositions et les censures, prendre avis d’un théologien de son choix, soumettre à Rome, s’il le jugeait bon, d’autres propositions à condamner et faire remettre dans un délai de deux mois toutes ses observations au cardinal Caterini. Les réponses des évêques sont actuellement conservées dans les archives du Saint-Office avec tout ce qui regarde le Syllabus. D’une façon générale, les prélats consultés « approuvèrent les condamnations projetées et, s’il y eut quelques divergences d’idées, ce fut principalement sur le degré de la censure, dont il fallait frapper telle ou telle erreur ». Hourat, op. cit., t. ii, p. 63. Cependant Mgr Dupanloup, par l’intermédiaire du cardinal Antonelli, fit connaître à Pie IX son sentiment. Il regrettait que le projet, au lieu d’être d’origine romaine, fût emprunté presque mot à mot au mandement d’un évêque français ; il prédisait l’orage que soulèverait dans les circonstances présentes la publication du document ; toutefois, remettant au pape le soin de décider s’il voulait affronter la tempête, il l’assurait dans tous les cas qu’il accepterait et au besoin défendrait la décision pontificale. Cf. F. Lagrange, Vie de Monseigneur Dupanloup, t. ii, p. 455.

4. Troisième phase de la préparation (1862-1863). — Le catalogue des soixante et une propositions ne fut pas publié. La raison en fut, peut-être, l’indiscrétion d’un journal hebdomadaire de Turin, hostile au Saint-Siège, le Mediatore. En octobre 1862, ce journal annonça à ses lecteurs le document pontifical, imprima dans ses colonnes les propositions et les censures et critiqua dans plusieurs articles le contenu du Syllabus et la portée de ses condamnations. Immédiatement les ennemis de l’Église se répandirent en insultes violentes et dénoncèrent ouvertement l’intransigeance romaine. La campagne dura plusieurs mois. Pie IX attendit que le calme revînt et, sans doute à cause de cette réaction prématurée de l’opinion publique, abandonna son projet primitif, se réservant de condamner les erreurs modernes par un autre moyen. A maintes reprises, dans des allocutions, des encycliques, des lettres apostoliques, il les avait signalées et proscrites ; il serait bien simple de les extraire de ces divers documents et d’en faire un nouveau catalogue. A cette fin,

Pie IX nomma une commission qui travailla pendant plus d’un an. On procédait de la façon suivante. « On avait sous les yeux d’un côté les erreurs du temps présent, dénoncées au Saint-Siège par les évêques et les savants laïques, avec les commentaires qu’ils y avaient joints…, d’un autre côté les encycliques, les allocutions et les lettres apostoliques de Pie IX, et l’on cherchait quelles étaient celles où les erreurs avaient été condamnées. » F. Desjacques, dans Études, loc. cit., p. 377. Finalement quatre-vingts propositions furent réunies et réparties en dix paragraphes, sans qu’on eût d’abord indiqué l’endroit d’où elles avaient été tirées. Sur la remarque du P. Bilio, barnabite, on jugea préférable de les faire suivre de l’indication des sources, afin que l’on pût se référer pour le contexte aux documents pontificaux eux-mêmes. Le P. Bilio, chargé de l’exécution de ce travail, mit ainsi la dernière main à une œuvre qui avait demandé près de douze ans d’études préparatoires.

Avant la publication du Syllabus.

S’ils ne furent

pas la cause du Syllabus, puisque sa préparation était déjà finie, certains événements des années 1863 et 1864 décidèrent Pie IX à publier au plus tôt ce catalogue ; on peut citer parmi les principaux l’apparition de la Vie de Jésus de Renan, le congrès de Munich et surtout les congrès de Malines.

1. L’apparition de la Vie de Jésus.

Ce livre de Renan, dès qu’il fut édité en 1863, connut un prodigieux succès ; des éditions multipliées l’introduisirent en peu de temps dans tous les milieux, le scandale fut immense et les catholiques voulurent dénoncer « ce fruit le plus empoisonné du naturalisme moderne ». L’un des premiers, Mgr Pie, évêque de Poitiers, devant son clergé réuni en synode, flétrit solennellement l’auteur, et se plaignit en termes amers que les pouvoirs publics eussent toléré la publication et la diffusion d’un livre « d’une telle impiété ». Cf. Mgr Baunard, Histoire du cardinal Pie, Paris, 1886, t. ii, p. 193. Vexés de cette part de responsabilité qu’on attribuait au gouvernement, les journaux libéraux entreprirent alors une campagne, dont le ton est donné par cette phrase du Journal des Débats : « Après l’autodafé qu’il vient de prononcer, il ne manque plus au nouvel inquisiteur que de faire appel au bras séculier. » Op. cit., p. 195. Ces luttes violentes contre l’Église, autant que les attaques de Renan contre les dogmes les plus sacrés, appelaient de la part du souverain pontife une riposte qui ne devait pas tarder.

2. Le congrès de Munich.

En Allemagne, un certain nombre d’intellectuels s’étaient groupés sous la conduite de Dœllinger. Entre autres prétentions, ils voulaient rejeter la vieille conception de la théologie basée sur la scolastique, pour lui substituer une autre théologie, dont les fondements seraient la philosophie moderne et l’histoire. Leur but était, au fond, de chercher non plus à Rome mais en Allemagne la direction de la pensée catholique. Cf. art. Libéralisme, t. ix, col. 598. Ce groupe réunit en congrès à Munich (septembre 1863) des théologiens et des savants allemands ; Dœllinger, dans un discours remarqué, y exposa ses idées. Tout en se montrant satisfait de l’adresse des congressistes au Saint-Siège, le pape, dans une lettre à l’archevêque de Munich, rappela alors les devoirs de respect et de soumission qui incombaient aux fidèles vis-à-vis des décisions doctrinales de la hiérarchie ecclésiastique. Cf. de longs passages de la lettre pontificale Tuas libenter du 21 décembre 1863, dans L. Choupin, Valeur des décisions doctrinales et disciplinaires du Saint-Siège, Paris, 1928, p. 219-227. Plusieurs propositions du Syllabus en seront extraites.

3. Les congrès de Malines.

D’autre part, du 18 au 22 avril 1863, se tint à Malines sur l’initiative des