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SI l’ERSTITION. CILIE FAIX DE DIEU

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rapprochant ce qui est de soi un excès de religion et ce qui ne l’est pas nécessairement et qui peut être tout

le contraire.

Distinction à établir parmi les superstitions cultuelles.

Dans la classe des superstitions cultuelles, la

diversité des espèces est très grande, depuis les rites sauvages du fétichiste jusqu'à la pieuse prière du dévot indiscret. En toutes ces superstitions, il y a un culte véritable, explicité en des actes de religion, et un culte de suprême révérence, un culte divin. Mais les espèces s’y diversifient suivant l’objet du culte. I.e culte divin, en effet. peut être rendu soit à celui qui y a droit, au vrai I)icu. et cependant d’une manière indue : c’est une première espèce de superstition ; soit à qui n’y a pas droit, à une créature quelconque ; voilà une autre forme de superstition… » IIa-IIæ, q. xcii, a. 2. I.a première espèce, le culte indu, l’altération du culte du vrai Dieu ou, comme disent les derniers scolastiques, cultus vitiosus veri nominis, se trompe sur la manière d’honorer le vrai Dieu, sur Vobjectum formule quod du culte à lui offrir ; la seconde, le culte des faux dieux, cultus falsi nominis, se trompe avant tout sur son destinataire, sur t’objectum cui. Cf. II a -II s, (|. lxxxi, a. 5. Les Pères de l'Église appelaient plus simplement celle-ci l’idolâtrie. C’est cette religion des faux dieux qu’il faut mettre en tête des superstitions cultuelles, puisqu’aussi bien c’est à elle que fut réservé pendant les premiers siècles île l'Église le nom de superstition. L’idolâtrie est le type achevé de la superstition et historiquement l’archétype de toutes les autres espèces. En se trompant d’adresse, le culte idolâtrique, par la logique de l’erreur, se trompe aussi dans l’expression du culte divin. Il-'-Il" 3, q. exiv, a. 3, ad l um. Or, c’est en empruntant ou copiant ces aberrations des païens que naîtra le culte faux et le culte superflu du vrai Dieu. Les pratiques non cultuelles qu’on range aussi parmi les dernières superstitions, l’ont été parce qu’on les a assimilées à l’idolâtrie expresse. Il en a été traité amplement à l’art. Idolâtrie de ce dictionnaire. I. vii, col. 602-669 ; mais il faut avoir bien présent à l’esprit ce qui la concerne pour comprendre renseignement de l'Écriture sainte et de la théologie sur le culte indu du vrai I >ieu.

III. Le culte faux du vrai Dieu.

Dans le culte indu du vrai Dieu, on distingue à première vue deux sortes de superstitions : le culte faux et le culte simplement superflu. Les théologiens ont trouvé commode de rapporter ces deux formes voisines aux deux termes de la déclaration de Notre-Seigneur en saint .Lan, iv, 24 : Eos qui adorant eum in spirilu et verilale oportei adorare. Il est bien clair que les cultes taux s’opposent a la - vérité » de la religion, et que les cultes superflus sont contraires au « culte en esprit », parce ipie celui qui s’absorbe tout entier en des pratiques extérieures ne fait aucun progrès dans la religion de l’esprit ». Cajétan, In lh m -ll*, q. xciii, a. 1.

La distinction précédente, faite a priori, apparaît bien claire, ri exclusive d’un troisième terme, o Il est certain, remarque Suarez, que toute pratique superstitieuse », l’idolâtrie, par exemple, « contient une fausseté fondamentale, une opposition à l’institution ecclésiastique, de même que toutes les superstitions sont, par définition, superflues. ».Mais l’idolâtrie, on ne peut l’oublier, s’oppose à la simple raison, puisqu’elle n’est pas un culte du vrai Dieu, et les dernières formes dites superstitieuses, a notre avis, ne sont pas

un culte quelconque. Notre division bipartite est donc

juste et permet de distinguer, parmi les contrefaçons du culte du Mai Dieu, celles qui ont une signification Fausse, comme serait la circoncision d’un chrétien, et, d’autre part, des usages simplement inutiles.

Le culte lau du vrai Dieu, vrai dans ses aspirations, s’adressant au vrai Dieu, est fau dans ses réa lisations, puisqu’il s’oppose à la vérité de l'Évangile ». 1° Dans l’Ecriture.

Saint Paul s’en préoccupait

quand il détournait les chrétiens de rien prendre des observances mosaïques ou païennes. Dans les épttres de la captivité, il les stigmatise comme des pratiques que ses anciens convertis sont tentés d’adjoindre au culte du vrai Dieu. S’il les condamne, ce n’est pas à titre de pratiques extérieures, puisque lui-même prêche le baptême. Col., II, 12. la prière et les bonnes oeuvres, Epb., v, 9 et 19. mais parce qu’elles sont opposées a la foi au Christ, en particulier aux rites chrétiens reconnus par tous les baptisés et qui emportent le renoncement aux rites étrangers, qu’ils viennent du judaïsme ou du gnosticisme naissant. Ce qui compte, c’est le baptême : il remplace la circoncision juive et supprime les autres ordonnances mosaïques. Ici, saint Paul, ne porte pas de jugement de valeur contre ces pratiques étrangères, mais il les déclare en contradiction avec « la vérité de l'Évangile ». Gal., Il, 5.

Nous devons pourtant remarquer que le verdict de Paul est beaucoup moins tranchant pour les pratiques judaïques que pour les autres. Néanmoins, pour les Juifs venus à la foi chrétienne, il y a plus à perdre qu'à gagner dans la pratique de la Loi : « Toutes ces choses qui étaient pour moi quif) des gains, je les ai considérées comme des pertes, en regard de la connaissance du Christ. » Phil., m. 7-S. Les judaïsants qui cherchent à imposer les observances mosaïques aux Gentils convertis sont « de mauvais ouvriers », qui enseignent - un Évangile cpii n’en est pas un ». Gal., i, G. Ces prescriptions sans autorité sont-elles donc pernicieuses et fausses ? Saint Paul, qui le pense sans doute, dit seulement qu’elles sont gênantes et sans valeur sanctifiante. L'épître aux Hébreux, d’un ton plus didactique, est, au fond, bien plus catégorique : « La Loi, n’ayant que l’ombre des réalités chrétiennes, est tout à fait incapable, par ses sacri lices, de rendre parfaits ceux qui y participent… Le Christ dit alors : Me voici. C’est abolir le premier régime [jour établir le second. » Heb., x, 1, 9.

l’our les usages païens, leur introduction dans la religion nouvelle serait plus coupable encore, parce qu’ils sont faux et immoraux. Ils sont anciens, mais viennent d’une « tradition tout humaine, selon les rudiments du monde ». Col., Il, S, 20. Ces sortes de choses ont renom de sagesse avec leur culte capricieux, è0eXo0p7)CTxia. « Mais au fond, elles n’ont aucune valeur que pour la chair. » Ibid., 21-23. Le plus grave danger de ces pratiques, c’est que, après avoirencombré la vie religieuse, elles nous feraient perdre de vue les vraies sources de salut. Cet asservissement à des moyens inellieaces aboutit à une apostasie de la vie chrétienne : « Veillez à ce que personne ne fasse de vous sa proie par le moyen de la philosophie, i Ibid., 8.

Au temps des épîtres pastorales, la menace est devenue une réalité. Les condamnations de l’Apôtre s’accentuent : les enseignements humains sont qualifiés d' « enseignements de démons : les règlements superstitieux viennent de l’hypocrisie d’imposteurs qui interdisent le mariage, les aliments crées par Dieu », I Tim., iv, 3, et préconisent toute une ascèse, ibid., îv, 8 : ce sont des gnostiques. Il y a aussi des superstitions d’un tout autre genre : » fables profanes, contes de bonnes femmes, qu’il faut éviter. » iv, 7. Paul les met sur le même pied que les spéculations de la gnose. I Tim., VI, 2M.

Quelle était la portée de cette sanction"? Si les discussions sur la Loi étaient vailles, est ce que les (('livres de la Loi n'étaient pas pernicieuses'.' Saint Jérôme et saint Augustin oui eu. a leur sujet, une mémorable discussion, s. Jérôme, Epist., exii, /'. l… t. xxii, col. 927 ; S. Augustin. Epist., Cil, t. XXXIII, col. 276 sq. : décider si les tax-nt legis étaient, dès ce