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SOMMES THÉOLOGIQUES. CARACTÉRISTIQUES


Rinant est aussi l’auteur d’un Ars arengandi (de haranguer) Comme les précédents ouvrages étaient des sommes de l’art de bien écrira, il y en a également de l’art de bien dire. Ce sont en particulier ces Summæ de modis dilatandi circa artem prædicandi, pour prendre le titre de l’ouvrage de Richard de Thetford (souvent attribué a Albert le Grand), le plus important et le plus typique d’entre eux. Voir Th.-M. Charland, Arles pr.rdicandi, Ottawa. 1936, p. 77-80. On a mentionné plus haut les sommes-collections de sermons, les résumés aussi ; il est juste de rappeler qu’il y a de véritables traités consacrés à exposer ainsi les principes de l’art oratoire, mais surtout de l'éloquence sacrée.

Quand on aura signalé enfin l’existence de sommes apologétiques visant à l’exposé et à la réfutation d’erreurs plus ou moins répandues, comme la plus célèbre d’entre elles (pour ne pas soulever le problème de la Summa contra gentiles) la Summa contra catharos et valdenses écrite vers 121 1 sans doute par le dominicain Moneta de Bologne, édit. Rome, 1743 (voir ici l’art. Moneta. t. x. col. 2211-2215) ; ou bien la Summa contra hæreticos de Prévostin, étudiée par Lacombe, La vie et les œuvres de Prévostin, 1927, p. 131-152 ; l’existence aussi de véritables sommes liturgiques, telle la somme de Jean Beletta, De ecclesiasticis officiis, ou, chez Prévostin, sa Summa de officiis, largement utilisée et insérée presque en entier par Guillaume Durand dans son Nationale divinorum officiorum, on aura une vue rapide encore, mais à peu près exacte, de ces nombreuses productions qui portent, à bon escient d’ailleurs, le nom de sommes, et qui risqueraient parfois de donner le change sur les véritables sommes de théologie.

A l’intérieur de la faculté de théologie.

Celles-ci,

par définition, doivent se consacrer directement aux problèmes théologiques. N'étant ni abrégés, ni simples collections de textes, elles doivent fournir un exposé organique, systématique ; la personnalité de l’auteur y prendra forcément plus de relief ; car c’est lui qui choisit, dispose, agence toute sa démonstration.

Cependant, comme on l’a laissé entrevoir plus haut, les ambitions d’un auteur ne sont pas toujours aussi vastes que le champ de la théologie elle-même. Sans restreindre son travail aux limites d’une pure monographie, qui ne mériterait plus alors à aucun titre le nom de somme, il arrive assez souvent qu’il se cantonne dans une partie plus ou moins large du savoir théologique. On se trouve par le fait même en présence de sommes partielles, vraies sommes de théologie, mais incomplètes encore. Le plus grand nombre de celles-ci tournent autour du traité des sacrements en général, ou de tel sacrement en particulier, mariage ou pénitence surtout ; autour du péché aussi, des vertus ou des vices. C’est, on le comprend, un but plus immédiatement pratique qui a déterminé alors le choix de l’auteur : le désir de fournir soit aux pénitents, soit plus encore aux confesseurs, les connaissances nécessaires pour la direction des âmes, le redressement des nmurs et les progrès dans la vie chrétienne. Suivant que ces problèmes sont envisagés davantage du point de vue théologique ou du point de vue canonique, on rencontrera donc des sommes qu’on peut appeler théologico-morales, d’autres théologico-canoniques, partielles d’ailleurs les unes et les autres. On trouvera sur cette abondante production les principaux éléments d'étude dans J. Dietterle, Die Summa confessorum sive de casibus conscienliæ von iliren Anfûngen an bis zu Silvester Prierias, dans Zeitschrift fur K irchengeschichte, t. xxiv (1903), a xxvi (1905) pour les XIIe et xiii c siècles ; t. xxvi et xxvii pour les deux siècles suivants ; du même, Die franziskanisclicn Summæ confessorum und ihre Bestimmungen liber den Ablass,

Dôbeln, 1893. Se reporter ici à l’art. Pénitence, t. xii, col. 948.

En schématisant un peu, il serait possible de rattacher à la tendance théologico-canonique les Summæ confessorum ou les Summæ de casibus, à la tendance plus théologico-morale, les Summæ de pœnitentia ou De viriutibus et viliis. La réalité est plus nuancée, évidemment ; d’ailleurs ces deux tendances sont assez souvent complémentaires.

Comme représentant la première on peut mentionner par exemple la Summa de casibus de Burchard de Strasbourg, O. P., vers 1280-1290 ; la Summa confessorum composée entre 1280 et 1298 par Jean de Fribourg († 1314), voir ici, t. vii, col. 76, éditée à Lyon en 1518, avec son adaptation allemande parBerthold Huenlen ; la Summa confessorum attribuée à Guillaume de Cayeux, O. P. ; la Summa de officio sacerdolis d’Albert deBrescia(† 1314). De celle-ci aussi une adaptation a été faite par un dominicain allemand anonyme : la Summa rudium. Voici encore la Summa d’Astesano, vers 1317 ; la Summa collectionum pro confessionibus audiendis, de Durand de Campania (t vers 1 330) ; et plus tard, vers 1338, la Summa de casibus conscienliæ de Barthélémy de Pise, O. P. (voir ici, t. ii, col. 435) ; celle enfin de saint Antonin.

Celle-ci pourtant porte le titre de Summa theologica moralis ou Summa confessionalis. Elle relève donc autant de l’autre tendance, qui ne manque pas non plus de nombreux et illustres représentants. Pour ne plus parler de la Somme de Simon de Hinton, qui en est toute proche pourtant, mais qui a davantage allure de résumé, ni de celle de Maître Paul de Hongrie, il faut citer la Summa de pœnitentia et officiis ecclesiasticis de Thomas de Chabham, qui subsiste en de nombreux exemplaires et qui eut plusieurs éditions ; la Summa de pœnitentia de Jean de Galles ; celle de Raymond de Penafort signalée plus haut ; la Summa de virtutibus de Jean de La Rochelle ; la Summa de vitiis etvirtutibus de Guillaume Pérauld, O. P., et bien d’autres semblables. Sans doute la préoccupation pastorale, pratique, y est-elle fortement marquée ; il y a cependant tout l’exposé personnel de la doctrine qui la soutient, et qui fait de ces écrits de vraies sommes de théologie.

Il faudrait enfin placer auprès d’elles les sommes partielles qui n’ont pas cette même allure pratique. La tâche est assez délicate cependant. Il se peut en effet qu’on ait affaire à des sommes restées inachevées, ou du moins à des ébauches qui, dans l’intention de l’auteur, devaient s’insérer dans un ensemble plus large ; telle peut être cette Summa de virtutibus, attribuée parfois à Guillaume de Méliton et destinée à entrer dans la troisième partie de la somme d’Alexandre de Halès ; ou certaines Summæ de sacramentis qui sont probablement les parties survivantes de sommes disparues. Parfois au contraire, malgré le nom qui leur est donné, ce sont plutôt des traités détachés et développés, que de véritables sommes. C’est probablement le cas de la Summa de ecclesiastica potestate d’Augustin d’Ancône. Le De regimine christiano de Jacques de Viterbe, lui, prend plus modestement le titre d’opuscule. Sans vouloir préciser outre mesure, il était nécessaire du moins d’indiquer l’existence de ces catégories intermédiaires.

IL Les sommes théologiques. — Au terme de toutes ces éliminations on arrive donc aux sommes théologiques proprement dites ; à celles qui réunissent en perfection tous les traits que les autres ne possèdent qu’en partie : exposés personnels, organiques, complets et concis à la fois, de tout le savoir théologique.

I. BOltMEa ET SENTENCES.

C’est à ces œuvres que l’on songe quand on oppose sommes à sentences, sommistes à sentenciers. Encore faut-il préciser sa