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SOLLICITATION

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seurs séculiers ou réguliers qui auraient sollicité au mal des femmes au cours de leur confession. Paul V, après avoir étendu cette discipline au Portugal (1608), décida, le 16 novembre 1612, qu’elle était applicable, même en vertu de la constitution de Pie IV, à ceux qui auraient sollicité des pénitents de sexe masculin. Dix ans après, Grégoire XV (constit. Universi, 30 août 1622) étendit cette discipline à l’univers entier, en précisant la nature du délit, en aggravant les peines à infliger aux coupables, et en obligeant à les dénoncer. Cette obligation de dénoncer les suspects d’hérésie, et donc les sollicitants, fut sanctionnée (Saint-Oflice, 3 janv. 1623) de la peine d’excommunication et étendue (Saint-Office, 10 mars 1677), en plus du pénitent sollicité, à toute personne sachant avec certitude que ce délit a été commis. Benoît XIV, dans sa constitution Sacramentum pœnitentiæ (1 er juin 1741), fit un exposé complet de la discipline en vigueur, et réserva exclusivement au Saint-Siège le péché de fausse dénonciation.

II. Disciplineactuelle.

Elle est contenue dans les canons 894 (réserve du péché de fausse dénonciation), 904 (obligation de dénoncer le prêtre sollicitant), 2363 (peines contre la fausse dénonciation), 2368, § 1 (peines contre le prêtre sollicitant), 2368, § 2 (peines contre le pénitent qui omet délibérément la dénonciation). Nous étudierons successivement, d’après ces textes : 1° la nature du délit de sollicitation ; 2° la dénonciation de ce délit ; 3° sa punition.

Nature du délit.

Pour qu’il y ait sollicitatio ad

turpia, plusieurs conditions sont requises : 1. Il faut que le pénitent soit invité à commettre (ou à faire commettre par un tiers) un péché grave contre la chasteté, et non pas contre une autre vertu. Il n’est pas nécessaire qu’il s’agisse d’un péché à commettre avec le confesseur ; il peut s’agir d’un péché à commettre seul ou avec un tiers. Peu importe aussi le sexe du pénitent ou du complice éventuel, s’il y en a un. Ce péché grave n’est pas nécessairement un péché d’action ; ce peut être aussi un péché de parole (mauvaise conversation, mauvaise lecture, etc.) ; peut-être même un péché intérieur de pensée ou de désir. Ainsi Berardi, n. 45 sq., de Smet, n. 65 ; contre Cappello, n. 668.

2. Il faut qu’il y ait sollicitatio, c’est-à-dire que le confesseur se propose expressément de provoquer son pénitent au mal par paroles, par écrit, par signes, par gestes, par actions. Des présents olïerts au pénitent, des louanges décernées à sa beauté, des conversations légères, des solutions morales laxistes peuvent suffire à traduire à l’extérieur cette intention et constituer le délit de sollicitation. Si le confesseur n’a pas cette intention mauvaise, le délit n’existe pas : mais il est présumé (can. 2200, § 2) lorsque l’attitude extérieure du confesseur (gestes ou paroles) est d’elle-même gravement provocatrice. Notons aussi que la sollicitation peut exister, même si c’est le pénitent qui a pris l’initiative de provoquer au mal son confesseur. Il suffit que ce dernier, en cédant à la sollicitation du pénitent, l’encourage par là même au mal. Saint-Office, Il févr. 1661, ad 9um. Il n’est pas nécessaire ni que le pénitent ait cédé à la sollicitation du confesseur, ni même qu’il en ait eu conscience.

3. Il faut en lin que la sollicitation au mal ait quelque connexion avec l’administration du sacrement de pénitence, c’est-à-dire qu’elle ait lieu, ou du moins soit commencée, par exemple, par la remise d’un billet provocateur, « soit dans l’acte même de la confession sacramentelle, soit Immédiatement avant ou après la confession, soit à l’occasion de la confession, ou sous prétexte de confession, soit même, sans qu’il y ail confession, dans le confessionnal, ou dans un autre lieu destiné à entendre les confessions, OU dans un autre lieu choisi, si le confesseur y fait semblant d’entendre son péni tent en confession ». Benoît XIV, const. Sacramentum psenilenliæ.

Dénonciation du délit.

1. Doivent être dénoncés

au Saint-Oflice ou à l’Ordinaire du lieu : les prêtres coupables de ce délit, quelle que soit leur dignité, et même plus probablement les évêques. Le droit positif ne prescrit pas de dénoncer ceux qui ne sont pas prêtres. L’obligation de dénoncer subsiste, même si le prêtre coupable s’est dénoncé lui-même, ou s’est, depuis, entièrement amendé. Toutefois, suivant une opinion probable, l’obligation cesserait si la conversion de ce prètie était tellement parfaite qu’il n’y eût absolument et certainement aucune rechute à craindre, et par ailleurs aucun scandale à réparer. Mais ce ne peut être qu’une rarissime exception.

2. Sont tenus à faire la dénonciation : les pénitents sollicités, même s’ils savent que la dénonciation a déjà été faite par d’autres, même s’ils ont promis ou juré de ne pas dénoncer le prêtre coupable. Le prêtre qui les confesse a l’obligation grave de conscience de leur faire connaître cette obligation. Can. 904. Si un pénitent sollicité omettait sciemment de faire, dans le mois, la dénonciation prescrite, il encourrait une excommunication non réservée, mais dont il ne pourrait être absous qu’après avoir satisfait à son obligation ou avoir promis sérieusement d’y satisfaire. Can. 2368, § 2. Sont également tenus à faire la dénonciation, au moins de droit naturel dans les cas prévus au canon 1935, § 2, mais sans qu’il y ait de peines portées contre les négligents, les tiers qui savent avec certitude que ce délit a été commis. Us y étaient tenus d’après le droit positif antérieur, et certains auteurs soutiennent encore — à tort, semble-t-il (voir instr. du 9 juin 1922) — que le Code, en se référant à la constitution de Benoît XIV, a implicitement maintenu cette obligation. Il paraît bien cependant que le canon 904 s’applique aux seuls pénitents.

Certaines raisons très graves pourraient excuser de la dénonciation ou permettre de la différer. Voir Cappello, n. 702 et 703.

3. Celui qui dénoncerait faussement, par lui-même ou par d’autres, aux juges ou supérieurs ecclésiastiques comme coupable de sollicitatio ad turpia un prêtre innocent, commettrait un péché réservé au SaintSiège, can. 904, et de plus encourrait ipso facto une excommunication spécialement réservée au SaintSiège. Can. 2363. De cette excommunication il ne pourrait en aucun cas être absous s’il n’avait pas formellement rétracté sa fausse dénonciation et réparé, dans toute la mesure où il le peut, les dommages qui en seraient résultés. Lue grave et longue pénitence doit de plus lui être Imposée. Ibid.

4. Les auteurs de théologie morale donnent toutes les précisions utiles sur la manière de faire la dénonciation.

Punition du délit.

Aucune peine n’est encourue

ipso facto par le prêtre sollicitant. Mais, une fois la dénonciation reçue, l’Ordinaire du lieu engage la procédure, en se conformant strictement à l’instruction secrète du Saint-Ollicc du 9 juin 1922. Les peines qui peuvent être portées contre le piètre sollicitant, et que le juge déterminera en tenant compte du nombre et de la qualité des victimes, de la laideur et de la fréquence des actes coupables, sont cnuincrées au canon 2.'Ui<S, § 1 : suspense de la célébration de la messe, du pouvoir d’entendre les confessions, privation de bénéfices, de dignités, de voix active et passive, et même dégradation dans les cas extrêmes. Ces peines seront complétées, le cas échéant, par des pénitences, des déplacements d’ofllee, et autres mesures administratives opportunes, suivant les circonstances.

Berardi, De sollicitation ? et absolutions compilais, 1897 ; Mun >, /><' peccatosollicltattonis, àan » Canoniste contemporain,