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l’Espagne, et combattra a ec vigueur le résaropapisme de ses rois, là où il le jugeait nécessaire. Il s’opposa énergiquement à différentes tentatives faites par le roi Philippe II contre les droits de l'Église, dont la principale est la « Pragmatique des titres », publiée par ce souverain eu octobre 1586 et par laquelle le roi s’attribuait le droit de conférer des titres aux ecclésiastiques. A peine Sixte V eut-il connaissance de ce document, qu’il menaça de le mettre à l’Index si le roi ne retirait les dispositions à l'égard des ecclésiastiques et, dans le consistoire du 27 juillet 1587, il défendit aux cardinaux, sous peine d’excommunication réservée au souverain pontife, de recevoir des lettres de l’Espagne, dans lesquelles on ne leur donnerait pas le titre qui leur était dû. De plus il s’elTorça d’arrêter l’extension de l’hégémonie espagnole, partout où cela lui était possible, principalement dans les guerres de religion en France et en Angleterre.

2. La France.

A l’avènement au pouvoir de Sixte V, la France, sous le gouvernement de Henri III, était en proie à la guerre civile, qui opposait les huguenots dirigés par Henri de Navarre, et la Ligue des catholiques menée par Henri de Guise, dit le Balafré. A la demande de secours que lui fit Henri III, le pape répondit, au début de juin 1585, qu’il était décidé à soutenir le roi de France non seulement de son argent et de son autorité, mais aussi de sonsang. L’attitude du pape à l'égard du roi de France était donc claire et il ne s’en départira pas pendant toute la durée de sou pontificat. Il lui fut plus difficile de prendre position à l'égard de la Ligue, parce que les opinions elles-mêmes étaient divisées. Tandis que l’ambassadeur espagnol, le comte Henri d’Olivarès, et le cardinal Nicolas Pellevé lui présentaient les ligueurs comme les uniques soutiens d’une restauration catholique, qu’il fallait dès lors approuver sans réserve, l’ambassadeur.Jean de Vivonne et le cardinal Louis d’F.ste voyaient plutôt en eux des intrigants qui, sous prétexte de défendre la foi, servaient les ambitieux desseins dos Guises, principalement du chef de la Ligue, Henri le Balafré, Le discrédit de Henri III et les difficultés de sa succession, causées par le fait qu’Henri de Navarre était passé au protestantisme, faisaient entrevoir au duc de quise la possibilité de ceindre la couronne. Four servir ce dessein, il avait patronné, dès le 31 décembre 158 I, flans un acte signé à Joinville par les Guises et l’ambassadeur du roi d’Espagne, la candidature du cardinal Charles de Bourbon, oncle de Henri de Navarre et du prince de (".onde et archevêque de Rouen, comme héritier du trône de France, qui régnerait après la mort de Henri III sous le nom de Charles X, en attendant son accession à lui-même au trône. On faisait aussi remarquer à Sixte V quc la Ligue, impuissante à vaincre seule ses adversaires, ne pourrai ! triompher qu’avec l’aide de l’Espagne et qu’ainsi celle dernière étendrait d’une façon sensible son hégémonie. Le pape restait perplexe, convaincu d’un côté que la Ligue avec l’appui de Philippe II pouvait chasser le calvinisme de la France, mais aussi, d’un autre côté, que la prépondérant espagnole s’imposerait par lu à toute la

chrétienté, il finit par comprendre que, pour conserver en France un contrepoids à l’hégémonie espagnole, il fallait que la France se libérât elle-même par l’entente de tous les catholiques, groupés sous une même bannière, « elle du roi. il travaillera donc sans relâche

à dégager le inou cment ligueur de loiil esprit d’opposition au roi. Ce principe guida toute sa conduite à l'égard de la France.

Après la paix de Ncinouis. conclue entre llenii III cl la Ligue, le 7 juillet 1585, et par laquelle le roi de France S'était allié aux ligueurs et s'était engagé à révoquer toutes les promesses faites aux huguenots,

les déclarant inaptes à exercer n’importe quel office,

principalement a ceindre la couronne de la France, et imposant a tous ses sujets de retourner au catholicisme ou de quitter la France dans les six mois, Sixte V crut le moment venu fie réaliser ses desseins et d’unir tous les catholiques français sous la direction du roi. Convaincu qu’il pourrait séparer définitivement Henri 1Il des huguenots et rendre plus étroite l’union entre le roi et les ligueurs, il promulgua, le 21 septembre 1585, une bulle qui déclarait Henri de Navarre privé île ses droits à la succession royale comme hérétique. Dans la pensée de Sixte Y. l’excommunication d’Henri de Navarre ne taisait que renforcer la paix de Nemours, puisqu’il faudrait être à l’avenir pour la foi catholique avec la Ligue et le roi, ou contre elle avec les huguenots et Henri de Navarre. C'était donc le salut de la France en perspective et le salut sans l’intervention espagnole. Cf. Ch. Poulet, Histoire du christianisme, t. iii, p. 780.

Malheureusement la bulle obtint un effet tout opposé a celui que le pape poursuivait. D’abord, elle rencontra une opposition farouche de la part d’Henri de Navarre, qui déclara la bulle contraire aux lois du royaume et parvint même à faire afficher à Home, le (i novembre 1585, une réplique à l’invalide excommunication de SiXte-Quint. Les publicistes proies tants de leur côté réclamèrent énergiquement et un des » l us célèbres d’entre eux. François I lot manu, édita le Brutum fulmen Sixti Y adversus Henricum regem Navarrse (1585), qui déclarait l’excommunication impie, injuste et fausse, dénonçait le pape comme un archihérétique et un antéchrist et lançait un appel d’Henri de Navarre à un concile libre pour traiter la légitimité de l’excommunication, lai même temps, le Béarnais adressait une protestation, rédigée par Du plessy-Mornay, à la Sorbonne, à la noblesse, au tiers et à la ville de Paris, dans laquelle il réclamait la eonvocation d’un concile et la réunion des États gêné raux. Le Parlement flétrissait en ternies véhéments l’usurpation de Sixte V, qui axait osé s’ingérer dans une question dynastique de la France ; il proposait au roi de jeter publiquement la bulle au feu. La publication (le cette bulle eut encore pour effet qu’un grand nombre de catholiques, qui ne partageaient nullement les idées d’Henri de Navarre, se détachèrent de la Ligue et se rallièrent au Béarnais parce qu’ils considéraient la bulle comme inspirée par des gens qui voulaient troubler la paix et assujettir la France a l’Es pagne. De même les Etats italiens, et en particulier Venise, virent dans celle bulle un acte de faiblesse du pape envers l’Espagne. Les ligueurs, de leur côté, soutenus par le pape et appuyés sur le traité de Nemours,

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De la sorte, à la suite de la bulle d’excommunication d’Henri de Navarre, la guerre civile reprit plus ardente que jamais. Nous n’avons pas à la raconter ici ; rappelons seulement le regain de popularité du Balafré, la formation du Conseil des Seize qui prend la tête de la Ligue, la Journée des barricades i (il mai 1588) qui oblige Henri III à quitter Paris, Ledit de Rouen (19 juillet 1588), par lequel le roi essaie de ressaisir la Ligue, en reprenant les ternies mêmes du traite de Nemours, la réunion à Blois des Etats généraux (septembre 1588), finalement l’assassinat du duc

de quise et de son frère le cardinal (23 décembre), et

l’emprisonnement des principaux chefs de la Ligue, à

commencer par le cardinal Charles de Bourbon.

L’assassinai du 23 décembre suscita la plus vive indignation de Sixte V, d’autant qu’en frappant le cardinal de Cuise et en tenant interne le cardinal de Bourbon, le roi a ail porte atteinte à l’immunité ecclésiastique. Aussi le pape exigea t-il qu’Henri [II demandât l’absolut ion, mais, tout en louanl le zèle des ligueurs, il n’approuva pas leur rébellion contre Henri III,