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SIMONIE DE DROIT DIVIN

de rente ou de pension…) montrent assez que les diverses mesures prises n’avaient pas réussi à déjouer toutes les ruses des simoniaques. Cf. const. In sublimi, 29 août 1741, dans Gasparri, Codicis fontes, t. i, p. 693.

Au xixe siècle, beaucoup de causes qui favorisaient la simonie dans la collation des ordres avaient disparu. Aussi Pie IX, en réorganisant le système pénal de l'Église dans la constitution Apostoliav Sedis (1X69), supprima-t-il les nombreuses censures portées contre les ordinations simoniaques ; mais il conserva un certain nombre de pénalités contre la simonie bénéficiale. Il maintint également, sans grand changement, les sanctions portées par Benoît XIV, const. Quanta cura, 30 juin 1741, contre les trafiquants d’honoraires de messes. Cf. aussi, du même Benoît XIV. la constitution Apostolicæ servitutis (25 févr. 1711), la lettre apostolique Pro eximia (30 juin 1711) et les constitutions Ad militantis, § 6 (30 mars 1742), Quod expensis (20 août 1748).

Il semble d’ailleurs que, vers la fin du xix 1 e siècle, l’attention du Saint-Siège se soit portée plus particulièrement sur la question des honoraires de messes, pour en éliminer les abus et, en particulier, en proscrire tout commerce ou apparence de tralic. A la suite de nombreux décrets ou réponses publiés sur ce point, la S. Congrégation du Concile fit paraître, le 25 mai 1893, un nouveau et important décret, Yigilanti, lequel, approuvé par Léon XIII, frappait les contrevenants de nouvelles censures. En liii, au début de ce siècle, deux autres documents, émanés du même dicastère, Ut débita (Il mai 1904) et Recenti (22 mai 1907), vinrent rappeler, en les renforçant, les prescriptions antérieures sur ce sujet. Voir l’art. Honoraires de messes, t. vii, col. 86 sq.

Aujourd’hui, le code traite expressément de la simonie dans le préambule du t. III, can. 727-730. Des défenses particulières sont en outre portées sur divers points que nous étudierons en détail. Quant aux peines proprement dites, elles sont renfermées dans les canons 2371 et 2392.

III. Simonie de droit divin.

Définition.


Elle est donnée par le code au canon 727, § 1, d’après la formule de saint Thomas, II"- II*, q. c, a. 1. C’est la volonté délibérée d’acheter ou de vendre, pour un prix temporel, des choses spirituelles ou annexées au spirituel.

1. Le mot > volonté » indique assez qu’un acte même purement interne suffît à constituer le péché de simonie. Il n’est donc pas nécessaire qu’intervienne un pacte exprès et formel entre deux contractants : le pacte peut rester tacite et même unilatéral, consistant simplement dans l’intention ou volonté d’obliger en retour. Sans ce pacte onéreux ou volonté d’obliger, il n’y a pas de simonie : tel serait le cas de celui qui, uniquement par espoir de gratitude, accorderait un bien temporel à quelqu’un dont il attend en retour un bienfait spirituel.

Le code ajoute à cette volonté » le qualificatif de stuitiosa, que notre mot fiançais délibéré ne traduit qu’incomplètement. Il ne s’agit pas seulement ici de cette délibération qui est présupposée à tout péché ou délit, mais d’une application attentive et malicieuse au choix des moyens propres à réaliser le tralic simoniaque. Le code, après saint Thomas, loc. cit., semble s’inspirer d’un texte du Décret, caus. 1. q. i, c. 11, faussement attribué a saint Grégoire de Nazianze : Qui studet donitni Dn pretio mercari… En réalité, le texte est extrait d’une lettre île Tamise île Cnnstanlinople, insérée dans les actes du II" concile de Niice. Cf. Hefele-I.eclercq, llist. des conciles, t. ni />. p. 796.

Les termes achat et vente, contenus dans la définition, iloivent s’entendre, dil le canon 728, au sens large, c’est adiré de tout contrat ou échange à litre onéreux. Nous verrons cependant que certains titres.

reconnus par les canons ou une coutume légitime, peuvent justifier le don d’un bien temporel à l’occasion d’un bienfait spirituel. Lan. 730. fin dehors de ces cas bien définis, la malice propre de la simonie consiste à mettre en parallèle deux choses qui ne sauraient être comparées, un bien spirituel et une valeur temporelle. Par argent » ou prix temporel, il faut entendre toute rémunération de l’ordre matériel ou intellectuel, même si celui qui en est l’auteur déclare qu’il n’entend pas donner strictement l'équivalent de ce qu’il reçoit. Il y a en effet une telle disproportion entre le temporel et le spirituel, qu’on ne saurait sans péché les équiparer même partiellement, en faisant du temporel le motif prochain et immédiat de l’obtention du spirituel.

2. Si le péché de simonie peut consister dans un acte de la seule volonté, le délit de simonie ne saurait être constitué que par une action extérieure : cf. can. 2195. Dans le cas où la convention serait restée purement mentale ou simplement tacite, l’intention simoniaque pourra être révélée paries circonstances. Can. 728.

Objet.

Aux termes du canon 727, la simonie de

droit divin peut poiter sur un double objet : res intrinsece spirituales ou bien res temporales rei spirituali adnexse.

1. Les choses intrinsèquement spirituelles sont non seulement des entités immatérielles comme la grâce sanctifiante, l’oraison mentale, etc., mais encore ries choses dont l’entité matérielle a été élevée à l’ordre surnaturel, de telle sorte qu’elles sont considérées comme spirituelles et surnaturelles. Cf. Suarez, De reliyione, tract. III, t. IV, c.xii, n. 4. Le canon 727 cite comme exemples : les sacrements, la juridiction ecclésiastique, la consécration, les indulgences. On peut y ajouter : les dispenses, les bénédictions, les offices ecclésiastiques (en tant que distincts des bénéfices), les sacramentaux, l’assistance au mariage, etc…

2. Quant aux choses temporelles annexées aux choses spirituelles, on peut en distinguer deux espèces :

a) Celles dans lesquelles l'élément temporel ne saurait exister sans l'élément spirituel. Dans ce cas, les deux éléments sont unis de façon inséparable : des que l'élément temporel a reçu une destination ou affectation sacrée qui constitue l’entité spécifique de la res sacra, l’union entre les deux éléments est parfaite et définitive. Ainsi en est-il du bénéfice ecclésiastique, dans lequel le revenu temporel est inséparablement uni à l’office spirituel : si l’un des deux éléments fait défaut, la notion même de bénéfice s'écroule. Cf. can. 1409.

Il en faut ilire autant des reliques : dès là que le caractère sacré de ces restes est fondé sur la relation réellement existante entre la relique et la personne du saint ou du bienheureux, il devient Impossible rie séparer l'élément matériel de l'élément spirituel. Cf. Aertnijs, Theol. nwr.. t. i, n. 116 : voir aussi l’art. Reliques, t. xiii, col. 2375. Signalons à ce propos que certains auteurs rangent, à tort selon nous, la vente ries reliques dans la simonie de droit ecclésiastique. Cf. Génicot-Salsmans, Theol. mur., t. I, n. 289. Il semble bien que ce que l’on vend, en l’estimant à prix d’argent, c’est précisément le caractère sacré de ces restes, car l'élément matériel, surtout s’il s’agit d’ossements, est chose négligeable. D’autres auteurs, comme Fcrreres, Compend. theol. nwr., t. i. n. 381, et Arregui, Summariiim theol. mor., n. 199, s’en tirent en affirmant qu’il n’y a pas de simonie de droit divin à vendre ries reliques renfermées rians une châsse précieuse ». H s’agit de savoir si l’on vend la chasse ou bien les reliques, ou si l’on majore le prix de la chvsSC, à cause ries reliques ; dans ce dernier cas, on n'échappe pas a la noie de simonie de droit divin.

L'élément temporel semble également inséparable rie la chose spirituelle lorsque l’on considère le labeur