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SCRUPULE. CAUSES

17.' ! S

fois être douteuse ; aussi y aurait-il excès à considérer comme scrupuleux le pécheur qui hésite prudemment sur la gravité de ce qu’il a fait.

4. Le jugement obstiné. L’effroi continuel dans lequel vit le scrupuleux risque île fausser sou jugement, ou au moins de le déformer à son insu et ainsi de lui faire prendre une attitude d’obstiné. Il consulte sans doute son confesseur, mais s’en remet péniblement aux conseils prudents qui lui sont lionnes et sollicite toujours de nouvelles explications. Souvent même, pour essayer de mettre fin à son trouble intérieur, il s’adressera à plusieurs prêtres. Mais en vain, car la diversité des avis reçus de ceux qui ne le connaissent pas ne peut qu’accroître son anxiété. Si par ailleurs il agit ainsi, c’est qu’il s’entête le plus souvent dans l’idée que son confesseur habituel ne comprend pas l'état de son âme ou qu’il se persuade qu’il a induit celui-ci en erreur et qu’en conséquence il n’est pas jugé aussi mauvais qu’il l’est en réalité.

5. Certaines attitudes extérieures. Enfin certains scrupukux ont tendance à manifester une grande versatilité dans leur activité extérieure : ce n’est d’ailleurs que le résultat de leur inquiétude et de leur trouble intérieur. De là cette attitude tourmentée dans la récitation de leurs prières, que, dans leur désir de bien faire, ils recommencent sans cesse, ou auxquelles ils voudraient apporter une telle attention, qu’il se produit dans tout leur être une tension physique, maladive. Souvent aussi dans la crainte de mal faire, ils renouvellent avec exagération leur intention de prières. Leur trouble de conscience se révèle parfois en d’autres manifestations désordonnées ; n’en connaît-on pas qui pour chasser leurs tentations intérieures se contractent toute la physionomie et, pour tout dire, expriment leurs sentiments intérieurs en des gestes souvent ridicules.

D’autres symptômes pourraient encore être donnés. Les principaux que nous venons de noter suffiront aux directeurs avisés pour reconnaître les âmes scrupuleuses. Mais, comme aucune de celles-ci ne les produira sous la même forme que les autres, la tâche est délicate. Elle se complique encore du fait que l’objet des scrupules varie d’un sujet à l’autre.

S L’objet du scrupule. — L’objet sur lequel porte le scrupule est plus ou moins étendu : il affecte toute la vie morale d’un être ou seulement un domaine très particulier. Dans ce dernier cas, en général le plus fréepjent, il a trait le plus couramment aux confessions passées, à propos desquelles le sujet se demande s’il a apporté la préparation suffisante, s’il a bien fait son examen de conscience, s’il n’a pas été déficient dans l’accusation des différentes circonstances, s’il a tu la contrition requise surtout au moment où l’absolution lui a été donnée, s’il n’a pas omis ele faire la pénitence imposée, s’il a pris la résolution d'éviter le péché à l’avenir, etc.

Les angoisses ne sont pas moindres lor : qu’elle s affectent les désirs et les pensées, car alors, dans l’impossibilité morale où se trouve le sujet de porter un jug « ment juste, les rêveries, les imaginations et, en somme, toutes les tentations intérieures sont considérées comme des péchés, même si des efforts généreux ont été fait' pour résister au mal et di meurer soumis à Dieu. Les troubles sont d’autant plus profonds que la vertu d’humilité, de foi, de chasteté ou autre, qui est Censée avoir été lésée, est plus appréciée. Parfois aussi le trouble surgit à l’occasion des scandales imaginaires qui ont pu être causés ou à propos de la licéité d’une action, si bien que toute la vie ri' que de se transformer pratique mint en mal. Enfin le scrupule peut porter aussi bien sur un objet du passé que sur un objet du présent ou de l’avenir.

La variété de l’objet du scrupule it son extension rendent le travail du confesseur malaisé, car des sujets

apparemment sains de conscience peuvent parfois être scrupuleux en certains points, si bien que ce

n’est souvent qu’après un contact plus ou moins long avec l'âme que le prêtre parvient à se faire une idée exacte de la culpabilité réelle de son pénitent : alors il est plus à même de rechercher avec lui les causes de son mal.

II. Les causes dus scrupules. - Elles sont multiples : elles peuvent être surnaturelles ou naturelles.

1° Surnaturelles. --- Dieu lui-même est parfois à l’origine des scrupules, non pas qu’il soit l’auteur des angoisses, eles craintes et inquiétudes et des faux jugements, mais parce qu’il prive, au moins pour un temps, l'âme qui en est alfligée, eles lumières equi dissiperaient les illusions intérieures et lui permettraient de distinguer clairement ce qui est bien de ce iqui est mal. Il le fait pour la punir de ses fautes actuelles ou passées ou pour obtenir une réparât ion plus généreuse et une sat isfaction plus complète ou pour la conduire à une vie plus haute de perfection. En somme, l’action de Dieu, en l’occurrence, est surtout négative. Celui qui profitera de cette épreuve détestera davantage le péché, prendra en conséquence les moyens les mieux appropriés pour éviter les occasions de mal faire et trouvera de surcroît des motifs nouveaux pour s’humilier davantage et manifester au Seigneur une confiance accrue.

Parfois aussi le démon peut agir sur les facultés sensibles de l’homme, en particulier sur l’imagination, et suggérer des craintes sérieuses qui risquent d’amener le découragement et même le désespoir. Si son action s’exerce sur une âme délicate, il lui inspirera de se elévelopper dans cette voie, mais jusqu'à l’excès des minuties, de façon à amener le trouble qui entravera le progrès spirituel.

Naturelles.

D’autres causes de scrupules proviennent de la constitution même du patient. Les unes

sont d’ordre physicjue, les autres relèvent du domaine moral.

1. Causes physiques.

Les causes physiques sont nombreuses : ce peut être, soit une disposition habituelle de tempérament à la mélancolie qui produit dans l'âme des angoisses et des craintes irraisonnées, soit un abattement physique provenant de déficience de la santé, d’insuccès dans les efforts fournis ou de revers subis dans la vie, soit un excès de travail intellectuel ou manuel, de veillées nocturnes, ou de jeûne et d’abstinence ou de toutes autres austérités physiques qui ont affaibli le corps. Ce peut être enfin le manque de loisir qui a éloigné trop longtemps des relations normales ou a empêché le sujet de prendre le repos nécessaire et les récréations honnêtes qui changent les idées. Bien souvent les causes physiipues sont seules à l’origine des scrupules, par l’action eiu’elles exercent sur l'âme, mais pas toujours, car le scrupuleux peut aussi devoir ses tourments à des influences el’ordre moral.

2. Les causes morales.

Parfois, en effet, le sujet souffre de faiblesse intellectuelle, c’est-à-dire qu’il manque de la science religieuse suffisante, nécessaire pour la solution pratique eles questions morales. Aussi a-t-il tendance à exagérer l’importance de ses obligations et se trouve-t-il, par suite du caractère déficient de sa réflexion, incapable de discerner la tentation du péché : pour lui il n’y a aucune différence entre l’impression et le consentement. L’imprudence et même quelquefois l’ignorance des confesseurs ne font qu’empirer ce triste état. La volonté aussi est souvent débile ou inconstante, si hit D que ce n’est plus elle qui conduit le sujet, comme ce devrait èlre, mais l’imaginât ion. Quand la sensibilité tend à devenir maîtresse, le jugement est facili m< nt faussé : parce que les f< mmes sont plus sensibles que les hommes, elles sont aussi, semble-t-il, plus sujettes au scrupule.