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le 8 novembre 1361. Voir C. Eubel, Bull, franc., t. vi, n. 461, p. 214 ; Ilierarchia, t. i, p. 105.

L’ouvrage le plus important de Pierre d’Aquila est son Commentarius in quatuor libros Senteniiarum, qu’il doit avoir terminé en 1 33 1 el qu’il appelle lui-même Scolellus, parce qu’il constitue une synthèse de la doctrine de Duns Scot, telle qu’elle résulte des leçons données par celui-ci tant à Oxford qu'à Paris et mises par écrit soit par lui-même, soit par ses disciples et auditeurs. Ce commentaire doit avoir exercé une grande influence pendant tout le Moyen Age et au début de la Renaissance, comme en témoigne le grand nombre de manuscrits qui en sont conservés dans toutes les bibliothèques de l’Europe, et les éditions relativement nombreuses qui en ont été faites dans un espace de temps assez bref, à savoir à Spire, s. d., mais probablement en 1480, d’après L. Hain, Repertorium, t. i a, Berlin, 1925, n. 1325, p. 156, ou en 1485, d’après W.-A. Copinger, Supplément lu Hain’s Reperlorium, t. i, Berlin, 1926, n. 1324, p. 35, à moins qu’il ne s’agisse de deux éditions successives ; Venise, 1501 ; ibid., 1584, par le cardinal Constantin Sarnano, conventuel, avec une copieuse table par Guidon Bartolucci, frère mineur ; Paris, 1585, réédition de la précédente ; Venise, 1600 et 1680. Enfin le P. Cyprien Paolini, frère mineur, a tâché de rétablir le texte primitif et authentique, publié par le cardinal Sarnano, dans l'édition qu’il a donnée en quatre volumes, dont les trois premiers ont paru à Recco, en 1907, et le dernier à Levanto, en 1909.

Pierre d’Aquila se rallie généralement aux doctrines de Duns Scot, qu’il appelle Doclor noster. Il en appelle cependant bien souvent à l’autorité des autres maîtres franciscains. Ainsi, dans les deux thèses scotisles de l’immaculée conception et de la primauté du Christ ou du motif de l’incarnation, il reprend substantiellement la doctrine du Docteur subtil. Aux arguments allégués par Scot en laveur de l’immaculée conception, il en ajoute un emprunté aux paroles du Christ : Inter natos mulierum non surrexit major Joanne Baptista, en faisant observer que le Christ a certainement exclu la Vierge de inter natos mulierum. Quant au motif de l’incarnation, Pierre d’Aquila se rapproche d’Alexandre de Halès, de saint Bonaventure et surtout de Matthieu d’Aquasparta, en ce qu’il considère ce problème d’une façon hypothétique, plutôt que in facto esse, comme le fait Scot ; mais dans son argumentation il suit de près le Docteur subtil, tout en corroborant les arguments de celui-ci. Il distingue entre la substance et la fin de l’incarnation et tient que, si l’on considère l’incarnation en soi, elle aurait eu lieu, même si Adam n’avait pas péché ; dans ce cas, néanmoins le Christ doit encore être considéré comme le médecin de l’humanité, non tollens infirmitatem, sed præservans ab in/irmilate et largiens perfectam félicitaient. Si l’on considère la fin de l’incarnation. Pierre d’Aquila dit qu’il faut s’en tenir aux témoignages des saints et que ceux ei ont enseigné que le Christ s’est incarné indépendamment du péché d’Adam. Il lient également avec Scot que le summum bonum, qui est l’incarnation, ne peut pas être un bien occasionné. Voir 1). Scaramuzzi, op. cit., p. 78-79.

Pour la prescience divine, Pic ire d’Aquila défend, dans le premier livre de son commentaire, une théorie qui est opposée à celle qu’il I ieiil dans son second livre.

Vinsi, dansle premier livre, il soutient que Dieucon nait les futurs contingents dans la déterminal ion de sa

volonté, qui doil avoir infailliblement son effet et

s'étend a lous les lui lus contingents, donc aussi aux futurs contingents libres, n admet aussi comme un principe fondamental que la volonté divine est la dernière raison de foule contingence. Il s’ensuit, dès lors, et Pierre d' Vquila le concède, que la volonté humaine

est déterminée par Dieu pour agir, mais il nie que de ce fait la liberté soit détruite, sans en donner toutefois une déclaration satisfaisante. Dans le deuxième livre.il rejette l’interprétation de la doctrine de Scot. d’après laquelle le Docteur subtil aurait enseigné que la volonté humaine ne peut pas être la seule et l’unique cause de son acte, parce que, dans ce cas, il n’y aurait pas connaissance de cet acte et il incline à admettre que la volonté créée doit être considérée comme la seule cause de son acte. D’après 11. Scbwamm, Dus gollliche Vorherivissen bei Duns Scolus und seinen ersten Anhângern. Inspruck, 1934. p. 296. il faudrait expliquer cette opposition manifeste dans la doctrine de Pierre d’Aquila par le fait qu’il n’a pas bien saisi les points fondamentaux de la question et les relations essentielles qui existent entre la prescience de Dieu et la liberté humaine. Mais cette opposition ne pourrait-elle pas s’expliquer par un changement de doctrine chez Scot luimême, que Pierre d’Aquila aurait trouvé dans différentes recensions de l’enseignement du Docteur subtil ?

Pierre d’Aquila se rattache encore très étroitement, et souvent même littéralement, à Duns Scot dans ses théories sur la sainte Trinité, comme l’a montré M. Schmaus, Der Liber propugnatorius des Thomas Anglicus und die Lehruntcrschicde zwisehen Thomas von Aquin und Duns Scotus, IIe part.. Die trinitarischen Lehrdifferenzen, dans Beitràge r. Gesch. d. Philos, u. Theol. d. M. A., t. xxix, Munster-en-W. 1930, p. 35 f 70, 105, 149-150, 240-241, 357-358, 543-544, 640, 64 I ; de même pour sa doctrine sur les dons du Saint-Esprit, comme l’a démontré K. Boeckl, Die sieben Gaben des Ileiligen Geistes in ihrer Bedeutung fur die Mystik nach der Théologie des xiii. u.xiv. Jahrhunderls. Fribourgen-Br.. 1931, p. 148. Pour sa théorie sur le sujet psychique des vertus cardinales, il se rallierait plutôt à saint Bonaventure qu'à Scot, selon Th. Graf, De subjeelo psgehico gralise et virtutum secundum doclrinam scholasticnrum usque ad médium sseculum ZIV, I ri ' partie, De subjecto virtutum cardinalium, t. ii, dans Studia Anselmiana, fasc. 3-4, Borne, 1935, p. 200. Pierre d’Aquila reproduirait encore la doctrine de Duns Scot quant à la théologie de Vunicum esse dans le Christ. Il tient que, dans le Christ, il y a un seul esse subsistentiee, mais plusieurs esse exislentise. Voir E. Ilocedez, Quiestio de unico esse in Christo a doctoribus sœc. XIII disputata, dans Pont. Univ. Gregoriana, Textus et documenta, séries theologica, fasc. 14, Rome, 1933, p. 115.

Les doctrines de Pierre d’Aquila paraissent avoir été tenues en honneur et enseignées non seulement dans l’ordre franciscain mais aussi dans les universités. Pour la grande estime dont il jouit chez les mineurs plaide le témoignage significatif de saint Jean de Capistran, conservé dans le ms. lat. 18339, fol. 1 r°, de la bibliothèque de l'État à Munich et publié par L. Meier, De schola franciscana Erfordiensi sivculi x, dans Anlonianum, t. v, 1930, p. 174-175. Le même saint possédait aussi parmi ses livres le commentaire sur les Sentences de Pierre d’Aquila. Voir A. Chiappini. Rcliquic letlerarie Capistranensi, Aquila, 1927, p. 289 et 297. L. Meier. dans l’article cité, a prouvé aussi que les théories de Pierre d’Aquila étaient enseignées à l’université d’Lrfurt au xv siècle. Il le déduit de ce que l’on retrouve sa doctrine chez les franciscains qui ont étudié et enseigné à cette université, par exemple chez Nicolas Lakmann (p. 174), et de ce que dans plusieurs manuscrits le commentaire de Pierre d’Aquila est joint à des commentaires sur les Scalaires d’Lrfurt, par exemple dans le ms. 413 de la bibliothèque publique d’Augsbourg (p. 162) ; le ms. Bol. 98 de la bibliothèque Amplonensis d’Erfurt (p. 163) ; le ms. 50 de la bibliothèque de Magdebourg (p. 84).

Quant aux autres ouvrages de Pierre d’Aquila, il règne encore une grande confusion et il est difficile de