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RUPERT DE DEUTZ. L’EXÉGÈTE


gétiques : 1. Le De divinis officiis en 12 livres parut en l’année 1111 ; mais la lettre-préface à Cunon. ancien abbé de Sicgburg et désormais évêque de Ratisbonne, fut écrite bien après, tout au plus en 1126. — 2. Le De voluntate Dei après 1114, et le De omnipotentia Dei vers la même date étaient deux ouvrages d’apologétique, contre des théologiens français. — 3. Le commentaire sur l’Évangile de saint Jean, en 14 livres, doit être mis à part ; c’est le premier ouvrage d’exégèse qu’il ait écrit, et il l’a fait dans une intention apologétique pour démontrer, comme il le dit dans sa lettre à l’abbé de Saint-Michel de Sicgburg, la vérité du corps et du sang du Christ, dans le sacrement de l’autel, contre les successeurs de Bérenger, qui n’y voyaient qu’une figure d’une chose sainte. Dans la même lettre, Rupert déclare qu’il a déjà fait paraître ses deux opuscules : De voluntate et omnipotentia Dei ; mais, dans les catalogues de ses livres, il place toujours son commentaire sur saint Jean avant son livre De SS. Trinilale, achevé en 1117, ce qui date les trois ouvrages susdits des alentours de 1115. — 4. Les livres suivants garderont bien des titres particuliers, mais en fait il s’agit d’un commentaire suivi des différents livres de la Bible, ou plutôt de certains passages qui allaient à ses préoccupations, a) Les commentaires sur les principaux livres de l’Ancien Testament et les premiers chapitres des Évangiles, composèrent l’énorme compilation en quarante-deux livres qu’il intitula : De SS. Trinilale et ejus operibus, commencée en 1114 et achevée en 1117, avec une dédicace à son protecteur, l’abbé Cunon. Les livres de la sainte Écriture qui n’avaient pas trouvé une exégèse suffisante dans le précédent ouvrage furent alors entrepris, par ordre de leur intérêt, semble-t-il. b) Les commentaires sur Job, annoncés d’abord en dix livres, furent alors distribués en quarante-deux chapitres : simple résumé des Moralia de S. Grégoire, c) Les commentaires sur l’Apocalypse en douze livres, une des meilleures productions de Rupert, ont été reportés par les auteurs de l’Histoire littéraire à une époque postérieure, parce que les œuvres subséquentes ne les citent pas ; mais ce n’est pas une preuve suffisante, d) In Canlica Canlicorum, appliqué à la sainte Vierge, sept livres. e) Sur les six premiers petits prophètes, dix-sept livres furent dédiés à Frédéric, évêque de Cologne, et quinze autres livres sur les six derniers petits prophètes le furent à Ekkenbcrt, abbé de Corvey en Saxe ; ces deux derniers commentaires, commencés à une époque incertaine, et peut-être avant ceux du Cantique des Cantiques, furent achevés certainement après l’ouvrage qui suit. I) Le De Victoria Verbi Dei, en treize livres, avait été réclamé par Cunon, encore abbé de Siegburg, pendant que Rupert résidait en son monastère, donc vers 1118 : il raconte, comme victoires du Verbe, les combats des justes de l’Ancien Testament ; c’est donc encore, comme les autres livres de Rupert, simple moine, un commentaire de l’Écriture.

3° Durant son abbatial de Saint-Héribert de Deutz, c’est-à-dire de 1120 à 1130, Rupert se mit à des études plus spécifiquement monastiques, sur la règle et l’histoire de son monastère, et la défense de la vie monastique, etc… Mais il lui fallait : 1. Compléter la série de ses commentaires sur les Livres saints, a) Le De gloria Filii hominis est, pour le Nouveau Testament, le pendant du De Victoria Verbi Dei ; en treize livres comme le premier, il utilise l’évangile de saint Matthieu ; commencé à la demande de Cunon, encore abbé, et donc avant l’année 1126, continué au milieu des contradictions des adversaires, il fut termine vers 1127. b) Le De glorioso rege David, était comme le titre l’indique, un commentaire des Rois en quinze livres, dédié à Frédéric, archevêque de Cologne, vers 1126 ; il a disparu, c) Le commentaire In Ecclesiasicn en cinq livres, a été composé à une époque incertaine, et

dédié à un inconnu, le moine Grégoire. Rupert s’acquittait de ce dernier travail pour en avoir fini avec les commentaires de l’Ancien Testament dont tous les livres lui étaient passés par les mains, sauf les Psaumes et les derniers livres Sapientiaux. On remarquera aussi que Rupert n’a jamais commenté les épîtres de saint Paul, ni les autres épîtres, ni les Actes des apôtres.

2. Désormais c’est à des tâches pratiques qu’il s’adonnera, a) Le commentaire de la règle de Saint-Benoît, en quatre livres. Ce n’est point une explication suivie, mais un écrit apologétique, apologie personnelle dans le premier livre, où il donne la première liste, incomplète, de ses précédentes œuvres, apologie de l’office divin et de la messe conventuelle, de l’habit, et de la vie monastique dans les livres suivants, b) Contre les Juifs, à la demande de Cunon, évêque de Ratisbonne, il écrivit deux ouvrages de polémique : Annulus, seu dialogus christiani et judœi, en trois livres, et De glorificatione Trinilalis et de processione Spirilus sancti, en neuf livres, qui cherche dans l’Ancien Testament des lueurs sur la Trinité ; la question de la procession du Saint-Esprit y fut. adjointe à la demande du légat du pape à qui l’ouvrage fut dédié, c) Le De incendio oppidi Tuitii fut écrit lors du sinistre qui détruisit en 1128 le monastère et l’église de Deutz ; à la même occasion se rattachent les deux livres intitulés Mcditationes mortis. d) Plusieurs écrits de polémique occupèrent les dernières années de sa vie : Altercatio clerici et monachi, où il revendique pour les moines le droit de prêcher ; Epistola ad Evehardum abbatem, qui maintient leur droit d’administrer des églises ; De virginilatis lœsione où il pense qu’on peut consacrer une jeune fille qui a perdu sa virginité ; Adversus quosdam religiosos, contre les prêtres mariés, e) Enfin le catalogue de Gerberon se clôt par deux productions hagiographiques, du genre de celles que Rupert avait composées dans sa jeunesse ; mais celles-ci sont de dates incertaines : Vita sancti Heriberti arcliiepiscopi Coloniensis, dédié au moine Macuward, son prédécesseur comme abbé de Saint-Héribert († 1119) ; Passio beati Eliphii marlijris, dédié à l’abbé Alban. j) Gerberon n’a pas admis, et à bon droit, semble-t-il, le dialogue De vita vere apostolica, édité par Martène, Anecd. ampl. coll., t. ix, col. 969, dans P. L., t. clxx, col. 609 sq., sous le nom de Rupert ; car le style rimé de l’auteur, ses recours au raisonnement, tout porte à croire que l’ouvrage n’est pas de l’abbé de Deutz et que la critique d’Anselme de Havelberg s’applique à un autre opuscule de Rupert, V Altercatio signalée plus haut, loc. cit., col. 538. Plusieurs ouvrages, nous l’avons dit, semblent perdus : non seulement le récit en prose De statu cœnobii sancti Laurenlii, mais le premier livre d’exégèse : De diversis scriplurarum senleniiis, et le commentaire In libros Ilegum. Plusieurs opuscules ont été omis dans l’édition de Venise : le poème sur Saint-Laurent, les vies de saint Augustin et de sainte Odile, le chant sur saint Goar, le Dialogus clirisliani et judœi, la lettre Mcdilalus qui, dans l’édition de Cologne, a été mise en tête du commentaire sur l’évangile de saint Jean et dont l’importance est capitale pour qui veut juger équitablement de l’orthodoxie de Rupert en matière eucharistique. P. L., t. clxix, col. 203.

III. L’exkgète. — Rupert n’est évidemment pas un exégète bien original et ses immenses commentaires font d’abord penser à ceux de son compatriote Raban Maur. Cependant la distance qui les sépare explique deux différences importantes dans leur manière d’accommoder la sainte Écriture. Le premier écrivait pour un peuple nouvellement converti, ou mieux pour des prêtres peu instruits et ramenés par ses soins à un contact élémentaire avec l’enseignement de la Bible : aussi se bornait-il à présenter, sans les démarquer, sans