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SCHISME D’OCCIDENT. EFFORTS POUR LE RÉDUIRE


date par le roi pour s’emparer du château avec ses routiers.

La résistance active opposée par Benoît à la violence, si elle fut désapprouvée par quelques-uns de ses partisans, par saint Vincent Ferrier en particulier, eut du moins pour effet de calmer beaucoup de ses adversaires. La félonie de Boucicaut, qui retint comme otages trois cardinaux envoyés en négociateurs, souleva contre lui l’indignation des honnêtes gens. Le spectacle des cardinaux dissidents menant la guerre contre celui qu’ils avaient choisi naguère et que beaucoup de Français considéraient malgré tout comme le vrai pape était d’ailleurs trop odieux pour ne pas choquer bientôt l’opinion publique et ébranler la cour elle-même. Guy de Malesset s’en aperçut sans peine quand il vint à Paris avec deux de ses collègues pour provoquer contre le pontife un surcroît de rigueur.

Le roi d’Aragon, demeuré fidèle à Benoît, s’entremit auprès de Charles VI et obtint de lui des propositions de paix que ses ambassadeurs firent accepter par Benoît, leur protégé, le 10 avril 1399. Celui-ci promettait d’abdiquer, si Boniface le faisait de son côté ou venait à mourir, et de prendre part à toute assemblée qui se réunirait pour réaliser l’union ; moyennant quoi Charles VI s’engageait à le protéger dans sa résidence d’Avignon. Une trêve fut conclue sur ces bases et pendant plus de quatre ans le pontife resta en quelque sorte captif dans son palais, tandis qu’autour de lui se multipliaient de vaines négociations.

11° Boniface et l’Empire. — La soustraction d’obédience avait éveillé chez Boniface l’espoir de gagner à sa cause, par l’intermédiaire du roi d’Angleterre, la France irritée contre Benoît. Lettre à Bichard II, 21 décembre 1398, Reg. vatic. 316, fol. 78. Mais l'évolution de la situation en Allemagne exigeait de sa part la plus grande prudence. Après s'être assurés de l’appui anglais, les princes, réunis à Francfort en février 1400 pour préparer la déposition de Wenccslas, menaçaient de passer à la neutralité, à l’exemple de la principauté de Liège, si Boniface s’opposait à l'élection d’un autre souverain. Deutsche Reichstagsakten, t. iii, p. 162, n. 114. Or, Wencestas, même remplacé comme roi des Bomains, continuerait de régner en Bohême et de compter parmi ses amis le puissant duc de Milan.

Boniface fut assez habile pour éviter d'épouser la querelle des princes sans aller jusqu'à désavouer leur entreprise comme illégale (21 avril). Ibid., t. iii, p. 163, n. 115. La déposition de Wencestas et son remplacement par l'électeur palatin, Bobert II I de Bavière, étaient chose faite depuis cinq jours (25-26 août), ibid., t. iii, p. 264-267, n. 206-209, quand Boniface assurait encore au malheureux roi qu’il était disposé à le défendre « jusqu’au sang ». Ibid., t. iii, p. 225, n. 185. Robert manifesta aussitôt le dessein d’aller se faire couronner à Rome et de travailler à ramener dans le giron de l'Église les « schismatiques ». En réalité, il préparait une expédition militaire en Italie pour abattre au passage la puissance du duc de Milan et entamait des négociations avec la France, prêt à sacrifier au besoin à ses ambitions la cause romaine. Boniface essaya en vain d’obtenir de lui l’assurance que, sur la question du schisme, aucune convention ne le liait et qu’il ne signerait aucun engagement sans s'être assuré de son assentiment, ibid., t. iv, p. 41, n. 25, et p. 42, n. 26 ; aussi ne fit-il rien pour le soutenir. Manquant d’hommes et à court d’argent, Bobert, arrivé à Padoue le 18 novembre 1401, quitta cette ville le 1 5 avril suivant pour rentrer en Allemagne, non sans avoir déclaré à François de Carrara qu’il se vengerait du pape en détachant de lui l’Empire.

L’heure était critique pour Boniface : tandis que les Forteresses qui entouraient Bologne tombaient, une à une, aux mains du Yisconti, Robert, après avoir fait

approuver sa politique à la diète de Mayence quillet 1402), ibid., t. v, p. 282, n. 207 sq., reprenait ses pourparlers avec la France pour obtenir, au prix de concessions en faveur de l’union, une alliance contre Jean Galéas. Ibid., p. 391, n. 289. Il cherchait en même temps à s’assurer les faveurs de l’Angleterre. Ibid., p. 399, n. 294. La mort inopinée du duc de Milan vint heureusement renverser la situation (2 septembre 1402). Bobert aussitôt oublia ses offres à la France et reprit contact avec Boniface qui s’empressa de se l’attacher définitivement en approuvant son élection, après avoir obtenu la promesse qu’il ne s’occuperait de la question du schisme que d’accord avec lui (10 juillet 1403).

1 2° La restitution d’obédience de la Fiance à Benoît XIII. — Sur ces entrefaites, la France, devant la faillite de plus en plus manifeste de la politique menée par les ducs de Berry et de Bourgogne, s'était lassée de n’avoir pas de chef religieux. Les charges imposées par le souverain semblaient intolérables au clergé. Des maîtres parisiens, comme Nicolas de Clamanges et Gerson, qui avaient toujours blâmé la soustraction d’obédience, élevaient la voix pour réclamer le retour plus ou moins complet à l'état de choses antérieur à 1398. Nicolai de Clamengiis opzra, éd. de Leyde, ep. xvii, p. 61-72 ; Opéra Gersonii, éd. Du Pin, t. ii, col. 32-35. L’université de Toulouse faisait de même. Le duc d’Orléans demeuré secrètement fidèle à Benoît les appuyait. N. Valois, op. cit., t. iii, p. 260. Les cours de Castille et d’Aragon déploraient de plus en plus ouvertement la captivité du pape qu’elles continuaient de regarder comme légitime. L’audacieuse évasion de Benoît XIII allait faciliter un arrangement (Il mars 1403).

Le pontife se réconcilia avec ses cardinaux et les Avignonnais, puis, de Château-Benard, où il s'était mis sous la protection du roi de Sicile, il délégua à Paris Guy de Malesset et le cardinal de Saluées pour provoquer, sinon l’annulation, du moins une modification de la mesure prise contre lui (25 mai). De fait, une assemblée de prélats réunie à l’hôtel Saint-Pol sur l’initiative du duc d’Orléans se prononça pour la restitution immédiate d’obédience, décision qui reçut l’approbation du roi et de l’Université (28 mai). Martène et Durand, Amplissima collectio, t. vii, col. 677. Le 30 mai 1403, Pierre d’Ailly pouvait annoncer solennellement, dans la chaire de Notre-Dame, le retour du royaume à l’obédience de Benoît XIII.

13° Mort de Boniface IX et son remplacement par Innocent VII. — Le triomphe de Benoît n’avait pu être obtenu que moyennant engagement de sa part d’accepter la cession si Boniface venait à abdiquer, à mourir ou à être déposé, et de convoquer en concile, dans le délai d’un an, les prélats de son obédience. Archiu f. Literatur u. Kirchengesch., t. vii, p. 280. Bien décidé à ne pas se laisser imposer l’accomplissement de ses promesses, il ne put faire moins, finalement, pour montrer quelque bonne volonté, que de proposer a Boniface une entrevue où ils étudieraient ensemble les moyens de mettre fin au schisme. Il offrait de se rendre, à cette fin, en Italie sur un territoire neutre.

Boniface, malade, objecta aux ambassadeurs que son état de santé lui interdisait tout déplacement. On lui parla de compromis, des arbitres choisis de part et d’autre devant décider en toute liberté de ce qu’il y aurait lieu de faire. On lui demanda de faire défense à ses cardinaux de lui choisir un successeur après sou décès, Benoit étant décidé à agir de même. Ainsi pressé de tenir ses engagements, il se fâcha et des paroles violentes furent échangées, dit-on. Quoi qu’il en soit, la fièvre le reprit et il mourut le lendemain, 1 er octobre I 10 !. Benoît XIII avait plus d’une fois promis de se dé