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    1. SCHISME D’OCCIDENT##


SCHISME D’OCCIDENT. EFFORTS POUR LE RÉDUIRE

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expédition de Louis [I d’Anjou soutenu par Clément VII, le monarque 'finit par entrer en possession de sa eapitale (10 juillet 1 100).

Dans le reste de L’Italie, Boniface, secondé par le cardinal Pileo de Prata. ne fut pas moins heureux. Négociant quand il le pouvait, mettant en avant au besoin les troupes de mercenaires dont il avait confié le commandement à son frère, il réussit à tenir en échec, à vaincre, parfois même à gagner à sa cause les condottieri partisans de Clément qui s'étaient installés dans le Patrimoine. Habile à poursuivre ses fins parmi les ambitions et les rivalités des tyrans, des villes et des classes sociales, il sut faire figure de pacificateur et devenir, dans la Rome qu’Urbain avait dû fuir, le maître incontesté.

Boniface et la France.

Bien que ces luttes aient

absorbé le plus clair de son activité, Boniface chercha à réaliser l’union autrement que par la force des armes. Il est vrai qu’elle ne lui paraissait possible que par l’abdication de 1' « anti-pape ». Du moins cherchat-il à faciliter cette solution en promettant à Clément VII, pour le cas où il se retirerait, de lui laisser la pourpre ainsi qu'à ses cardinaux et de le nommer légat apostolique pour la France, l’Espagne et le Portugal. Bulle du 6 novembre 1390, dans Raynaldi, Annales ecclesiastici, a. 1390, n. 6 et 7. Cette modération, jointe à l’intervention du duc de Bavière auprès de son beau-frère Charles VI, monté sur le trône de France en 1380, contribuèrent à détourner celui-ci de donner suite à sa promesse de marcher sur Rome avec 12 000 lances pour y introduire Clément (mars 1391). Aussi bien Clément lui-même accepta-t-il bientôt d’entrer en rapports avec son rival par l’intermédiaire du prieur de la chartreuse d’Asti, Pierre de Mondovi.

Un chaleureux appel de Boniface au jeune roi de France qui venait de prendre en mains les rênes du gouvernement (lettre du 2 avril 1392, dans le Spicilegium de d’Achery, t. i, p. 708) trouva Charles VI disposé à travailler à l’union, donec egrediatur ni splendor juslus et unicus vicarius Ihesu Christi. Le roi, estimant que la responsabilité du schisme était partagée, envisageait une double démission, tandis que Boniface espérait le convaincre de la régularité de l'élection d’Urbain VI et provoquer, avec son adhésion, celle de Robert de Genève (lettre du 20 juin 1393, dans d’Acherꝟ. 1. 1, p. 769). Mais le conseil des princes profita d’une crise de folie de Charles VI pour rompre l’entretien.

L’université de Paris et les trois voies.

La reprise

de contact entre Rome et Paris n’en était pas moins un événement gros de conséquences : le désir d’union dont Gerson s'était fait l'écho dans son discours du 6 janvier 1391 s’en trouvait accru. Opéra, édit. Du Pin, t. iii, col. 991. Dans toute la France, les prières publiques, les prédications, les processions se multiplièrent au cours de l’année 1393 pour obtenir du ciel la cessation du schisme. Clément VII lui-même céda au sentiment populaire en instituant une messe spéciale pro sedalione schismalis qu’il ordonna de dire chaque semaine.

L’université de Paris, longtemps éconduite, put enfin faire entendre sa voix devant le roi. Dans un mémoire rédigé par Nicolas de Clamanges, elle proposa, le 6 juin 139 1, trois moyens auxquels on pourrait recourir successivement pour rendre la paix à l'Église : la voie fie cession, c’est-à-dire la démission des deux papes ; la voie de compromis, c’est-à-dire l’arbitrage ; en (in la voie conciliaire, par la réunion d’un concile général qui prendrait les mesures nécessaires. D’A chery, op. cit., t. i, p. 770.

G° Benoit XIII succède « Clément VU, La mort de Clément VII, survenue le 16 septembre 1391, simplifiait la situation. Il eût été sage et facile de laisser s'éteindre avec lui le schisme auquel son avènement

avait donné naissance. Pressé par ses conseillers et par l’Université qu’il sentait être l’interprète de l’opinion publique en même temps que du bon sens, encouragé d’ailleurs par les archevêques de Cologne et de Mayence comme par le margrave du Rhin, le roi de France fil son possible pour amener les cardinaux d’Avignon à surseoir à l'élection du successeur de Clément.

Sans même prendre la peine de lire les deux lettres qu’ils avaient reçues coup sur coup de Charles VI, les cardinaux réunis en conclave désignèrent le cardinal d’Aragon, Pierre de Lune, qui prit le nom de Benoît XIII (28 septembre). La vacance du siège n’avait duré que douze jours. Pareille précipitation ne saurait trouver d’excuse que dans une parfaite bonne foi ; et le fait que tous les électeurs avaient juré au préalable de. se démettre du pontificat quand le pape de l’autre obédience ferait de même, s’il témoigne d’un réel souci du bien général de l'Église, ne suffît pas a justifier leur insigne maladresse. Raynaldi, op. cit., an. 1394, n. 6.

La voie de cession.

Pierre de Lune avait été créé

cardinal par Grégoire XI, c’est-à-dire avant le schisme. Il avait cru d’abord à la légitimité d’Urbain VI qu’il avait contribué à élire « avec l’intention d’en faire un vrai pape », puis il avait fini par se rallier aux cardinaux de l’opposition et avait voté pour Clément VIL Voir ici l’art. Pierre de Luna. Son désir d’unité était bien connu ; il venait encore de le manifester par ses hésitations à accepter la tiare. « J’emploierai, pour arriver à mon but, tous les moyens raisonnables et possibles », déclara-t-il à Charles VI, en lui notifiant sa promotion.

L’université de Paris le pressa de mettre à exécution ses projets de concorde : « La paix de l'Église est entre vos mains, lui écrivit-elle, car votre rival tiendra sans doute à vous imiter. » Pierre d’Ailly, après une visite en Avignon, préconisa devant la maison royale et l’Université la voie de cession. Un concile national, réuni à Paris le 2 février 1395, adopta cette voie comme la plus simple et la plus expéditive, recommandant au roi de travailler dans ce sens, non seulement auprès de Benoît XIII, mais auprès des princes affiliés à Boniface IX. Mais déjà les dispositions intimes de Benoît n'étaient plus celles de Pierre de Lune : soit qu’il ait pris goût aux honneurs, soit que la foule des courtisans qui avaient intérêt au maintien du statu quo ait réussi à exercer sur lui leur influence, il ne tarda pas à se trouver d’accord avec Boniface IX pour refuser d’envisager la possibilité d’une démission.

Une ambassade extraordinaire conduite parles ducs de Bourgogne, de Berry et d’Orléans arriva à Villeneuve lez-Avignon le 21 mai 1395. Elle se vit refuser par Benoît le texte du serment qu’il avait prêté avant son élection. Ni les instances du duc de Berry, ni l'éloquence de Gilles des Champs, ni l’avis favorable de presque tous ses cardinaux ne purent amener le pontife à l’idée de la cession. Deux mois d’efforts ne réussirent ni à le toucher, ni à l'ébranler. Tantôt il cherchait à gagner du temps, exigeant un écrit du roi, tantôt il se retranchait derrière le droit qui, prétendait-il, avait toujours rejeté la voie de cession, comme peu convenable pour terminer les schismes. Sa mauvaise volonté ne put plus faire de doute quand on le vit recourir aux prétextes les plus futiles pour refuser de recevoir en audience publique les délégués de l’Université et aller jusqu'à offrir aux ducs, pour les amener à se départir de leur insistance, de leur abandonner le patrimoine pontifical en Italie. Soutenu par son confesseur, le dominicain anglais Jean Ilayton, et par le seul cardinal de Pampelune, qui était partisan de la voie de fait, il finit par se déclarer prêt à mourir plutôt que d’accepter la voie de cession.

Il se disait disposé, par contre, à se rencontrer, sous la protection du roi. avec son rival, dans une confé-