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SCHISME BYZANTIN. GRÈCE, CRÈTE, BULGARIE


cette unification, qu’il a réussi à réaliser dès 1920. Un décret royal portant la date du 24 décembre 1920 a promulgué le statut de la nouvelle Église unifiée sous le signe du rétablissement de l’ancien patriarcat d’Ipek. Par le fait même ont été supprimées par absorption les anciennes Églises du Monténégro, de Dalmatie, de Carlovitz et de Bosnie-Herzégovine. Le patriarche porte les titres d’archevêque de Petch ou Ipck, métropolite de Belgrade et de Carlovitz, patriarche des Serbes. Le statut organique de 1920 a déjà été modifié deux fois, en 1929 et en 1931. Toujours correct avec le patriarcat œcuménique, le gouvernement serbe a tenu à faire reconnaître par lui la nouvelle organisation ecclésiastique. Après de longs pourparlers, le patriarche Mélétios IV a délivré au nouveau patriarcat serbe son tomos d’autocéphalie, daté du 9 mars 1922. En 1934, le nombre des fidèles était de 6 785 601.

Église de Grèce.

Bien avant l'Église serbe,

l'Église de Grèce, dite Église hellénique, avait fait reconnaître son autonomie complète par le patriarche œcuménique, après vingt ans de schisme. Dès 1833, une assemblée de trente-trois évêques du nouveau royaume qui venait de conquérir son indépendance politique (traité d’Andrinople de 1829), réunie à Nauplie, déclara l'Église de Grèce absolument indépendante du patriarche de Constantinople et approuva la nouvelle constitution ecclésiastique élaborée par le pouvoir civil et rappelant de très près le Règlement ecclésiastique de Pierre le Grand. Le Phanar protesta énergiquement et refusa de reconnaître le fait accompli. Les Grecs passèrent outre et attendirent que le patriarche œcuménique s’inclinât devant le principe de l’autocéphalisme national. Ce ne fut qu’en 1850 que le patriarche Anthime IV délivra enfin en bonne et due forme à l'Église de Grèce son tomos d’autocéphalie, qui souleva d’ailleurs de violentes protestations, mais finit par être accepté en substance par la nouvelle loi organique de 1852, atténuant dans les mots plus que dans la réalité le césaropapisme de la loi de 1833. C’est cette loi de 1852 qui a régi l'Église hellénique jusqu’en 1923. A cette dernière date, le statut organique a été revisé dans le sens d’une plus grande liberté laissée à l'Église. Mais, dès 1925, le dictateur Pangalos reprenait en partie les concessions faites. Nouveau statut promulgué le 21 juillet 1931. Il comporte essentiellement un synode permanent composé de neuf membres, représentant de l’assemblée plénière de l'épiscopat, et cette assemblée plénière elle-même en qui réside l’autorité ecclésiastique suprême. L’assemblée ne se réunit que tous les trois ans, le 1 er octobre. Avec le consentement de l'État, il peut y avoir des sessions extraordinaires. Les décisions importantes sont prises aux deux-tiers des voix et doivent toutes.être approuvées par le chef de l'État sur proposition du ministre des Cultes. Un commissaire du gouvernement assiste aux séances à titre de simple témoin, dont la présence n’est pas absolument requise pour la validité des actes. Comparées au statut de 1852, ces dispositions accusent une atténuation sensible de l’ingérence de l'État. Cependant le contrôle de celui-ci est universel. C’est le ministre des Cultes qui choisit les évêques sur présentation de trois candidats élus par l’assemblée des évêques. C’est encore lui qui décide de la fondation des séminaires et en établit le programme. Il intervient d’une manière très active dans l’administration des biens ecclésiastiques. Pour plus de détails voir l’article du B. P. Janin dans les Échos d’Orient, t. xxxi, 1932, p. 218-235.

Quoique l'État hellénique ait vu plus que doubler sa population, à la suite de la guerre balkanique, de la guerre de 1914 et de celle de 1922 contre la Turquie, l'Église de Grèce est restée jusqu’en 1928 avec un nombre de fidèles sensiblement équivalent à celui

DICT. DE THÉOL. CATHOL.

qu’elle possédait avant les nouvelles conquêtes-. Cette anomalie s’explique par le fait que le principe de l’autocéphalisme national n’a pas été appliqué, avant cette date, aux métropoles de la nouvelle Grèce, qui sont restées de 1913 à 1928 sous la juridiction du patriarcat œcuménique, de plus en plus amoindri par l’expulsion des Turcs de la péninsule balkanique. À la suite de l’incorporation, déclarée provisoire, des nouvelles métropoles, de l’exode en masse des Grecs d’Asie Mineure en 1922 et de l'échange des populations prescrit par le traité de Lausanne, le nombre des fidèles a passé de 2 700 000 à plus de 6 000 000. L'Église est divisée en 81 métropoles sans évêchés suffragants, dont 33 dans les anciennes provinces et 48 dans les nouvelles. Ce dernier chiffre doit être réduit à 40, voire même à 35 selon le nombre des nomes ou départements civils. Étroitement inféodée à l'État, l'Église hellénique a fortement subi le contre-coup des révolutions politiques dont la Grèce contemporaine a été le théâtre. Ayant adopté, depuis mars 1924, le calendrier grégorien, elle a à lutter contre un groupe important d’opposants, qui repousse cette innovation et s’entête à suivre l’ancien calendrier. Si peu importante qu’elle soit en elle-même, cette question du calendrier est capable de déterminer un schisme. La haute hiérarchie, mollement soutenue par le gouvernement, n’a pas encore réussi à écarter le péril, qui augmente d’année en année. N’a-t-on pas vu en 1935 trois métropolites à la tête des opposants, qui ont déclaré se séparer de l'Église officielle et ont commencé à créer une hiérarchie à part ? Cf. Échos d’Orient, t. xxxv, 1936, p. 357-359.

Église de Crète.

Bien que l'île de Crète ait été

annexée à la Grèce en 1911, l'Église locale a conservé son statut particulier de province autonome sous la haute juridiction du patriarche œcuménique, qui nomme directement le métropolite de Candie. Celui-ci gouverne l'île avec un synode local, composé de ses suffragants d’abord au nombre de sept, puis de quatre entre 1929 et 1935 ; puis de nouveau de sept. Ces sufi’raLumts sont élus par le synode. Il est évident cpie cette situation exceptionnelle est destinée à disparaître dans un avenir prochain. La métropole de Crète ne tardera pas à être rattachée à l'Église nationale. On constate que les Grecs de Grèce, après avoir caressé un instant l’espoir de conquérir Constantinople et Sainte-Sophie, usent de beaucoup de ménagements à l'égard du patriarcat œcuménique, au moment où celui-ci voit son territoire se rétrécir de plus en plus.

Église bulgare.

De l'Église bulgare il a été

.suffisamment traité à l’article Bulgarie, t. ii, col. 11741228. Depuis l’apparition de l’article, l'événement saillant a été la suppression de fait de la dignité d’exarque par la mort de l’exarque Joseph (1877-1915). On n’a donné à celui-ci aucun successeur, mais on a nommé un locum tenens, qui réside à Constantinople avec le titre de vicaire exarchal. En fait, l’exarque n’a guère plus de raison d'être, puisqu’il ne reste en Thrace turque que quelques centaines de fidèles et que le gouvernement t urc actuel ignore les Églises. Le statut organique de l'Église bulgare, publié en 1870 et remanié en 1895, ne répond plus, dans plusieurs de ses articles, à l'état actuel. En attendant qu’on le remplace par un nouveau règlement, on se conforme à l’ancien pour ce qui est encore applicable. On finira sans doute par ressusciter l’ancien patriarcat bulgare pour imiter les Serbes et les Roumains, qui se sont donné, eux aussi, un patriarche. Le schisme avec le patriarcat de Constantinople et les autocéphalies de langue grecque dure toujours, bien que la raison qui l’a motivé, à savoir le phylétisme, n’existe pour ainsi dire plus pour les Bulgares, alors que plusieurs autres autocéphalies s’en sont rendues coupables depuis, et d’une manière beau T.

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