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témoins crée facilement le surnaturel, p. 30-32? 2. des prestiges ? Il y a la doctrine. Donc nous sommes au rouet. P. 33, 34. — Mais » l'Écriture cite des faits miraculeux ». — C’est vrai « parce qu’ils sont dans l'Écriture, je ne les rejette point ; je ne les accepte pas non plus, parce que ma raison s’y oppose. Ce qu’on doit croire inspire est tout ce qui tient à nos devoirs. » P. 36.

On l’accuse aussi de rejeter la prière ; mais il ne rejette que la prière « mercenaire et intéressée », Dieu « …père sachant mieux que nous ce qui nous convient » ; et encore de trouver la morale chrétienne impraticable parce qu’elle outre nos devoirs. Il s’agit de la morale de la théologie et non de l'Évangile. P. 37-38.

Dans les Lettres IV et V, Rousseau discute la procédure suivie contre lui. « Il n’a pas violé son serment de bourgeois. Il a insisté au contraire sur l’obéissance aux lois, même en matière de religion ». P. 40. Au reste. s’il a écrit la Profession de foi c'était pour la paix de l’Europe et d’abord de Genève. A Genève, après l’article de d’Alemberl, le crédit des pasteurs était ébranlé. Il a voulu montrer que « ce qu’ils négligeaient n'était ni certain ni utile » et qu’ils pouvaient servir « d’exemples aux autres théologiens ». En Europe, la philosophie a décrié les croyances. Il a voulu montrer qu’en écoutant la raison « au fond tous étaient d’accord ; que partout on pouvait servir Dieu, aimer son prochain, obéir aux lois », ce qui est l’essence de toute bonne religion. C'était la paix entre « la liberté philosophique et la piété religieuse ».

La sixième et dernière lettre de la première partie discute cette question : S’il est vrai que l’auteur attaque les gouvernements. Or, dit Rousseau, dans le Contrat social ici visé, j’ai pris pour modèle des institutions politiques la constitution de Genève ! Comment expliquer que le Contrat social n’ail été brûlé et trouvé destructif de tous les gouvernements qu'à Genève ? P. 65-66.

Dans la seconde partie, il étudiait « l'état présent du gouvernement de Genève », lettre VII, et les empiétements du Petit conseil, lettre VIII ; puis il appelait à agir ses concitoyens, lettre IX.

Ce livre ne lit qu’irriter ses ennemis. A Genève, le pasteur Claparède publiera des Considérations sur les miracles de l'Évangile, pour servir de réponse aux difficultés de M. J.-J. Rousseau dans sa troisième lettre e’crile de la montagne, 1765, in-8°, et Jacob Vernes un Examen de ce qui concerne le christianisme, la réformalion évangélique et les ministres de Genève dans les deux premières lettres écrites de la montagne, 1765, in-8°. La vénérable classe des pasteurs de Neuchâlel ne demeura pas en reste. Dès septembre 1762, elle avait demandé l’interdiction de Y Emile. En mars 1765, elle chargea Montmollin de demander au coupable, sous peine d’excommunication, une quasirétractation. Il refuse. Le 29, il est cité devant le consistoire de Môtiers. Il récuse cette autorité. « Chrétien réformé, il ne doit qu'à Dieu compte de sa foi. » Le consistoire divisé ne prend aucune décision. Cf. Correspondance, t. xiii, n. 2501, du 9 mars, à M. Meuzon, conseiller du roi ; n. 2545, du 30 mars, à Mme de Verdelin. Soutenu par le Conseil d'État, qui le déclare exempt de la juridiction du consistoire, ibid., n. 2567, n. 2634, il décide de quitter Môtiers, mais à son heure. Ibid., n. 2559. Mais Montmollin le dénonce dans ses catéchismes, dans ses sermons : Rousseau est l’Antéchrist. Des polémiques s'élèvent. Cf. Recueil des pièces relatives èi la persécution suscité' à Mé)tiers-Travcrs contre M. J.-J, Rousseau, 1765. in 8°. l’ois s’est répandue à Môtiers une brochure de 8 » ages, parue a Genève, au déhui de l’année, intitulée, Sentiment des citoyens. Après d’autres méfaits, dit ce pamphlet, i il (Rousseau) outrage avec fureur

la religion chrétienne, la réforme qu’il professe, tous les amis du saint Évangile, tous les corps de l'État ». Noir le texte de cette brochure et la réfutation qu’en a faite Rousseau, dans Correspondance, t.xii, append. i, p. 366 sq. Rousseau l’attribua à Vernes, ibid., n. 2559, qui s’en défendit. Ibid., n. 2621. En réalité, la brochure était de Voltaire. Sur les rapports de Voltaire et de Rousseau, voir plus loin l’art. Voltaire et P. Chaponnière, Voltaire chez les calvinistes, Paris, 1936, in-16. Plusieurs fois attaqué dans sa maison, à la suite de cette campagne, surtout dans la nuit du 6 au 7 septembre, Rousseau fuyait dès le matin du 7. Cf. Corr., t. xiv, p. 263 sq., append., en particulier iv, Déclaration du châtelain de Môtiers (Martinet) sur les faits relatifs à M. J.-J. Rousseau, p. 365-366 ; et Recueil de pièces relatives ù la persécution suscitée à MôtiersTravers contre M. J.-J. Rousseau, 1765, in-8°.

3° Dernières années et mort (1765-1778). — Chassé par Renie de l'île Saint-Pierre, au milieu du lac de Bienne, où il s’est d’abord réfugié, Rousseau échoue à Strasbourg. « Là, hors d'état de soutenir la route de Berlin », Correspondance, t. xix, n. 2860, il accepte l’hospitalité que lui offre en Angleterre, Hume, un ami des philosophes, mais qui a pitié de lui. Cf. ibid., n. 2801. Il demeurera en Angleterre du 3 janvier 1766 au 1 er mai 1767 ; à cette date il s’enfuira, persuadé qu’il est une victime de Hume. Il a appris qu’une prétendue lettre du roi de Prusse court sur lui à Paris et même en Angleterre. Elle le traite en détraqué. : « Venez chez moi, faisait-on dire à Frédéric II, et montrez que vous pouvez avoir le sens commun. S’il vous faut de vrais malheurs, cessez de vous torturer l’esprit, je puis vous en procurer. » Ibid., t. xv, p. 367. Rousseau, qui a d’abord attribué ce pamphlet à d’Alembert, apprend qu’il est de Walpole et que Hume y a collaboré : dès lors, il soupçonne celui-ci de complicité dans tous les maux réels ou imaginaires dont il souffre. Cf. ibid., n. 2987, lettre du 7 avril 1766 à milord Strallord. Et il remplit de ses plaintes l’Angleterre et la France. Cf. ibid., t. xvi, p. 5, lettre de Hume à la comtesse de Boufflers, 12 avril 1766. Hume croit devoir se justifier devant l’opinion par un Exposé succinct de la contestation survenue entre M. Hume et M. Rousseau avec les preuves, traduit de l’anglais par M. Suard, Londres, 1766, in-12. À quoi répond immédiatement une Justification de J.-J. Rousseau dans la contestation qui lui est survenue avec M. Hume, Londres, 1766, in-12. Cf. L. Lévy-Bruhl, La querelle de Hume et de Rousseau, dans Revue de métaphysique et de morale, 1912, p. 417-428 ; A. Schinz, La querelle Rousseau-II urne, dans Annales de la société J.-J. Rousseau, 1926, p. 1.

Rousseau dès lors erre en France. A Rourgoin, en juin 1768, « en présence de Dieu, de la nature et des deux citoyens vertueux », de Rosières et Champagneux, il épouse Thérèse. Cf. Lettres de celle-ci au marquis de Girardin, 17 janvier 1785, Correspondance, t. xv, append., iii, p. 353. lui 1770, avec l’assentiment de Choiseul, il revient à Paris, où il termine les Confessions, 1772 ; compose les Considérations sur le gouvernement de la Pologne, 1775. publiées seulement en 1782, in-18, Londres (Paris), les Dialogues ou Rousseau juge de Jean-Jacques, 1775 ; enfin les Rêveries d’un promeneur solitaire, ajoutées aux Confessions, les deux. 4 vol. in-12, Genève, 1782. Cf. L.-A. Foster, Le dernier séjour de J.-J. Ilousseau à Paris, (1770-1778), in-8°, Paris, 1021. Mais, las de Paris, malade, abrité par le marquis de Girardin, il vit à Ermenonville, du 20 mai I77M à sa mort, le 2 juillet suivant. Des bruits de suicide coururent, dont Corancez se ld l'écho dans le Journal de Paris, mais ils demeurèrent invérifiables. Cf. Correspondance, t. xx, p. 365. Appendice xiv : u citoyen Corancezau Journal