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SC Il IS.M E. DEFINITION

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hérésie et parlent non du schisme, mais des erreurs des latins. Cf. Fr. GriveÇ, Doctrina byzantina de primaiu et unitule Ecclesise, Ljubliana, 1021, p. 02 ; le même, De unitate Ecclesise, dans Bogoslovni Vêstnik, 1926, p. 2942 : cf. p. 30 ; Th. Spaèil, S..1.. Conceptus et doctrina de Ecclesia juxla theologiam Orientis séparait, sect. iii, Theol. récent., Rome. 1924, p. 87, n. 105.

La logique de leur position porte normalement les anglicans à concevoir le schisme dans le seul cadre de l’Église locale, comme l’érection d’un autel contre l’autel légitime : c’était la position de Newman anglican, voir ici art. Newman, t. xi. col. 332 : l’évêque Gore a consacré le c. vin de ses Roman Catholic daims à « la nature du schisme », mais les notations historiques et psychologiques de ces pages n’aboutissent pas à une théologie précise du schisme : voir la réponse de dom J. Chapman, Bishop dore and the Catholic daims, c. viii, Londres, 1905, p. 97 sq. Le Rev. T. A. I.acev. Unity and schism, Londres, 1917, a des considérations extrêmement intéressantes et instructives sur l’unité de l’Église, mais il n’élabore pas une notion précise du schisme. Le petit catéchisme anglican à deux pence porte : « On commet le péché de schisme quand on refuse de reconnaître l’évêque du diocèse et quand on célèbre le culte à un autel qui défie son autorité. » À catechism for catholics in England, § 54. Certains anglicans, à vrai dire, parlent comme d’une chose possible du schisme d’une Église particulière à l’égard de l’Église universelle : V. Palmer, Trealise on the Cluirch, 1838, t. i, p. 51 : C. Wordsworth, Theophilus anglicanus, part. I, c. v ; mais ces auteurs n’expliquent pas la nature de ce schisme à l’égard de l’Église universelle ; ils s’appliquent évidemment à montrer que le cas ne s’applique pas à l’Église anglicane par rapport à l’Église catholique, Palmer, p. 442-460 ; Wordsworth, part. II, c. vii ; ils soutiennent au contraire que ce sont les catholiques romains qui sont schismatiques en Angleterre : cf. T. P. Garnier, À first bookon the Cluirch, 2e éd., Londres, 1893, p. 68 sq. ; les difficultés de cette position sont vigoureusement relevées dans un article anonyme de la revue The monlh, juin 1877, p. 129-144, intitulé Some thoughts on schism.

III. Notion de schisme. Partie systématique. — Comme l’hérésie (cf. ce mot), le schisme peut être considéré de trois points de vue principaux : au point de vue du droit ecclésiastique, il est un délit, voir ci-dessous : au point de vue d’une étude historique ou sociologique du christianisme, ou encore de la symbolique comparée et de l’apologétique, il représente des groupements chrétiens définis, dissidents par rapport à l’Église catholique : les schismes ; au point de vue proprement théologique, il représente un péché spécial : c’est sous cet aspect que nous avons à l’étudier ici.

1° Définition du péché de schisme. Sun objet. — Saint Thomas, dans la Somme, traite le schisme comme un péché opposé à l’union qui est, entre les chrétiens, l’effet propre de la charité. Parmi les péchés qui offensent celle vertu, en effet, les uns s’opposent directement à la charité elle-même et à son objet (c’est la haine), les autres s’opposeni à ses actes secondaires ou à ses effets propres qui sont la joie, la paix, la bienfaisance et la correction fraternelle : cette classification évoque de suite à l’esprit les textes de saint Paul, pax cl f/audium in Spiritu Sancto, Rom., xiv. 17, et mi qui énumèrent les fruits de l’Esprit, et l’on sent ainsi combien

esprit aut lient Iquement évangélique anime

la systématisai ion de la Somme. Les péchés Opposés a la paix comme effet (le la charité peuvent être de pensée, et c’est la discorde : de parole, et c’est la dispute, contentio ; d’action enfin, et c’est le schisme. Sum. theol., IIa-IIæ, q. xxxix, la guerre, la rixe et la révolution, seditio. L’acte de schisme est donc cet acte

mauvais qui a directement, proprement et essentielle ment pour objet spécifieateur une chose contraire à la communion ecclésiastique, c’est-à-dire à cette unité qui est, entre les fidèles, l’effet propre de la charité. Un acte, en effet, se spécifie par l’objet qu’il vise per se, en raison même de ce qu’il est ; un acte vérifiera la qualité de schismatique qui, de sa nature même, visera la séparation d’avec l’unité spirituelle qui est le fruit de la charité.

Quelle est au juste cette unité, qui n’est pas une union affective quelconque, mais la réalité même de la communion ecclésiastique ? Saint Thomas précise qu’elle consiste en deux éléments, que nous retrouverons bientôt : la connexion et le commerce spirituel des membres entre eux, in connexione membrorum Ecclesise ad invicem, seu communicatione, et l’ordre de tous au chef de la communauté, Loc. cit. Cette manière de concevoir la communion ecclésiastique n’est chez lui ni occasionnelle ni inventée pour les besoins de la cause : non seulement elle se trouve au fond de ce que saint Thomas dit de l’unité de l’Église et du Corps mystique. In IY" m Scrd., dist. XXIV, q. iii, a. 2, sol. 3 : Com. in Ephes., c. iv, lect. 1 ; In Coloss., c. i. lecl. 5. etc. Non seulement elle est appliquée par lui en philosophie sociale à l’unité de la société naturelle, In IV aa Sent., dist. XIX, q. ii, a. 2, sol. 1 ; Sum. theol., I » -II°, q. c, a. 5 et 0 ; comparer q. lxxxvii, a. 1, et exi, a. 5, ad l um ; mais, comme saint Thomas aime tant à le faire, elle représente une catégorie très générale applicable à l’univers entier, dont l’unité intègre un ordre double, celui des créatures l’une par rapport à l’autre et celui de toutes à Dieu : cf. Tabula aurea, au mot Ordo, n. 25 ; In I, om., c. XIII, lect. 1 : Mélanges thomistes, Paris, 1924, p. 29-1 sq., etc. L’unité ecclésiastique dont le schismatique se sépare est ainsi conçue par le Docteur angélique, conformément aux principes généraux de sa pensée sociologique, comme une unité d’ordre ou de relation : non une unité absolue ou substantielle, comme celle d’une personne humaine, mais l’unité qui naît des relations mutuelles que suscitent, entre plusieurs, la commune recherche du bien spirituel et les actions qu’implique cette recherche. Ce sont ces relations dont saint Thomas dit qu’elles sont de deux types : du type des relations de membre à membre et du type des relations de membre à chef. Les relations de membre à membre forment l’ordre de l’eut r’aide chrétienne, à laquelle saint Paul donne, dans ses épîtres, un si grand relief et que saint Thomas appelle subministratio ad invicem, De verilate, q. xxix, a. 1, mutua subministratio, Sum. theol., II » - II », q. clxxxiii, a. 2, ad l" m. Ce réseau de services mutuels, substance de la communion ecclésiastique, se réalise quand chaque membre est soucieux des autres : s’il a une fonction, l’exerçant non pour son intérêt propre, mais pour le bien de tous, la variété des dons et des charges, loin d’être un obstacle à l’unité, étant le moyen même de réaliser, dans la communion, une unité plus riche : S. Paul, I Cor., i, 10 ; xi, 18 et 19 ; xii, 25 ; S. Thomas, Sum. theol., II a -II" loc. cit. ; si un membre n’a pas de fonction spéciale, il se doit cependant à ses frères, avec tout ce qu’il a de dons et de grâce, pour les aider à réaliser le Corps du Christ. Quant aux relations de membre à chef, elles réalisent l’unité ecclésiastique lorsque le chef donne à chaque partie ce qui lui revient, In I Cor., c.xii, lect. 3, et lorsque les membres se laissent mesurer par le chef en leur activité de membres, recevant de lui la régulation de leur activité spirituelle de foi, de charité, (l’entr’aide. etc. Or. le chef de l’Église, dit saint Thomas, est invisiblement le Christ et visiblement la hiérarchie qu’il a établie en une fonction vicariale et qui a eu elle même son critère de communion et d’unité, le Siège apostolique. IL II’, q. xxxix, a. 1 ; Contra gent., I. IV, c. lxxvi ; cf. Congar, op. cit., c. n.