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1067 « SANATIO IN RADICE »  ». CONDITIONS

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enfants réellement légitimes. La discussion théorique de cette question n’a guère d’importance pratique, du fait que les États modernes n’ont pas égard à la sanatio in radice.

2. La convalidation radicale peut aussi n'être que partielle ou imparfaite. Il en est ainsi lorsque les divers éléments : levée de l’obstacle, dispense de renouveler le consentement et fiction de la rétroaction, qui constituent la sanatio in radice proprement dite, ne se trouvent pas tous réunis, dans un cas déterminé, parce que l’autorité ecclésiastique en a ainsi disposé.

La sanatio est imparfaite chaque fois que l'Église ne rend efficace que le consentement de l’une des parties et exige que celui de l 'autre soit renouvelé absolument ; ou que seuls les effets canoniques du mariage sont accordés, alors qu’il ne saurait plus être question de consentement, à cause de la démence ou du décès de l’une des parties ou même de toutes les deux. Sans doute il paraîtrait possible d’arguer que le consentement de la partie tombée en démence persévère et qu’il n’a pas été révoqué ; c’est ce qu’affirme entre autre d’Annibale, Summula theologiæ moralis, Rome, 1908, part. I, n. 133, note 11 ; n. 135, note 16 ; part. III, n. 504, note 22. Mais, en l’occurrence, il semble préférable de dire que le consentement fait pratiquement défaut, comme s’il y avait eu mort physique ; il ne saurait donc plus s’agir de consentement mutuel radicalement validé. Par ailleurs, vu qu’en beaucoup de pays, le divorce est actuellement permis à la partie saine, quand l’autre devient folle, il ne paraît pas expédient de lier la personne encore libre, à cause de l’invalidité de son mariage, en faisant intervenir la sanatio in radice ; celle-ci n’est intéressante, en ce cas et en d’autres analogues, que pour la légitimation des enfants. Cette hypothèse est dans l’ordre des possibilités et n’excède en rien les limites des pouvoirs des souverains pontifes.

D’ailleurs des validations radicales imparfaites ont été accordées au cours des âges. Boniface VIII, en 1301, a validé radicalement l’union, qu’un empêchement de consanguinité rendait nulle, de la reine Marie et de Sanche, roi de Castille, après la mort de ce dernier (voir Cappello, loc. cit., n. 850 et 858 ; WernzVidal, loc. cit., n. 660). La S. C. du Concile, in Pragensi, accorde la même faveur, le 18 septembre 1723, bien que l'époux fût déjà décédé. D’autres exemples sont fournis par Benoît XIV, Quæst. canon., 174 ; et De synodo dicecesana, t. XIII, c. xxi, n. 7 ; cf. Sanchez, t. VIII, disp. VII, n. G ; Schmalzgrueber, op. cit., n. 120 ; Giovinc, op. cit., t. i, n. 324 ; Gasparri, op. cit., n. 1446 ; Gennari, op. cit., consult. 128 ; Esmein, Le mariage en droit canonique, t. ii, Paris, 1891, p. 352.

Enfin, la validation radicale est incomplète si l’action rétroactive ne porte pas sur le début de l’union, mais seulement sur une période postérieure. Can. 1138, § 2 : Convalidalio fit a momento concessimiis gratiie ; retrotractio vero intclligitur jacta ad malrimonii mitium, nisi aliud expresse caveatur. Elle se réalise surtout lorsque la sanatio ne tend qu'à légitimer les enfants, nés d’une union invalide, ou qu’on doute sérieusement si, dès le début, l’union a eu la véritable figure d’un mariage ou seulement celle d’un concubinage.

5° La « sanatio in radice. » est une mesure extraordinaire. - - La validation radicale est une mesure de faveur extraordinaire à laquelle il n’est fait recours, en général, que pour des cas particuliers. Cependant, en des circonstances extraordinaires, elle a été accordée par mode de statut onde loi pour des diocèses et même pour des pays entiers. Wernz-Yidal, loc. cit., n. 658, note 12. Les concessions de ce genre, les plus connues, sont celles qni ont été faites par.Iules III, en 155 1. m faveur de l’Angleterre, pour essayer de ramener ce

royaume à la foi ; par Clément VIII, en 1595, pour valider les mariages des Grecs invalidement contractés à cause de la consanguinité au quatrième degré ; par Pie VII, le 14 août 1801 et le 7 février 1809, pour pacifier les esprits en France ; par Pie IX, le 17 mars 1856, pour valider les nombreux mariages qui avaient été contractés invalidement en Autriche ; par Léon XIII, le 2 juin 1892, pour assurer le bien de la religion catholique et des fidèles en faveur des hérétiques qui s'étaient mariés d’une façon clandestine et par Pie X, dans la constitution Provida pour valider les mariages mixtes de l’Allemagne. S. C. des Sacrements, 23 février 1909 et 3 juin 1912, Acta apost. Sedis, t. iv, p. 403.

Actuellement les validations radicales sont très fréquemment accordées, peut-être même plus souvent que les dispenses ordinaires, au moins si l’on tient compte des faveurs nombreuses concédées ad cautelam ou par nécessité. En tous cas, elles ne le sont que si les conditions requises sont remplies.

IL Conditions requises. — Le Code les a précisées au canon 1139, § 1 : Quodlibct matrimonium initum cum utriusque partis consensu naturaliter sufficiente, sed juridice inefficaci, ob dirimens impedimentum juris ecclesiaslici vel ob defeclum légitimée formæ, potest in radice sanari, dummodo consensus perseveret. Pour commenter ce canon nous exposerons successivement les points suivants : 1. Le consentement initial doit avoir été naturellement efficace ; 2. il doit persévérer ; 3. il faut une cause grave et urgente et 4. l’empêchement dirimant dont il s’agit d’annuler l’effet doit être de droit ecclésiastique.

1° Le consentement émis initialement par les deux contractants doit être naturellement suffisant et efficace, donc avoir été posé en vue de l’union matrimoniale et non en vue d’un simple concubinage. Il ne saurait être suppléé par aucune autorité : la validation le suppose nécessairement. S’il n’a pas existé, celle-ci est absolument sans effet, vu qu’elle a pour fin de rendre juridiquement légitime et efficace un acte mutuel de volonté.

Si, au moment de la célébration du mariage, une seule partie a voulu l’union matrimoniale, alors que l’autre n’y songeait pas, ayant en vue toute autre fin, le concubinage par exemple, le consentement de la première peut être validé radicalement, tandis que la seconde doit absolument émettre un nouvel acte de volonté ; c’est nécessaire, car, ainsi que nous l’avons déjà dit, l'Église ne peut pas le suppléer et sans lui, aucune validation in radice n’est possible.

La discipline était autrefois plus sévère ; le législateur considérait en effet que les contractants vivaient en concubinage s’ils n'étaient pas de bonne foi et si leur union n’avait pas les apparences d’un vrai mariage. Cf. Benoît XIV, epist. Redditie du 5 décembre 1744, § 40 ; Gasparri, op. cit., n. 1449 ; Ballerini-Palmieri, Opus theologicum, Prati, 1900, n. 986 ; Zitclli, De dispensationibus, Rome, 1887, p. 117. Des difficultés sérieuses s'élevaient d’ailleurs quand il s’agissait de déterminer dans la pratique si telle ou telle union apparaissait effectivement être matrimoniale. Au sens strict, ne remplissait cette condition que celle qui avait été contractée suivant la forme ecclésiastique. Mais ne l’avait-elle pas aussi celle qui, invalide par ailleurs, avait été célébrée devant un ministre hérétique ou un magistrat civil ou en conformité des mœurs régnantes dans une région ? Voir un (léciei de la s. C. de l' Inquisition, 16 septembre 1824, dans Collectanea S. C. de Propaganda Fide, n. 1235, 1463 ; un décret de la même Congrégation du 22 août 1906, dans Analecta ecclesiastica, t. xv, 1907, 8.

Actuellement, l'Église n’insiste pas autant sur les caractères extérieurs, ainsi qu’il ressort du silence