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SAINTS CULTE DES). INVOCATION


teur ; du moins des femmes prêtresses lui offraientelles des sacrifiées. > Marie, sans doute, est à mettre au-dessus de sainte Thècle, à cause du mystère céleste qui s’est accompli dans sou sein ; mais aucun saint ne doit être adoré et il ne faut pas retomber dans l’ancienne superstition. » Col. 7 IX.

Pendant que, aux iv et ve siècles, les manifestations du culte des saints prenaient une ampleur toute nouvelle, les Pères de l'Église se sont appliqués à en définir exactement le caractère : c'était du dogme ; ils ont pratiqué et conseillé l’invocation aux martyrs, comme le faisait la tradition : ils ont essayé de comprendre, selon la foi, l’intercession des bienheureux : mais c'était de la spéculation théologique ; enfin, ils n’ont pas omis de recommander l’imitation des exemples des saints : c'élait de saine morale.

1° Nature du culte des saints. I.es nouveaux convertis étaient assurément portés à voir dans les anges et les saints des successeurs de leurs dieux abolis. Les Pères grecs se sont élevés surtout, au début du iv c siècle, contre les abus du culte des anges. Sans doute, Origène avait dès longtemps fixé la doctrine orthodoxe sur ce point, dans son excellente apologie Cont. Celsum, t. V, 4 ; t. VIII, 5, 6, 13, P. G., t. xi, col. 15Il sq. « Des anges, ainsi nommés des œuvres qu’ils assument. nous avons appris qu’ils sont divins, mais qu’ils ne sont jamais nommés dieux dans l'Écriture ; et, partant, qu’il ne nous est pas ordonné de les révérer et adorer à titre de dieux, eux qui servent Dieu et nous apportent ses bienfaits. Tous nos vœux, nos supplications, nos demandes et nos actions de grâces doivent être adressées à Dieu… et au Verbe vivant. Dieu lui-même, qui est au-dessus des anges. » Op. cit., t. V, I. Cependant » on doit aussi honorer les anges, ministres de Dieu. Si Celse avait bien compris quels sont, après le Fils unique, les vrais ministres de Dieu, comme Gabriel, Michel et les autres anges et archanges, et qu’il eût dit qu’il faut les honorer, peut-être en surveillant la signification de ce mot « honorer » et les devoirs qu’il implique, j’aurais, en cet endroit, vu l’importance de la matière, apporté le fruit de mes réflexions. Mais ce qu’il appelle ministres de Dieu, ce sont ces démons qui sont adorés des païens ; il ne faut donc pas admettre le culte [de ces mauvais anges], que l'Écriture dénonce comme des serviteurs du Mauvais, du Prince de ce monde. » Op. cit., t. VIII, 42, col. 1535. Cependant le culte des anges était si populaire en Asie Mineure, depuis le. temps de l'épître aux Colossiens, II, IX. que le concile de I.aodicée (3X1), eau. 35, dut le prohiber à nouveau : « Il ne faut pas cpie les chrétiens désertent l'église tle Dieu, pour invoquer les anges et faire des réunions. Si l’on en surprend à se livrer à cette idolâtrie secrète, qu’il soit anathème, parce qu’il a abandonné Notre-Seigneur Jésus-Christ et passé à l’ido latrie. El cependant, au canon qui précède, le même synode préconise le culte des martyrs : il veut donc parler ici du culle des démons ou (Vuw culte vraiment idolâtrique dis anges, tel que celui qu’a encore connu Théodorct : « Encore aujourd’hui, chez les gens de Colosses et îles environs, on peut voir des oratoires de saint Michel. Ils conseillaient d’en agir ainsi, disant que Dieu ne peut être vu ni atteint, et qu’il faut absolument par les anges se concilier la bienveillance de Dieu. » Théodorct, Quæstiones in Scriptur. sacram, In Col., ii, IX, P. G., t. i. xxxii, col. 550. Cependant Théodorct est loin de réprouver le culte éclairé des saints anges. Loc. cit., In Daniel., c. x, 13, P. G., t. Lxxxi, col. I 196. Mais le culle à leur rendre est différent du culte de Jésus Christ.

Poill le culte des martyrs, il était urgent de faire la même distinction. Les saints martyrs, nous les hono nuis comme témoins de Dieu et ses serviteurs très

aimants, i Théodore t, Grsec. affection, curatio, 1. lii.

/'. G., t. lxxxvii, col. 1012 ; cf. S. Cyrille d’Alexandrie, Contra Julianum imperat., t. VI, P. G., t. lxxvi, col. 929 : « Nous n’appelons pas dieux les saints martyrs, et nous ne les adorons pas comme tels, mais d’un culte d’amour et d’honneur. » De même saint Augustin : « Nous honorons les martyrs de ce culte de dilectionet de communion qui est donné, même en cette vie, aux saints hommes prêts à souffrir le martyre pour la vérité de l'Évangile ; mais aux martyrs, nous le donnons avec d’autant plus de dévotion et de sécurité après tant d’incertitudes ici-bas, nous les célébrons avec d’autant plus de confiance qu’ils sont déjà victorieux dans la vie bienheureuse. » Contra Fauslum, t. XX, c. xxi, P. L.. t. xlii, col. 384. On entend ici un écho, combien fidèle et unanime, de la simple déclaration des chrétiens de Smyrne, et des enseignements d’Origène et de Cyprien.

Mais il fallait préciser encore la distinction des deux cultes ; et, comme toujours, le mot exact ne vint qu’après de multiples tâtonnements. « Mes bien-aimés, vénérez les martyrs, louez, aimez, célébrez, honorez ces martyrs mais Deum marlyrum colite. » S. Augustin, Serm., cci.xxiii, n. 9, P. L., t. xxxviii, col. 1248. Ainsi, le culte proprement dit est réservé à Dieu, de même la religio, au sens étroit du mot : Non sit nobis religio, cullus hominum mortuorum ; quia, si pie vixerunt, non sic habentur ut taies qaserani honores ; sed illum a nobis coli L’olunt, quo illuminati lœtantur meriti sui nos esse consorles. Honorandi ergo sunt propler imilalionem, non adorandi propler religioncm. S. Augustin, De vera reliyione, c. lv, t. xxxiv, col. 169. L’adoration est donc aussi réservée à Dieu. Mais le mot religio a aussi un sens large, dit saint Augustin, de même que les expressions 0p7)cry.£Îa et sùasôsio ;, « les Grecs ont le motXaxpsîa que nous traduisons servitus Dei ; mais nous n’avons pas en latin la possibilité de dire cela en un mot. » De civ. Dei, t. X, c. I. Cependant ce mot latrie deviendra officiel ; quant au mot dulie il ne sera employé qu'à la renaissance carolingienne. Saint Jérôme ne trouvera pas davantage l’expression appropriée. « Pour nous, culte et adoration ne s’adressent ni aux reliques des martyrs, ni même au soleil, à la lune, ni aux anges, ni… à tout nom invoqué dans le monde présent ou à venir. Mais nous honorons les reliques des martyrs, de façon à n’adorer que celui dont ils sont les martyrs ; nous honorons les serviteurs, pour que leur honneur remonte à leur maître. » S. Jérôme, EpisL, cix, Ad Ripariiun, 1, P. L., t. xxii, col. 907.

Chez les Grecs, le mot adoration, 7rpoaxôvy)ai< ;. n’avait pas un sens aussi rigoureux ; saint Cyrille d’Alexandrie distingue plutôt entre « adorer Dieu XaTpeuTixtoç, et adorer les saints a/suv.ôiç xxl TtjxrjTixcii ; ". Cont. Julian., I. VI, P. G., t. lxxvi, col. 812. Ces mots seront authentiqués par saint Jean Damaseène, Discours, [II, c. xi., cité plus loin. Ainsi les mots techniques diffèrent selon les Églises ; mais la doctrine catholique et les marques de vénération sont suffisamment claires pour faire sentir ces distinctions. Cf. S. À vit, fragment dans /'. /… t. i.ix. col. 299.

Invocation des saints.

La pratique cultuelle la

plus caractéristique de la croyance commune était de prier les saints.

1. Chez les Pères grecs.

Elle s’explicita dès le

milieu du iv siècle. Saint Hasile énumère les faveurs, surtout temporelles, accordées par saint Manias à ceux qui le prient. Oratio in sanctum Mamantem, n. 20, Bibliolh. hagiogr. grsec, 1021, 26. Saint Grégoire de NaLiauLe (f c. 390) invoque avec ferveur le martyr Cyprien et lui recommande les intérêts qui lui sont chers, ou bien encore, il appelle la protection des martyrs sur son frère Césaire, qui repose auprès d’eux. Oratio in sanctum Cyprianum ; Epitaph. in Cœsarium, 20, /'. (, ., t. xxxv, col. 1103, et t. xxxviii, col. 20.