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SAINTETÉ— SAINTS CULTE DES)

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l’appartenance à toute confession particulière. Ses vertus ne sauraient donc autoriser aucune confession non catholique : elles valent par ce que valent les principes de vie spirituelle qui les ont inspirées. La sainteté d’un Séraphin de Sarov est une sainteté empruntée, apparentée, à la sainteté catholique. Près d’elle allaient se retremper des âmes cherchant des leçons de vie meilleure, la paix de la conscience, une aide contre les tentations de l’esprit et de la chair. Ceux qui auraient été tentés d’aller plus avant et de s’inquiéter de la véritable Église du Christ auraient trouvé dans la fréquentation d’une telle sainteté un motif, non de se fixer dans l’hétérodoxie, mais de se rapprocher de l'Église romaine, dont les prérogatives « leur apparaîtraient d’autant mieux, qu’ils auraient commencé de goûter le Maître ». En examinant avec soin la sainteté de l’ermite de Sarov, on constate qu’elle relève per se des principes formulés dans la seule Église catholique : « Les différences, dit excellemment le P. de Grandmaison, portent sur des modalités par lesquelles l’Esprit s’adapte et s’attempère à des races diverses ; pour le fond, et, plus manifestement encore pour l'élément de choix et de discréation qui juge et hiérarchise les opérations de la vie spirituelle supérieure, un fidèle catholique peut presque dire : « Tout est nôtre ! … »

IV. Conclusion générale.

De tout ce qui précède, il semble ressortir que la preuve de la légitimité de l'Église catholique par la marque de sa sainteté gagnerait à être située principalement sur le terrain dynamique. Comme la catholicité, la sainteté est, avant tout, dans l'Église du Christ, une force qui attire et entraîne les âmes vers la perfection. Un travail de comparaison qui chercherait à établir, avant tout, la supériorité morale des catholiques sur les chrétiens non catholiques, présentera nécessairement des points très contestables, quand on voudra la replacer dans tels milieux, à telle époque, dans telles circonstances. La comparaison, nécessaire sans doute pour mettre en relief la note de sainteté, doit s'établir avant tout, du point de vue des principes, en marquant comment, dans l’ensemble, au cours de tous les siècles et sous tous les climats, la vertu agissante du catholicisme attire les âmes plus complètement, plus universellement, d’une façon plus intense, dans l’ambiance immédiate de l'Église romaine.

Ainsi, d’une part, on évite d’exagérer la sainteté comme propriété de l'Église catholique. L’histoire y trouve son compte. Quelle que soit la sublimité des principes et le dynamisme de leur vertu agissante sur les âmes, « la réalisation complète de la sainteté absolue n’est possible en aucune génération de l'Église. Le christianisme représente un idéal éternellement irréalisable. Ni le « moi individuel », ni le « moi « collectif » de l'Église ne pourront jamais se faire une gloire de l’avoir réalisé pratiquement et, par conséquent, se déclarer satisfaits, quel que soit le degré atteint ». Mais, d’autre part, en rapprochant (nous ne disons pas : en opposant) le catholicisme et les religions dissidentes, on constatera comment la plénitude possible ici-bas se trouve dans le catholicisme, alors que les religions dissidentes n’en possèdent que des irradiations héritées du passé ou reçues dans le présent : « Le christianisme est « la consommation, « l’accomplissement des religions », non seulement parce qu’il renferme en lui, dans toute leur pureté, leurs valeurs religieuses, mais encore parce qu’il contient en les développant, en les complétant, toutes les valeurs dispersées çà et là dans les autres religions ; et cette universalité est un nouveau signe de son essentielle supériorité. Cette fusion de divers éléments est quelque chose de plus qu’une addition de parties multiples ; elle donne un « tout » plutôt qu’une somme de compo sants. En elle-même, la polarité possède une vertu créatrice ; par le seul fait qu’elle existe, elle remédie aux tendances particularistes qui sont le mal ordinaire des vérités partielles, des tendances schismatiques et séparatistes ( « hérésies » ) en tant qu’elles gardent encore quelque vérité et quelque valeur. Tout ce qui est en germe et n’a pas évolué, tout ce qui a survécu au particularisme ou au désaccord, tout ce qui ne peut contribuer à défigurer la partie demeurée saine, la religion du Christ le résume. Elle précise et coordonne toutes les valeurs pour leur donner plénitude et élévation, dans la mesure où la vie humaine peut se rapprocher de l’idée divine. » Otto Karrer, Le sentiment religieux dans l’humanité et le christianisme, tr. fr., Paris, 1937, p. 249, 235.

On consultera les traités De Ecclesia, à la question de la sainteté. On se reportera particulièrement a certaines études spéciales : A. de Poulpiquet, L'Église catholique, ouvrage posthume, Paris, 1923 ; R. Garrigou-Lagrange, De revelatione, per Ecclesiam catholicam proposila, t. ii, Paris, 1918, p. 1281-310 ; du même auteur, dans Apologétique, Paris, 1937, deuxième partie, VIII, La sainteté de l Église, p. 600642 ; P. Buysse, L'Église de Jésus, Paris, P. » 2.'. ; A.-D. Sertillanges, L'Église, 2 vol., Paris, 1919 ; Karl Adam, Le vrai visage du catholicisme, tr. fr., Paris, 1931 ; Otto Karrer, Le sentiment religieux dans l’humauite et le christianisme, tr. fr., Paris, 1937, surlout p. 202-313 ; L. Capéran, La question du surnaturel, Paris, 1938, p. 12.V1 -là ; 171-245,

A. Michel.

    1. SAINTS (CULTE DES)##


SAINTS (CULTE DES). - Il faut prendre ici les deux mots au sens le plus large, le culte comprenant non seulement les hommages religieux que l’on rend aux saints, mais aussi les prières qu’on leur adresse et l’imitation de leurs exemples. Honneurs rendus, invocation, imitation, tels sont les trois éléments dont on cherchera à montrer qu’ils sont traditionnels. Ceci amène à dire que les saints ainsi honorés sont les saints canonisés et aussi tous les autres bienheureux, connus ou inconnus, qui ont droit à ces hommages et à ces invocations. Pour les précisions apportées en cette matière à la discipline de l'Église, on pourra consulter dans ce dictionnaire les articles Béatification, Canonisation, Procès ecclésiastiques, etc.

L'étude théologique du culte des saints doit donner au mot culte une acception religieuse ; aussi faudra-t-il montrer d’abord que les hommages accordés aux saints dans l'Église chrétienne se différencièrent, des l’origine, du culte des ancêtres, du culte des héros et des grands hommes. La vénération que nous donnons aux saints est de nature religieuse ; et, comme la rai son dernière de notre religion chrétienne est Dieu seul, nous disons que le culte des saints se rapporte finalement à Dieu. Pour être inférieur et subordonné au culte divin, il n’en est pas moins un culte de religion : de dulie ou d’hyperdulie ; la sainteté de ces personnes privilégiées est à chercher dans la grâce libre de Dieu, et nos rapports avec elles se fondent sur leur communion avec nous dans le Christ Jésus. Pour le développement de ces notions théologiques, on se référera aux articles Adoration, Communion des saints, CULTE, t. i, col. 437 ; t. iii, col. 440. 2405.

Nous nous bornerons à exposer ici les développements de cette doctrine. I. Dans l'Écriture sainte. II. Aux trois premiers siècles (col. 886). III. Après le triomphe de 1 Église (col. 905). IV. Durant le Moyen Age occidental (col. 939). Y. À l'âge SCOlastique (col. 958). VI. Lors de la réforme protestante (col. 9t12). VII. La législation ecclésiastique actuelle (col. 973). I. Le culte des saints dans l'Écriture. — La présente enquête ne peut se borner aux mots culte et saints. Il faut même se défier du sens donné à ces expressions dans les écrits inspirés, le mot « culte » ne s’adressant qu'à Dieu et le mot « saint » dans l’Ancien Testament ne visant que le peuple dédié au service et