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SACRILÈGE. CKA VITE


être sérieuse et produite dans l’Église, mais il n’est pas nécessaire que le sol soit couvert de sang et que l’effusion ait eu lieu en totalité à l’intérieur du temple.

c) Un usage impie ou sordide. — Le Code pas plus que le droit ancien, ne détermine quels sont ces actes impies ou sordides, qui profanent l’église. Pour qu’il y ait violation de ce chef, il faut non pas une action passagère, mais une certaine habitude ou répétition, ou au moins la continuation d’un acte peccamineux impie ou sordide. Tel est le sens à donner, nous semble-t-il, au mot usus, can. 1172, § 1, 3° : Impiis vel sordidis usibus, quibus ecclesia addicla fuerit.

En tête de catégorie d’actes peccamineux, entachés de sacrilège, il faut mettre les péchés de luxure commis dans l’église. Ensuite, à moins qu’en certaines circonstances, une urgente nécessité ou une coutume déjà longue n’en excuse, l’utilisation d’une église pour les exercices d’un culte hérétique, pour des représentations théâtrales déshonnêtes ou pour des jeux profanes, la transformation d’une église en une salle de banquet ou en une écurie, d’un cimetière bénit en un champ de foire. S. Alphonse, t. III, n. 36, 37.

Malgré le caractère de justice qui s’attache à la peine capitale^, nous croyons que le fait de l’exécuter dans une église, est impie. Des séances littéraires ou musicales peuvent parfois être permises dans les églises et ne donnent pas lieu à un péché de sacrilège local, surtout si elles tendent a favoriser la religion. Mais la S. C. de la Consistoriale a absolument interdit dans les églises toutes projections ou représentations cinématographiques (10 décembre 1912). Acta aposi. Sedis, 1912, p. 724.

Enfin la vente des cierges et autres objets destinés à exciter la dévotion des fidèles est légitimement tolérée, à condition que l’on veille à ce que la maison du Seigneur ne soit pas changée en un temple d’affaires.

d) La sépulture d’un infidèle ou d’un excommunié. — La défense d’inhumer les infidèles dans les églises est une loi « odieuse », et c’est pourquoi les canonistes estiment communément que par infidèles, il ne faut pas entendre ici les enfants des chrétiens, non encore baptisés, ni les catéchumènes. Gasparri, loc. cit., n. 253 ; S. Alphonse, I. VI, n. 366.

La loi ecclésiastique interdit la sépulture des infidèles dans les églises. La sépulture d’un excommunié, au moins après la sentence déclaratoire ou condemnatoire, profanerait également le lieu sacré, can. 1172, §1, 4°. Le can. 1175 prescrit même que l’exhumation du cadavre de l’excommunié, qui a été enterré dans l’église, soit faite au plus tôt, même avant la réconciliation, si cela est possible et sans grave inconvénient. -L’inhumation des autres excommuniés dans l’église n’est pas considérée comme une profanation.

Des peines sont édictées par le Code contre ceux qui passeraient outre à cette prescription ou même donneraient les honneurs de la sépulture ecclésiastique aux infidèles et aux excommuniés, can. 2339 : Qui uusi f uer i ni mandare seu cogère tradi ecclesiaticæ sepulturæ infidèles, apostatas a fidc, vel hærelicos, schismaticos aliosve sive excommunicalos sive interdictos contra præscriplum can. 1240, § 1, contrahunt excommunicationem latte sententiæ nemini reservatam ; sponte vero sepulturam eisdem douantes, interdiction ab ingressu ecclesise Ordinario reservatum.

La profanation d’une église n’entraîne pas celle du cimetière, même si ce dernier lui est contigu, et viceversa, can. 1172, § 2 : violata ecclesia, non ideo cœmcterium, elsi contiguum, violatum censetur, et vice versa.

Un cimetière, dans lequel il n’y a que quelques tombes bénites alors que lui-même ne l’est pas, ne peut pas être violé parce que la bénédiction partielle

ne constitue pas le lieu sacré. Un cimetière municipal, qui a été bénit, n’est probablement pas violé du fait que des infidèles et des hérétiques y sont inhumés, pourvu que la plus grande partie de ceux qui y dorment leur dernier sommeil soient catholiques.

Ceux qui violent les églises et les cimetières peuvent être punis de l’interdiction de l’entrée de l’église et de toutes autres peines que l’Ordinaire estime convenables en relation avec la gravité du délit, can. 2329 : Ecclesise vel cœmeterii violatores de quibus in can. 1172, 1207, inlerdiclo ab ingressu ecclesiæ aliisque congruis pienis ab Ordinario pro gravitate delicti puniantur.

Les autres péchés extérieurs qui peuvent être commis dans les lieux sacrés ne revêtent pas la malice grave du sacrilège. Mais à cause des circonstances de lieu où ils sont commis, venialem sacrilegii malitiam induunl. Les fautes internes ne violent pas la sainteté du lieu, parce qu’elles n’affectent pas celui-ci ; cependant serait coupable de sacrilège celui qui désirerait accomplir une œuvre extérieure sacrilège ou qui se délecterait de cette ccuvre en tant que sacrilège. S. Alphonse, t. III, n. 43.

III. Gravité du sacrilège.

De sa nature, le sacrilège personnel, local ou réel est un péché mortel contre la religion, car il s’oppose gravement à l’excellence de cette vertu, étant un mépris sérieux d’une personne, d’un lieu ou d’une chose sacrée. Dans chaque espèce il y a différents degrés selon la diversité dis personnes, des lieux et des choses sacrés qui ont été profanés.

Le sacrilège peut cependant n’être que véniel à cause de la légèreté de matière ou de L’inadvertance ou du manque de volonté. Pour éviter les troubles de conscience, les fidèles doivent en être avertis à l’occasion. Un petit vol, commis dans une église, de menus objets ou d’offrandes charitables, ne saurait être considéré comme constituant une matière grave.

Pratiquement pour juger un péché de sacrilège, il faudra donc tenir compte de la sainteté de la personne, du lieu ou de la chose, de l’action sacrilège elle-même, estimée d’après le sentiment des hommes prudents et enfin de l’intention du délinquant, qui a pu commettre l’acte irrévérenticl plus ou moins volontairement, avec une clairvoyance plus ou moins nette.

Les circonstances de temps peuvent aussi entrer en ligne de compte, car elles sont parfois l’occasion d’un sacrilège, si l’action posée contient en elle-même une répugnance extraordinaire aux yeux des fidèles et de l’Église avec un mystère divin. Quiconque, par exemple, organiserait, le vendredi saint, par manière de bravade anti-religieuse, un grand banquet, où seraient servis des plats de viande, commettrait probablement un sacrilège.

Tous les moralistes traitent la question du sacrilège dans l’étude de la vertu de religion ou à propos de la chasteté. On pourra donc facilement se reporter à ces chapitres. Par ailleurs cette question n’échappe pas aux canonistes dans leurs commentaires sur les personnes, les choses et lieux sacrés et sur les peines qui frappent les délinquants. La bibliographie est de ce double chef liés vaste. Nous nous contenterons de citer les auteurs principaux :

S. Thomas, .S’um. theol., 1 1°-1 1°=, q. xcix ; S. Alphonse de Liguori, Theologia moralis, t. III, n. 33-48 ; Aertuys, Theologia moralis juxta doctrinam S. Alphonsi de Ligorio, 2e édit., Tournai, 1890 ; 10e édit., adaptée au Code par Damen, Tournaꝟ. 1919-1920 ; Ballerini-Palmieii, Opus morale a Ballerini conscriptum et a Palmieri cum annotationibus editum, t. ii, Prati, 1899 ; Ferrons, Prompta bibliotheca, Paris, 18.~>7, art. Sacrilegium ; Ferreres, Compendium theologia : moralis (Gury), t. I, 1918 ; Gasparri, Tractatus eanonicus de ss. eucharistia, Paris, 1897 ; Genicot, Théologies moralis institutiones, t. i, Louvain, 1898-1902 ; Genicot-Salsmans, Theologia ; moralis institutiones, t. i, Bruxelles,