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    1. SACREMENTS##


SACREMENTS. CAUSALITÉ, LE CONCILE DE TRENTE

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la foi. ou encore de simples marques distinctives des fidèles par rapport aux autres hommes. Mais ils contiennent vraiment, comme la cause contient l’effet, et confèrent la grâce qu’ils signifient, à tous ceux qui ne mettent pas d’obstacle à leur action. On retrouve ici une confirmation authentique <le la doctrine traditionnelle du signe efficace. Voir col. 198-536. Mais il s’agit, précisons-le, d’obstacle à l’infusion de la grâce, non d’obstacle à la réception valide du sacrement luimême. Cf. Vail Noort, Dr sacramentis, t. i, n. 12. Indirectement, ce canon permet de rectifier l’opinion de certains théologiens scolastiques, notamment de Durand de Saint-Pourçain, In I '" m Sent., dist. I. q. [V, qui considéraient les sacrements comme de simples conditions de la grâce.

Ce canon prépare les canons suivants sur la » causalité sacramentelle. Il s’inspire du décret Pro Armenis : nostra (sacramenta) et continent gratiam et ipsam digne suscipientibus conferunt. Denz.-Bannw., n. 695.

Can. 7. — Si quis dixerit, non daii gratiam in hujusmodi saciamen/i'.s-semper et omnibus, qui ea suscipiunt, quantum est ex parte Dei, sed aliquando lantum et aliqulbus, A. S.

S. q. d. non dari gratiam Si quelqu’un dil que la per hujusmodi sacramenta grâce, quant à ce qui est de semper et omnibus quantum la part de Dieu, n’est pas est ex parte Dei, etiam si rite donnée toujours et à tous ea SUSCipiant, sed aliquando par ces sacrements, enc< re et aliquibus, A. S. qu’ils soient reçus avec les

conditions requises ; mais que cette grâce n’est donnée que quelquefois et à quelques-uns, qui] soil anathème.

Ce canon vise les erreurs de la prop. 8, col. 598. Les corrections faites au premier texte apparaissent si bien fondées qu’il est inutile d’insister.

Can. 8. — S. q. d. per ipsa sacramentorum opéra mdlo modo conferri gratiam, sed solam fidem divins promissionis ad gratiam consequendam siillicere, A. S.

S. q. d. per ipsa noyas Si quelqu’un dit que, par l.eijis sacramenta ex opère les mêmes sacrements de la opérai » non conferri gratiam, nouvelle Loi, la grâce n’est sed solam fidem divin : » - pas conférée par l'œuvre promissionis ad gratiam con-même accomplie ; mais que sequendam sufficere, A. S. seule la loi aux promesses de l > i < 1 1 suffit pour obtenir la grâce, qu’il soit anatliéme.

1. La rédaction du canon. Il semble bien que ce canon vise les erreurs, n. 4 et 7, col. 597-598. I.a première proposition avait été d’emblée et sans hésitation classée parmi les propositions hérétiques à condamner absolument. La seconde, bien que considérée comme hérétique, suscita néanmoins quelques observations, car la foi est une. condition requise, pour que le sacre inent, surtout quand il s’agit du baptême et de la pénitence, puisse être fructueux. C’est à la suite de ces observations qu’on formula le canon 8 tel que nous l’avons lu dans le projet.

Toutefois, l’expression per ipsa sacramentorum opéra, reproduite de Luther (et c’est la raison pour laquelle quelques-uns la voulaient maintenir) ne parut pas très heureuse. L'évêque de Bitonto proposa per sacramentel ou per sacramenta ex opère operato (Conc. Trid., t. v, p. 989) ; celui de Badajoz : per usiim sacramentorum ou per opus opération sacramentorum ( l 'acensis, p. 989) ; le général des dominicains : per ipsa sacramenta ou vi aut virtute ipsorum sacramentorum (p. 990) ; celui des servîtes : ex ni sacramentorum (id.) ; l'évêque de Feltre soit per sacramenta, comme l’avait demandé le cardinal de.læn (p. 980), soit l’addition laïK/uam instrumenta (p. 987). Finalement la commission préparatoire s’arrêta au texte pourvu des expressions, moins élégantes sans doute, mais plus techniques, non ponentibus obicem et ex opère operato.

Ce fut, dit à juste titre le P. Cavallera, « tout profit pour L’exactitude et la netteté doctrinale ». Bulletin de Toulouse, 1915, p. 20.

2. L’expression - ex opère operato ». — Ce canon est d’une importance exceptionnelle ; en ce qu’il consacre définitivement et officiellement la fameuse formule : ex opère operato, qui marque le caractère de l’action sacramentelle. Les controverses relatives aux ordinations simoniaques et, plus généralement, aux sacrements administrés par des ministres indignes, ont amené, dans la théologie catholique, l’emploi des formules ex opère operato et ex opère operantis. Si l’action du ministre comme telle peut être répréhensible et coupable, le résultat de cette action, l'œuvre elle-même accomplie dans l'âme du sujet qui a reçu le sacrement est bonne : c’est Vopus operalum. Voir, sur cette formule, Opus opkratum, t. xi, col. 1084.

Le canon précité ne fait que consacrer une tradition théologique de trois siècles. Dans le premier texte proposé à l’approbation conciliaire, l’expression ex opère operato manquait. Nous venons de voir comment la discussion y amena les Pères, au grand profit de l’exactitude et de la netteté doctrinale. Le sens conciliaire de cette expression ressort des canons qui précèdent et préparent le can. 8. Tout d’abord, le concile avait établi, can. 2, que les sacrements de la Loi nouvelle diffèrent des sacrements de l’ancienne Loi. Il déclare qu’ils sont nécessaires et que la foi seule ne suffit pas à obtenir de Dieu la grâce de la justification, can. 4. Il définit que leur utilité ne consiste pas à exciter la foi en nous, can. 5. Enfin le can. 6 prépare, heureusement le sens du can. 8 : les sacrements de la Loi nouvelle contiennent la grâce qu’ils signifient et ils la confèrent ex opère operato. En parlant explicitement de ceux qui n’apportent pas d’obstacle à la grâce, le concile exprime sa pensée sur l’efficacité ex opère operato : il ne s’agit pas d’une sorte d’efficacité magique, indépendante de nos dispositions subjectives, comme les hérétiques l’ont reproché si souvent — et si injustement — à l'Église. À propos du sacrement de pénitence, le concile de Trente repousse cette interprétation aussi fausse qu’injurieuse : « On calomnie indignement les écrivains catholiques en affirmant qu’ils enseignent que le sacrement de pénitence confère la grâce sans aucun bon mouvement de la part de ceux qui le reçoivent ; jamais l'Église de JésusChrist n’a enseigné ni professé cette erreur. » Sess. xiv, c. iv, Denz.-Bannw., n. 898. Là où sont requises certaines dispositions subjectives, le sacrement ne saurait agir si ces dispositions sont absentes ; mais cette condition remplie, il agit par lui-même et non par la foi du sujet qui le reçoit.

L’interprétation théologique de la formule va plus loin et comporte trois précisions que nous avons déjà indiquées à l’art. Opus operatum, col. 1086.

Une dernière remarque est nécessaire, relativement aux opinions théologiques concernant la nature de la grâce sacramentelle et la causalité des sacrements dans la production de la grâce. On trouvera dans Cavallera, Bulletin de Toulouse, 1915-1910, p. 28 sq., 00 sq., l’exposé des opinions théologiques sur ce double sujet, expose rédigé précisément dans le but de montrer que « le concile de Trente n’a aucunenu ni songé a intervenir au sujet des opinions soutenues par les diverses écoles catholiques ». Tout spécialement en ce qui concerne la causalité des sacrements, après avoir rapporté l'évolution de la pensée théologique sur ce point, le P. Cavallera conclut :

< Celte étude détaillée justifie aisément l’altitude réservée qu’il (le concile) adopte. Les termes employés ne sont pas la propriété d’une école : toutes, depuis le xiii siècle où l’on commence à spéculer sur les définitions d’Hugues et de Pierre Lombard admettent que